ANALYSE DES SERVICES LIÉS AU DROIT DE L'IMMIGRATION ET DE LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS AU CANADA

PARTIE TROIS : SITUATION AU PAYS

Résumé des services en matière de droit de l'immigration et de la protection des réfugiés offerts par l'aide juridique

Cette section présente un aperçu des services couverts par l'aide juridique, dans chaque province, pour les causes relevant du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés. Aux fins du présent résumé, les quatre provinces qui ne dispensent pas de services d'aide juridique aux réfugiés et aux immigrants, soit la Saskatchewan, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard, ont été omises.

TYPES DE SERVICES D'AIDE JURIDIQUE OFFERTS AUX IMMIGRANTS ET AUX RÉFUGIÉS, PAR PROVINCE
Type de service Province
C.-B. Alb. Man. Ont. Qc T.-N.
Conseils ou aide de nature générale Oui Ltés Ltés Oui Ltés Ltés
Aide ou conseils juridiques Oui Ltés Oui Oui Oui Oui
Représentation juridique Oui Oui Oui Oui Oui Oui
Représentation par un avocat de service Oui Non Non Non Non Ltés
Vulgarisation juridique Oui Non Non Oui Oui Ltés
Traduction et aide linguistique Oui Oui Non Oui Oui Oui

Comme l'indique ce tableau, toutes les provinces qui couvrent les services d'aide juridique pour les causes relevant du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés assurent une représentation juridique complète. Le tableau qui suit résume les questions précises en matière de droit de l'immigration et de la protection des réfugiés pour lesquelles des services d'aide juridique sont disponibles dans chacune des provinces.

L'aide ou les conseils juridiques sont presque aussi disponibles que la représentation juridique, mais le volet conseils de chaque province vise des éléments fort différents. Par exemple, des conseils juridiques sont offerts à Terre-Neuve, mais comme il ne s'y trouve que deux avocats salariés en droit de l'immigration et de la protection des réfugiés, l'aide y est beaucoup plus limitée que dans les provinces comme la Colombie-Britannique et l'Ontario. En Alberta, les conseils juridiques ne sont offerts que par le coordonnateur des services aux immigrants - poste de technicien juridique dans le cadre d'un projet pilote qui, pour l'instant, n'est comblé que par une personne.

La traduction et d'autres formes d'aide linguistique sont également largement offertes par les bureaux des régimes provinciaux d'aide juridique, sauf au Manitoba. Les clients ayant besoin d'une aide linguistique dans cette province sont dirigés vers le Conseil multiconfessionnel d'aide à l'établissement des immigrants au Canada. Dans les autres provinces, les services de traduction et d'aide linguistique sont généralement offerts sous forme de débours par des programmes d'aide juridique, mais des techniciens juridiques ou d'autres employés de la Colombie-Britannique et de l'Ontario fournissent également des services dans ce domaine. À Terre-Neuve, l'aide juridique retient, au besoin, les services d'interprètes ou de traducteurs.

La Colombie-Britannique et l'Ontario dispensent des conseils ou de l'aide de nature générale, l'Ontario possédant le plus vaste système de prestation de ce genre de services grâce à son réseau de cliniques juridiques communautaires. En Colombie-Britannique, les conseils ou l'aide de nature générale dans les causes relevant du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés sont principalement offerts par l'Immigration and Refugee Clinic, dont la fermeture est toutefois prévue pour août 2002. Des conseils ou de l'aide de nature générale limités sont offerts en Alberta, au Manitoba, au Québec et à Terre-Neuve, mais aucune de ces provinces n'a un système établi pour offrir cette forme de service comme en Colombie-Britannique et en Ontario.

La représentation par un avocat de service n'est pas un service qui semble être offert pour les causes relevant du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés. Seule la Colombie-Britannique a en place un système permettant de fournir des services d'avocat de service pour ce type de causes, et seulement par la voie de renvois à Vancouver. À l'occasion, des avocats salariés de Terre-Neuve agissent à titre d'avocat de service parce que des agents de Citoyenneté et Immigration Canada les connaissent et peuvent donc communiquer avec eux au besoin. Certains services d'avocat de service sont offerts en Alberta et au Manitoba lorsque les questions relèvent à la fois du droit pénal et du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés, mais ce n'est pas une activité établie des programmes d'aide juridique.

