Guide de traitement des victimes d’actes criminels: Application de la recherche à la pratique clinique (deuxième édition)
10.0 Victimes du terrorisme
Introduction
Le présent chapitre porte sur une victime du terrorisme qui vous consulte à votre bureau. Au cours de notre examen de l’incidence du terrorisme, nous commencerons par définir le terrorisme en mettant l’accent sur les effets que veulent créer les terroristes. Dans cette définition, nous établirons une distinction entre un attentat terroriste simple et une activité terroriste permanente.
Nous examinerons ensuite les niveaux de victimisation : de la victimisation directe à la victimisation secondaire et les effets sur les membres de la société. Nous conclurons le chapitre en examinant les effets émotifs et psychologiques que subit une victime du terrorisme et des questions cliniques importantes. Enfin, des questions relatives aux fournisseurs de services seront abordées brièvement, y compris une section sur les ressources du Web.
Définition du terrorisme
Même si les terroristes et d’autres criminels peuvent utiliser les mêmes moyens violents pour atteindre leurs objectifs, le terrorisme se distingue par les caractéristiques suivantes:
- recours à la force ou à la violence;
- il est le fait d’individus ou de groupes;
- il vise des civils innocents;
- il vise à inciter ou à obliger à prendre des décisions ou à adopter de nouvelles orientations sur le plan politique ou social;
- il suscite la peur et la terreur. (Marsella et Moghaddam [2004, p. 23]).[10]
Les terroristes adoptent donc un comportement criminel violent pour atteindre des objectifs politiques en exerçant une pression sur les décideurs et la société (Ganor [2004]). En s’en prenant aux dirigeants politiques et aux membres de la société, les terroristes propagent la peur dans la société pour attirer l’attention sur leur cause politique (Danieli, Brom et Sills [2004]).
La nature imprévisible de la violence constitue l’élément de base de la guerre psychologique qu’utilisent les terroristes pour causer des préjudices à la société (Chemtob [2005]; Ganor [2004]). Le rôle des médias est important pour les terroristes, car ils aident à la propagation de la peur et à l’atteinte des objectifs politiques; il s’agit aussi d’une énorme difficulté pour ceux qui se rétablissent d’un traumatisme (Adessky et Freedman [2005]; Pfefferbaum et coll. [2004]; Substance Abuse and Mental Health Services Administration (SAMSA) [2004]; Weimann [2004]). La difficulté à laquelle font face les personnes de la société est non seulement le fait qu’elles peuvent réagir à l’incident initial, mais aussi que les rappels répétés de l’attentat aux nouvelles peuvent aggraver un traumatisme. La couverture médiatique répétée de l’attentat terroriste contribue essentiellement à mettre au premier plan l’attentat et les objectifs politiques des terroristes.
Certains chercheurs font ressortir la distinction entre le terrorisme d’un sous-groupe (non affilié au gouvernement) et le terrorisme parrainé par l’État (Marsella et Moghaddam [2004]). Il convient de noter que le terrorisme parrainé par l’État est d’autant plus difficile à accepter pour les victimes qu’elles ne bénéficient pas de l’aide du gouvernement en matière de prévention et de traitement. Dans ces cas, le gouvernement lui-même planifie, finance et aide les activités terroristes, généralement contre un sous-groupe du pays (Danieli et coll. [2004]). Les intervenants qui offrent des services aux victimes du terrorisme parrainé par l’État peuvent observer encore plus d’éléments de méfiance dans la relation d’aide, surtout en ce qui concerne la confiance dans les représentants du gouvernement ou les figures d’autorité. Par exemple, les victimes peuvent croire qu’elles n’obtiendront pas d’aide; elles n’auront peut-être pas confiance dans la façon dont les renseignements seront utilisés et refuser de contacter la police.
À l’instar d’autres crimes, le terrorisme met à malla vision d’un monde sûr et prévisible (Davidowitz-Farkaset Hutchison-Hall 2005)[11]. Une façon pour la société de faire face au terrorisme consisteen partie à l’accepter comme étant la « nouvelle normalité ».Selon Danieli et coll. [2004], depuis le 11 septembre 2001, les Nord-Américainsont établi de nouvelles règles concernant la manière d’agiret d’établir des relations avec les autres et le gouvernement. End’autres termes, la vision de nous tous au sujet d’un monde sûra été modifiée.Le terrorisme ou la guerre en permanence peuvent avoir une incidence légèrement différente sur la société. Cela rappelle souvent aux gens qu’ils vivent dans un monde dangereux; les attentats deviennent une réalité quotidienne. Ces victimes ont souvent recours à plusieurs des stratégies d’adaptation que nous avons décrites dans les chapitres précédents comme la distanciation, le déni ou l’acceptation de la réalité des attentats imprévisibles (Campbell et coll. [2004]; Wessely [2005]). Des chercheurs font remarquer que la menace permanente du terrorisme accroît la suspicion, la méfiance et le désespoir dans la société en général et rompt les liens sociaux (Chemtob [2005]; Engdahl [2004]; Khaled [2004]; Somasundaram [2004]).
