La prostitution chez les jeunes : analyse documentaire et bibliographie annotée
Annexe A : Bibliographie annotée (suite)
BACKHOUSE, C. B. «Nineteenth-century canadian prostitution law: Reflection of a discriminatory society», Social History, vol. 48, novembre 1985, p. 387-423.
Cet article révèle que la conception de la prostitution au XIXe siècle se caractérisait par trois approches juridiques : réglementation, interdiction et réadaptation. L’approche réglementaire comprenait la présentation de la Contagious Diseases Act afin de lutter contre les maladies vénériennes chez les prostitués. Les décideurs ont essayé d’interdire le commerce du sexe en adoptant une loi stricte criminalisant les activités liées à la prostitution, dont les lois relatives aux hommes fréquentant les maisons de débauche. En outre, on a tenté de réadapter les femmes perdues en créant des asiles, des prisons pour femmes et des centres de détention pour les jeunes. Quelle que soit l’approche, les femmes qui se livraient à la prostitution (jeunes ou plus âgées) ont fait l’objet de lois ou de pratiques discriminatoires. Chaque réponse faisait de la discrimination contre les prostitués sur la base de la classe, de la race, de l’origine ethnique et du sexe.
BACKHOUSE, C. B. «Prostitution», chapitre 8 dans Petticoats and Prejudice: Women and
Law in Nineteenth Century Canada, Toronto, Women’s Press, 1991.
La prostitution au XIXe siècle était-elle l’expression d’une culture coercitive sur le plan sexuel ou s’agissait-il de l’action indépendante de femmes qui faisaient fi du mariage, de la famille patriarcale et des mœurs sexuelles restrictives ? L’auteure aborde ce débat en comparant l’histoire de deux femmes qui se prostituaient. Dans le premier cas, elle montre comment une femme, Mary Gorman, et sa fille ont commencé à se prostituer pour subsister et comment elles étaient constamment exposées à la vindicte publique, au harcèlement de la police et à la «mobilité sociale descendante»
. Dans le deuxième cas, elle décrit les expériences d’Esther Forsyth Arscott, propriétaire d’un bordel très en vue considéré comme point repère au sein de la classe ouvrière. L’auteue fait remarquer que le législateur n’a pas tenu compte de bon nombre des facteurs économiques et sociaux qui ont fait de la prostitution une option pour certaines femmes. Dans l’ensemble, l’auteure affirme que les législateurs masculins et les responsables de l’application de la loi, qui ont tenté de réglementer la sexualité au XIXe siècle, visaient surtout les femmes qui se livraient à la prostitution.
BAGLEY, C. «Child sexual abuse and juvenile prostitution: A commentary on the Badgley report on sexual offences against children and youth», Canadian Journal of Public Health, vol. 76, janvier/février 1985, p. 65-66.
Cet article critique le rapport du Comité Badgley sur les infractions sexuelles à l'égard des enfants et des jeunes parce que celui-ci laisse entendre que les jeunes prostitués ne subissent pas plus d’agressions sexuelles pendant leur enfance que les autres enfants et adolescents canadiens. L’auteur conteste les méthodes et les constatations du Comité Badgley : l’échantillon de référence du Comité était disproportionné; il a minimisé la gravité de la violence subie par les jeunes prostitués et il n’a pas expliqué que la plupart des prostitués ont été victimes de violence sexuelle à un âge beaucoup plus jeune (avant 12 ans) que les non-prostitués. D’après les données, Bagley conclut qu’avant de commencer à se livrer à la prostitution de rue, les jeunes prostitués ont subi deux fois plus de violence sexuelle que la population générale.
BAGLEY, C. « Prevention of child sexual abuse and its sequels: An Alberta case study and a commentary on the Badgley and Fraser reports», The Social Worker/Le travailleur social, vol. 45, no 1, printemps 1986, p. 16-19.
L’auteur passe en revue les conclusions du Comité spécial d'étude de la pornographie et de la prostitution (Rapport Fraser) et du Comité sur les infractions sexuelles à l'égard des enfants et des jeunes (Rapport Badgley). Le Rapport Badgley fait ressortir l’ampleur de la violence sexuelle à l’égard des enfants au Canada et le piètre état des services sociaux offerts pour faire face à ce phénomène. Le Comité Badgley recommande la création d’un Bureau du commissaire chargé d’élaborer des «normes de services»
pour régler les cas de violence sexuelle à l’endroit des enfants, et les provinces devraient mettre en œuvre des services appropriés de protection des enfants. Selon les données disponibles, a) la plupart des cas des enfants victimes de violence sexuelle en Alberta «ne sont pas portés à la connaissance d’un adulte»; b) la plupart des victimes de violence sexuelle ne sont pas orientées vers des spécialistes pour être traitées; c) la plupart des cas de protection de l’enfance en Alberta s’appliquent à des victimes de violence sexuelle. Selon des études réalisées à Calgary et Edmonton, 65 % des jeunes prostitués ont subi des actes de violence sexuelle avant de faire une fugue pour se réfugier dans la rue. L’auteur conclut que certaines régions (c.-à-d. Saskatoon, Halifax, Vancouver, Toronto et Winnipeg) ont entrepris des programmes pour faire face à la violence sexuelle envers les enfants; cependant, la plupart des gouvernements n’ont pas «appuyé et stimulé»
les initiatives préconisées par le Comité Badgley.