Tableau 12  : COUVERTURE DES QUESTIONS RELEVANT DU DROIT DE L'IMMIGRATION ET DE LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

Comme l'indique ce tableau, les activités le plus souvent couvertes par l'aide juridique pour les causes relevant du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés sont les audiences de détermination du statut de réfugié, les contrôles des motifs de détention, les contrôles judiciaires et les appels devant la Cour fédérale et la Cour suprême. Parmi celles ci, c'est au chapitre de la détermination du statut de réfugié que les régimes d'aide juridique assurent la plus grande part des services. Les enquêtes ne représentent qu'une fraction du total de réfugiés et d'immigrants, et les causes devant la Cour fédérale et la Cour suprême sont très rares.

L'universalité de l'aide juridique pour les causes relatives à la détermination du statut de réfugié rejoint les commentaires concernant l'importance de mettre les services juridiques à la disposition des réfugiés. Les répondants de plusieurs provinces ont souligné que les réfugiés sont dans une position particulièrement vulnérable face au système juridique, étant donné qu'à leur arrivée ils ont souvent peu ou pas de ressources, qu'ils font peu confiance au gouvernement ou à la procédure judiciaire et subissent un important stress psychologique et physique. En outre, à cause du légalisme des audiences de détermination du statut de réfugié et d'autres procédures relatives au statut de réfugié, il est très difficile pour les nouveaux arrivants au Canada de recourir au système sans aide juridique. La disponibilité d'aide juridique pour les causes relatives au statut de réfugié constitue donc un élément essentiel de l'aide juridique pour les immigrants et les réfugiés.

Le fait que l'aide juridique est offerte dans les six provinces pour le contrôle des motifs de détention et les procédures devant la Cour fédérale et la Cour suprême, outre les audiences de détermination du statut de réfugié, donne à penser que l'aide juridique est plutôt accordée pour les causes présentant un aspect plus légaliste en matière de droit de l'immigration et de la protection des réfugiés. Les questions de droit nécessitant une comparution en cour ou devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié exigent de l'expérience et des connaissances juridiques plus spécialisées. On peut donc dire qu'il est plus important que les réfugiés et les immigrants puissent obtenir de l'aide dans ces domaines. Plusieurs organismes communautaires d'aide aux immigrants et aux réfugiés interviewés dans les provinces qui offrent et celles qui n'offrent pas des services d'aide juridique ont reconnu l'importance de connaissances juridiques spécialisées pour certaines procédures relevant du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés. Comme nous le verrons plus loin, les répondants de ces organismes ont souligné que leur personnel est plus susceptible d'aider les clients pour les questions procédurales comme le dépôt de demandes fondées sur des motifs d'ordre humanitaire ou de demandes de la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada. [12] En fait, les répondants de l'aide juridique au Québec ont souligné que cette province n'offre pas l'aide juridique pour les demandes fondées sur des motifs d'ordre humanitaire, les demandes relatives aux demandeurs non reconnus ou les avis de danger, car ces derniers sont considérés comme des procédures administratives et non judiciaires.

Après les audiences de détermination du statut de réfugié, les contrôles des motifs de détention et les procédures devant la Cour fédérale et la Cour suprême, les appels et les enquêtes en matière d'immigration sont les autres questions relevant du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés pour lesquelles l'aide juridique est accordée. En ce qui concerne les appels en matière d'immigration, toutes les provinces sauf Terre-Neuve accordent l'aide juridique, et pour les enquêtes en matière d'immigration, Terre-Neuve et l'Ontario font exception en ne couvrant pas ces points.