Certains, plus positifs, croient que ces menaces permanentes peuvent aussi entraîner un changement personnel et social positif, appelé « croissance post-traumatique » (Engdahl [2004]; Fredrickson et coll. [2003]). Selon Fredrickson et coll. [2003], les émotions positives comme la gratitude, l’intérêt ou l’amour ont aidé les gens à s’adapter après l’attentat du 11 septembre 2001 et à éviter la dépression. De nombreux auteurs affirment que les spécialistes, les intervenants paraprofessionnels et le grand public peuvent collaborer pour renforcer la société (Berger [2005]; Durodié et Wessely [2002]; Heldring et Kudler [2005]; Sederer et coll. [2005]; Sofka [2004]; Somasundaram [2004]).
Questions spéciales
Continuum de victimisation
Les terroristes se préoccupent peu de la victime individuelle; ils se concentrent plutôt sur la société. Comme un attentat touche un grand nombre de personnes, nous devons examiner un continuum de victimisation – c’est-à-dire que nous devons comprendre les victimes du terrorisme, non pas uniquement comme un grand groupe, mais comme une foule de personnes définies en fonction de leur exposition à l’attentat. La figure T1 contient une description du continuum de victimisation; chaque niveau de victimisation (directe, secondaire, communautaire) peut revêtir ses propres particularités (Jordan [2002]; Levanon et coll. [2005]; SAMHSA [2004]). Les intervenants devraient avoir une connaissance de ce continuum pour mieux comprendre non seulement la victime assise dans leur bureau, mais aussi les personnes de son entourage. Ils doivent savoir que ce continuum est fondé sur la proximité de l’endroit où a eu lieu l’attentat subi par la victime, et non sur les niveaux de traumatisme possible. Même si l’on peut supposer que les personnes les plus proches de l’attentat seront les plus traumatisées, cela n’est pas nécessairement le cas. Les antécédents personnels, des traumatismes antérieurs, la capacité d’adaptation et beaucoup d’autres facteurs peuvent influer sur la façon dont une personne réagit à un attentat (Nader et Danieli [2004]; Thielman [2004]). Toutefois, selon des études, les victimes directes du terrorisme sont plus susceptibles de signaler des problèmes liés au SSPT, à la dépression et à l’anxiété (Gabriel et coll. [2007]; Whalley et Brewin [2007]). De toute évidence, les intervenants doivent évaluer le niveau de traumatisme et les besoins de chaque victime en fonction de chaque cas.
Figure T1 – Le continuum de victimization
Victimes directes ou primaires
Les victimes qui se trouvent dans le secteur immédiat de l’attentat terroriste.
Ce groupe peut se diviser en deux : ceux qui ont été blessés, torturés ou tués et ceux qui ont été témoins de l’attentat ou qui ont été menacés (ont évité l’attentat de justesse), mais qui n’ont pas subi de blessures corporelles. Les chercheurs semblent s’accorder pour dire que le niveau de traumatisme psychologique est étroitement lié au niveau de préjudice direct (Ahern, Galea, Resnick et Vlahov [2004]; Baca, Baca-García, Pérez-Rodríguez et Cabanas [2004]; Jordan [2002]). Par conséquent, il est très probable que ce sont ces victimes directes qui se présenteront à votre bureau.
Spécialistes ou bénévoles qui sont des victimes directes
Personnes qui se trouvent sur les lieux d’un attentat terroriste dans l’exercice de leurs fonctions ou à titre de bénévoles, notamment les policiers, pompiers, intervenants des services d’urgence, travailleurs de l’aide et autres premiers intervenants qui ont beaucoup de fonctions à remplir dans leur rôle respectif (Brom [2005]). Les journalistes des médias sont également compris dans ce groupe. Bon nombre de ces personnes peuvent avoir reçu la formation et le soutien sur le plan organisationnel nécessaires pour faire face à des expériences difficiles ou des traumatismes, mais elles peuvent avoir besoin du soutien et de l’aide des services d’aide aux victimes.
Victimes indirectes ou secondaires
Ce groupe comprend les membres de la famille, les amis, les collègues, etc., des victimes directes.