BAGLEY, C. «The long-term psychological effects of child sexual abuse: A review of
some British and Canadian studies of victims and their families», Annals of Sex Research, vol. 4, 1991, p. 23-48.
Dans cet article, l’auteur passe en revue les ouvrages du Canada et du Royaume-Uni concernant l’incidence sur la santé mentale à long terme de la violence sexuelle pendant l’enfance dans le milieu familial. Les données provenant de neuf études canadiennes révèlent une incidence élevée de la violence sexuelle subie pendant l’enfance dans les familles dysfonctionnelles. Les répercussions négatives de la violence sexuelle dans le milieu familial comprennent la piètre estime de soi, l’accroissement de la dépression, les idées et les tendances suicidaires et une piètre santé mentale. Une étude de la prostitution chez les jeunes au Canada et aux Philippines révèle des écarts culturels importants dans l’évaluation de la violence sexuelle subie pendant l’enfance.
BAGLEY, C. «Child sex rings: Marginal, deprived and exploited children» dans Children, Sex and Social Policy: Humanistic Solutions for Problems of Child Sexual Abuse, Brookfield, États-Unis, Avebury, 1997.
Deux chapitres portent sur la prostitution chez les jeunes : le chapitre 4 intitulé Child Sex Rings: Marginal, Deprived and Exploited Children, et le chapitre 6 intitulé Child and Adolescent Prostitution in North America and the Third World: Case Studies of Cruelty and Cultural Misunderstanding. Le chapitre 4 examine le problème des réseaux d'exploitation sexuelle des enfants. L’auteur soutient que ces réseaux constitue une «exploitation de la naïveté et de la confiance des jeunes»
. Les entrevues auprès d’ex-prostitués et d’un ancien organisateur/dirigeant d’un réseau d’exploitation sexuelle et les résultats d’études antérieures servent à décrire la dynamique de cet aspect du commerce du sexe. La plupart des enfants victimes de ces réseaux sont issus de familles désunies et défavorisées, où la violence sexuelle et physique était courante. Au chapitre 6, l’auteur présente des données sur la prostitution juvénile à partir de trois sources : les conclusions d’études officielles réalisées en Amérique du Nord, des observations personnelles à Calgary, Bombay, Manille et Hong Kong et des comptes rendus personnels d’ex-prostitués. L’auteur fait une distinction entre la prostitution chez les enfants et la prostitution chez les adolescents : «les prostituées adolescentes (13 ans et plus) sont recherchées à cause de leur nubilité et de leurs caractéristiques sexuelles secondaires nouvellement acquises; l’adolescente met généralement l’accent sur sa sexualité évidente»
. L’auteur décrit et examine les facteurs menant à la prostitution (p. ex., violence physique, psychologique et sexuelle en milieu familial, piètre estime de soi et dépression). En plus de critiquer le manque d’accusations portées contre les clients des jeunes prostitués, l’auteur soutient qu’il faut plus de fonds pour permettre des interventions efficaces, compétentes et durables qui offre un soutien psychologique et social. L’auteur conclut que le problème tourne autour du fait qu’il est plus important pour les gens de la classe politique et le public de réduire les impôts que d’intervenir pour protéger adéquatement les enfants et les adolescents contre la forme la plus vile de la cruauté sexuelle et physique.
BAGLEY, C., BURROWS, B. A. et YAWORSKI, C. «Street kids and adolescent
prostitution: A challenge for legal and social services» dans Canadian Child Welfare Law: Children, Families and the State, N. Bala, J. P. Hornick et R. Vogel, Toronto, Thompson Educational Publishing, 1991, p. 109-132.
Cet article passe en revue les ouvrages concernant les facteurs qui influent sur les personnes qui commencent à se prostituer (violence pendant l’enfance, milieu familial et fugue). Les auteurs examinent les stratégies de services juridiques et sociaux recommandées par le Comité Badgley et le Comité Fraser et ils critiquent la réponse du gouvernement fédéral aux rapports de ces comités. Ils soutiennent qu’il est futile de demander à des jeunes de retourner dans un milieu familial qu’ils jugent intolérable; les organismes de services doivent comprendre et aider les jeunes à faire face aux facteurs qui contribuent à leur décision de se prostituer. Les réponses à la prostitution juvénile doivent tenir compte du désir d’indépendance d’un jeune et elles doivent offrir des conditions d’existence ainsi que des programmes d’éducation et de consultation appropriés. L’élimination ou la réduction de l’incidence de la prostitution chez les jeunes dépendra de l’élaboration d’une politique publique et d’attitudes mettant l’accent sur l’aide à accorder aux jeunes prostitués.
BAGLEY, C. et YOUNG, L. «Juvenile prostitution and child sexual abuse: A controlled study», Canadian Journal of Community Mental Health, vol. 6, no 1, 1987, p. 5-26.