Aucune province n'offre de services pour les entrevues relatives à l'admissibilité au point d'entrée, et seule l'Ontario prend en charge les déterminations de la recevabilité au point d'entrée. De même, seule l'Ontario a dit accorder régulièrement l'aide juridique pour les déterminations de la recevabilité des demandes d'asile présentées à l'intérieur, et l'Alberta le fait s'il y a une opinion motivée favorable à l'appui de la demande. L'Alberta assure une couverture discrétionnaire pour les violations de la Loi à l'intérieur visées à l'article 27, comme le Manitoba, alors que le Québec est la seule province qui fournit une couverture habituelle de ce point. Point intéressant, les représentants d'Aide juridique Ontario ont mentionné que, techniquement, les déterminations de la recevabilité sont couvertes, il y a en réalité peu de cas, car la majorité des demandes d'asile sont jugées recevables. Si la vérification de la recevabilité devient plus stricte en vertu de la nouvelle loi sur l'immigration, l'aide juridique pourrait envisager de couvrir ce point. Les représentants de l'aide juridique de Terre-Neuve ont affirmé que le personnel est rarement informé de la présence des immigrants ou des réfugiés avant que ces derniers n'aient franchi le processus du point d'entrée ou que leur demande d'asile à l'intérieur n'ait été traitée, principale raison pour laquelle aucune aide n'est généralement fournie à ces étapes préliminaires.

L'éventail des services offerts dans les quatre autres domaines du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés, soit les motifs d'ordre humanitaire, la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada, les avis de danger et les appels devant les tribunaux internationaux, est plus varié d'une province à l'autre. Comme nous l'avons dit, les demandes fondées sur des motifs d'ordre humanitaire et celles relatives aux demandeurs non reconnus sont des domaines pour lesquels les organismes communautaires accordent une aide.

OPINIONS SUR LA COUVERTURE DES SERVICES PAR L'AIDE JURIDIQUE

Les tableaux suivants résument les problèmes et les réussites mentionnés par les répondants lors du sondage sur le régime d'aide juridique, sur ce qui fonctionne bien, ce qui ne fonctionne pas bien et les principales lacunes du système de prestation des services aux réfugiés et aux immigrants de leur province.

Problèmes
Problèmes thématiques Province
C.-B. Alb. Man. Ont. Qc T.-N.
Méthodes de prestation des services X X X X
Questions de financement X X X X
Éventail des services couverts X X
Obstacles auxquels se heurtent les réfugiés X
Absence d'aide linguistique X
Demande faible X
Méthodes de prestation des services

Plusieurs questions ont été soulevées quant aux problèmes concernant les méthodes de prestation de services. Les répondants de la Colombie-Britannique ont évoqué l'éternelle question de l'efficacité relative des avocats salariés par rapport aux avocats de pratique privée. Cette question est, à l'heure actuelle, particulièrement préoccupante par suite de l'élimination de postes d'avocats salariés dans cette province, ce qui a des répercussions sur la disponibilité des conseils et de la vulgarisation juridique. Dans le même ordre d'idées, les représentants du Québec ont mentionné le " monopole " virtuel des avocats de pratique privée dans le domaine du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés, en raison de l'absence de services d'avocat salarié de l'aide juridique.

Un répondant de l'Alberta a souligné que les avocats de pratique privée sont réticents devant la participation des techniciens juridiques aux causes dont ils ont la charge. Les représentants de l'aide juridique de l'Ontario ont mentionné parmi leurs préoccupations le rôle joué par les consultants en immigration et l'incapacité des organismes communautaires à intervenir davantage dans la prestation de services directs d'aide juridique étant donné leur manque de connaissances et de formation juridiques.

Questions de financement

Pour les répondants de la Colombie-Britannique, le manque de financement général de l'aide juridique pour les immigrants et les réfugiés (et de l'aide juridique en général) est une source de préoccupation - qui s'aggravera en raison des récentes compressions imposées par le gouvernement provincial. L'Ontario est également préoccupée par le manque de financement de l'aide juridique aux immigrants et aux réfugiés, compte tenu surtout de l'accroissement du nombre de dossiers observé dans cette province. Les répondants de la Colombie-Britannique et du Manitoba ont soulevé la question des contraintes imposées par les structures tarifaires, alors que ceux de Terre-Neuve ont signalé les ressources limitées en personnel dans le domaine du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés comme l'une des principales causes des retards dans le traitement des dossiers. Les représentants de l'aide juridique en Colombie-Britannique ont également mentionné le conflit de compétence opposant le gouvernement fédéral et les provinces quant au financement de l'aide juridique accordée aux immigrants et aux réfugiés (question soulevée par les répondants de la Nouvelle Écosse et de l'Île-du-Prince-Édouard).