Toutes les personnes qui ont des liens avec la victime peuvent être touchées par l’attentat, les préjudices causés à leur être cher et l’adaptation aux changements en eux et chez leurs êtres chers. Il s’agit des « aidants naturels » de la victime (si la victime est encore en vie). Ces personnes peuvent avoir besoin d’aide pour comprendre leurs propres réactions et émotions ou pour accompagner la victime directe. Les intervenants doivent demander au client de leur indiquer ce qui lui serait plus utile. Vous pouvez consulter le tableau 4 du présent guide et réfléchir au genre de soutien dont votre client peut avoir besoin.
Victimes tertiaires ou de la société
Personnes de la société qui sont touchées par l’attentat.
Elles peuvent comprendre les personnes dont la routine quotidienne est perturbée, qui ont des problèmes d’accès à l’école ou au travail, etc., ainsi que les personnes qui ont été touchées par les images et les reportages présentés à la télévision. En un sens, les médias créent d’autres témoins de l’événement, et ces images peuvent être très dérangeantes pour certains. Les intervenants devront établir les antécédents complets pour éviter de manquer des questions clés (traumatisme antérieur, problèmes de santé mentale, facteurs de stress, etc.) qui pourraient influer sur la réaction à l’attentat terroriste.
Victimes revictimisées
Personnes qui ont déjà été victimes d’attentats terroristes, mais qui sont maintenant traumatisées à nouveau par un nouvel attentat ou un reportage sur un attentat déjoué. En d’autres termes, ces victimes peuvent être profondément bouleversées par les reportages télévisés sur un attentat actuel ou un documentaire sur un attentat précédent (Ahern et coll. [2004]; Kinzie [2004]). De plus, les souvenirs de l’attentat précédent pourraient amener la victime d’un crime à éprouver des difficultés d’adaptation. Les intervenants doivent aider toutes les victimes à apprendre à gérer ces nouvelles expériences potentiellement traumatisantes.
Traumatisme
Le traumatisme observé généralement chez les victimes du terrorisme ressemble beaucoup au traumatisme lié au fait d’être victime de n’importe quel crime. Le tableau 1 de la section sur les réactions courantes des victimes d’un crime du guide principal porte sur les questions que vous voudrez examiner au sujet des victimes du terrorisme. Toutefois, il faut apporter des précisions concernant les problèmes spéciaux de ces victimes, dont : le stress aigu et le syndrome de stress post-traumatique, le deuil et le deuil compliqué ainsi que le sentiment de culpabilité du survivant. Les intervenants ne doivent pas considérer cette liste comme englobant toutes les expériences que peuvent vivre les victimes du terrorisme et ils doivent se rappeler que les antécédents personnels, les traumatismes antérieurs et les questions culturelles peuvent influer sur la réaction et la guérison (Nader et Danieli [2004]; Thielman [2004]).
Différences entre les victimes du terrorisme et les victimes d’autres actes criminels
Il semble qu’aucune étude ne compare les différences entre les réactions des victimes du terrorisme et celles des victimes d’autres actes criminels. D’un point de vue clinique, on peut déterminer que le crime est semblable—une agression, un meurtre ou un viol est le même, que l’auteur du crime soit motivé par des raisons politiques ou autres. Cependant, il est possible que la nature politique du crime puisse avoir un effet distinct. La réaction de la société et la motivation de l’auteur du crime peuvent causer une détresse additionnelle (Herek et coll. [1997]; Herek et coll. [1999]; McDevitt et coll. [2001]). Au cours d’une discussion portant sur le blâme imputé à la victime, Shichor [2007] a avancé que les victimes du terrorisme pourraient être considérées par la société comme « plus innocentes » et, par conséquent, plus susceptibles d’obtenir du soutien. Toutefois, il a aussi fait remarquer que les victimes du terrorisme peuvent également se sentir impuissantes parce qu’elles peuvent avoir l’impression qu’elles ont moins de contrôle sur leur victimisation.
Les réactions aux traumatismes ne sont pas prévisibles; chaque personne est différente (Silver et coll. [2004]). Beaucoup de victimes du terrorisme peuvent ressentir une détresse initiale (Lahad [2005]; Schlenger [2004]), mais n’éprouveront pas de problèmes psychologiques graves (Fredrickson et coll. [2003]; Friedman [2005]; Galili-Weisstub et Benarroch [2004]). Certaines personnes peuvent éprouver des problèmes et ne pas demander de l’aide parce qu’elles croient qu’elles peuvent mieux s’en tirer seules, qu’elles ne veulent pas paraître faibles ou « folles » ou qu’elles ne savent pas où trouver de l’aide, ou elles évitent le traitement pour cesser de penser à l’attentat (Vardi [2005]). Les intervenants devraient évaluer avec soin comment les victimes font face à la perte qu’elles ont subie et surveiller les difficultés qu’elles peuvent avoir à comprendre le fait d’avoir été victime d’un crime politique.