Bagley et Young tentent de répéter les recherches de Silbert et Pines (1982) sur l’association entre la violence sexuelle subie pendant l’enfance et le fait de se prostituer par la suite. Les auteurs font ressortir les pièges méthodologiques que recèle l’énoncé du Comité Badgley selon lequel les jeunes prostitués ne subissent pas plus d’agressions sexuelles pendant leur enfance que les autres enfants et adolescents canadiens. Les auteurs interrogent 45 ex-prostitués (qui ont tous plus de 18 ans), et ils utilisent un groupe de référence composé de non-prostitués sélectionnés à partir d’une étude sur la santé mentale d’adultes choisis au hasard. Un deuxième groupe de référence comprenait 40 femmes de l’étude sur la santé mentale qui ont indiqué qu’elles avaient été victimes de violence sexuelle pendant leur enfance. Selon les constatations, par rapport au groupe témoin, les ex-prostitués étaient plus susceptibles d’avoir connu un milieu familial où il y avait des problèmes d’alcoolisme ainsi que de la violence physique, psychologique et sexuelle. Les ex-prostitués étaient plus portés à tenter de se suicider et à avoir une piètre santé mentale et une faible estime de soi.
BALA, N., HARVEY, W. et McCORMACK, H. The Prosecution of Sexual Offences Against Children and Bill C-15: A Case Law Research Project, Ottawa, Ministère de la Justice du Canada, 1992.
En réponse au Comité sur les infractions sexuelles à l'égard des enfants et des jeunes (rapport Badgley de 1984), le gouvernement fédéral a présenté le projet de loi C-15, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la preuve au Canada pour faire face à la question de la violence sexuelle envers les enfants. Le rapport examine les décisions judiciaires concernant les cas tombant sous le coup des dispositions du projet de loi C-15. D’autres cas pertinents relatifs à la violence sexuelle à l’endroit des enfants font également l’objet de discussions. Il n’y a pas de réponse judiciaire en ce qui concerne les cas relevant du paragraphe 212(2) (vivre des produits de la prostitution d’un jeune de moins de 18 ans) ou du paragraphe 212(4) (qui criminalise l’obtention ou les tentatives d’obtention des services sexuels d’une personne de moins de 18 ans). Cependant, les auteurs font état du soutien judiciaire à l’égard des mesures pour protéger les jeunes prostitués.
BARRET, D. et BECKETT, W. «Child prostitution: Reaching out to children who sell sex to survive», British Journal of Nursing, vol. 5, 1996, p. 1120-1125.
La majorité des travailleurs de la santé acquièrent des connaissances sur la prostitution chez les jeunes par le biais des médias. Pour mettre en œuvre des stratégies d’intervention appropriées, les professionnels de la santé et des services sociaux locaux doivent être renseignés sur les facteurs qui influent sur la décision d’un jeune de se prostituer, y compris les questions relatives à la violence envers les enfants, à la pauvreté et aux relations familiales. Cet article examine les questions économiques et politiques liées à la prostitution juvénile et certaines initiatives lancées par les travailleurs de la santé et des services sociaux.
BARRETT, D. «Young people and prostitution: Perpetrators in our midst», International Review of Law, Computers & Technology, vol. 12, no 3, 1998, p. 475-486.
Cet article examine la prostitution juvénile en Grande-Bretagne et présente les conclusions d’une étude ethnographique sur la prostitution chez les jeunes dans une ville non identifiée. L’approche britannique se caractérise par un changement conceptuel : les jeunes prostitués sont désormais considérés comme des victimes, et non comme des délinquants (même si l’auteur fait remarquer que nombre de jeunes continuent d’avoir des démêlés avec la justice). L’auteur favorise le réseautage ainsi qu’une approche multidisciplinaire pour aider ces jeunes à résoudre les problèmes qui les ont amenés à se réfugier dans la rue. Les fugues contribuent dans une large mesure à amener les jeunes à se prostituer, et des facteurs comme des antécédents difficiles, la violence physique et sexuelle et la pauvreté incitent souvent à faire une fugue. Il devrait y avoir des services comme les haltes-accueil, les services de consultation téléphonique et les services mobiles pour offrir un soutien aux jeunes et les aider à faire face aux défis quotidiens. Les jeunes itinérants éprouvent de la difficulté à obtenir un logement et un emploi et à poursuivre leurs études et, par conséquent, ils peuvent facilement devenir la proie de souteneurs et commencer à vendre leurs services sexuels pour survivre. L’étude, qui portait sur 411 jeunes travaillant dans un secteur retiré du quartier des prostitués, a révélé les faits suivants : les jeunes demeuraient généralement dans le véhicule des clients pendant la rencontre sexuelle, ce qui laisse supposer qu’il n’y avait peut-être aucun souteneur et il y avait un contact interpersonnel étroit entre les jeunes filles (peut-être pour des raisons de sécurité personnelle ou pour tenir les souteneurs éloignés). L’auteur favorise de nouvelles idées et solutions pour résoudre le problème des jeunes qui se livrent à la prostitution.
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