Éventail des services couverts

Les représentants de l'aide juridique du Manitoba ont indiqué que la couverture des services d'aide juridique pour les causes en matière de droit de l'immigration et de la protection des réfugiés varie en raison des difficultés de recrutement des avocats de pratique privée. Les répondants de l'Ontario ont relevé des lacunes dans la couverture quant aux questions traitées et aux différences de services offerts par les CJC, ainsi que la répartition géographique des services offerts par les CJC.

Obstacles auxquels se heurtent les réfugiés

Les répondants de la Colombie-Britannique ont insisté sur le fait que la nature contradictoire et agressive du processus concernant les réfugiés dans cette province n'a aucune raison d'être.

Absence d'aide linguistique

Les répondants de l'Ontario ont souligné que les ressources en matière d'aide linguistique dans les CJC sont insuffisantes.

Demande faible

Selon les répondants de Terre-Neuve-et-Labrador, la demande de services en matière de droit de l'immigration et de la protection des réfugiés dans cette province est faible. Pour cette raison, la Legal Aid Commission ne peut offrir certaines formes de services même s'ils étaient avantageux et amélioreraient la qualité de l'aide offerte aux clients (p. ex. la capacité interne d'offrir des services de traduction et d'interprétation).

Réussites
Réussites thématiques Province
C.-B. Alb. Man. Ont. Qc T.-N.
Méthodes de prestation des services X X X X
Collaboration avec les organismes communautaires X X
Éventail des services couverts X X

Comme l'indique ce tableau, les représentants des régimes d'aide juridique avaient beaucoup moins de cas de réussite à présenter dans les provinces qui accordent l'aide juridique en matière de droit de l'immigration et de la protection des réfugiés.

Méthodes de prestation des services

Les répondants de la Colombie-Britannique ont souligné que l'Immigration and Refugee Clinic était un cas de réussite dans la province. Malgré la fermeture de l'IRC prévue pour août 2002, les techniciens juridiques spécialisés et les avocats salariés fournissent une aide précieuse dans les domaines non visés par le tarif et constituent une mine de renseignements sur les pays sources de réfugiés, ce qui permet un traitement plus efficace des causes. De même, les répondants de Terre-Neuve ont insisté sur le fait que les services d'avocat salarié coûtent moins cher, car les avocats salariés peuvent consacrer toutes les heures nécessaires à une cause sans se préoccuper des limites prévues par le tarif ou du revenu nécessaire pour payer les frais généraux.

Les représentants de l'aide juridique de l'Ontario ont souligné la réussite du Bureau du droit des réfugiés et des cliniques juridiques communautaires, qui sont des modèles efficaces de prestation des services d'aide juridique aux réfugiés et immigrants (notant également l'expansion actuelle du réseau de cliniques). Selon un répondant de l'Ontario, le recours à la vérification du bien fondé est un moyen efficace de s'assurer que les services sont fournis à ceux qui en ont le plus besoin.

Selon les répondants de l'Alberta, le poste de coordonnateur des services aux immigrants du projet pilote est jusqu'à maintenant une réussite. Les clients ont accès à une nouvelle gamme de services (notamment des conseils, même pour ceux qui se sont vu refuser l'aide juridique). Les avocats de pratique privée de l'aide juridique reçoivent de l'aide pour la préparation des dossiers, ce qui permet un traitement plus efficace des causes dans les limites prévues par le tarif.

Les répondants de la Colombie-Britannique et du Manitoba ont souligné que la collaboration entre l'aide juridique et les organismes communautaires d'aide aux immigrants et aux réfugiés était un aspect positif du système du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés dans leur province respective.

Éventail des services couverts

Selon les représentants de l'aide juridique de l'Alberta et du Québec, l'éventail des questions relevant du droit de l'immigration et de la protection des réfugiés qui sont couverts par l'aide juridique est très vaste.


[12] La préparation du formulaire de renseignements personnels est une exception possible à cette aide, activité que bon nombre d'organismes fournissent (en particulier au Québec).