Syndrome de stress post-traumatique et stress aigu
Le problème qui a le plus fait l’objet de recherches chez les victimes du terrorisme est le stress, qu’il s’agisse de troubles cliniques à court terme ou complets (Amsel et coll. [2005]; Courtois [2004]; Friedman [2005]; Hall et coll. [2004]; Jehel et Brunet [2004]; Khaled [2004]; Neria et coll. [2006]; Office for Victims of Crime [2005]; Ohtani et coll. [2004]; Pat-Horenczyk [2004]; Pfefferbaum et coll. [2004]; Silver et coll. [2004]; SAMHSA [2004]; Somasundaram [2004]). Le syndrome de stress post-traumatique est examiné au chapitre 4 du guide original sur les réactions habituelles des victimes d’un crime. Le stress aigu est un trouble anxieux dont les symptômes sont semblables à ceux du SSPT, mais qui ne dure pas aussi longtemps; il est généralement considéré comme la réaction anxieuse initiale au traumatisme (voir la figure 2 dans la section sur les réactions courantes des victimes d’un crime du guide principal). Il convient de noter que ces symptômes peuvent disparaître et réapparaître; par exemple, une victime peut éviter le traumatisme à un moment donné et le revivre à d’autres moments (Danieli et coll. [2004]).
Des chercheurs qui ont suivi des survivants d’une attaque de missile dans un centre commercial en Israël ont constaté que 24 p. 100 affichaient des symptômes de stress aigu (Kutz et Dekel [2006]). Les personnes souffrant de stress aigu risquaient trois fois plus de souffrir du SSPT. Ces chercheurs ont en outre observé qu’environ 25 p. 100 des personnes exposées à un attentat terroriste seront atteintes du SSPT (Kutz et Dekel [2006]). Dans le cas des victimes du terrorisme permanent, d’autres chercheurs font état d’estimations de personnes souffrant du SSPT atteignant 40 p. 100 (Jehel et Brunet [2004]; Khaled [2004]). Les personnes qui ont subi directement un attentat et qui ont dû s’adapter à des changements dans leur vie quotidienne par la suite (par exemple, explosion d’une bombe en milieu de travail ou dans le quartier, vie quotidienne perturbée par les changements dans la société) risquent encore plus de souffrir des symptômes du SSPT (Neria et Litz [2004]). Neria et coll. [2006] ont constaté qu’après le 11 septembre 2001, le SSPT était plus courant chez les femmes, les célibataires, les immigrants, ceux qui avaient des antécédents familiaux en matière de maladie mentale et ceux qui avaient été directement touchés. Les victimes atteintes du SSPT craignent davantage d’autres attentats terroristes (Kutz et Dekel [2006]), ce qui nuit probablement à leur rétablissement. Dans le cas des victimes traumatisées à ce point, les intervenants devraient envisager sérieusement de les recommander à un spécialiste de la santé mentale qui pourra leur procurer un traitement continu.
Green [1993] cite huit situations à la suite desquelles les gens risquent plus de souffrir du SSPT :
- menace à la vie et danger;
- blessure corporelle grave;
- fait d’être blessé intentionnellement;
- exposition à des scènes affreuses ou dégoûtantes;
- perte violente ou soudaine d’un être cher;
- être témoin ou prendre connaissance d’un acte de violence envers un être cher;
- apprendre qu’on est exposé à une substance nocive;
- avoir causé la mort d’une autre personne ou des blessures graves à celle-ci.
Les intervenants qui rencontrent des victimes ayant vécu ces expériences peuvent vouloir être à l’affût d’autres symptômes du SSPT ou diriger la personne vers un spécialiste de la santé mentale ou le médecin de famille pour qu’il procède à une évaluation plus complète.
Deuil compliqué
Plusieurs chercheurs ont observé un deuil compliqué chez les victimes du terrorisme qui ont perdu un être cher (Freyd [2002]; Malkinson et coll. [2005]; Neria et coll. [2007]; Pivar et Prigerson [2004]; Raphael et coll. [2004]; SAMHSA [2004]; Sofka [2004]). La personne est essentiellement affectée par la perte et l’attentat terroriste lui-même (Malkinson et coll. [2005]). Il s’agit d’une situation très difficile à vivre.
Certains chercheurs soutiennent que la colère nuit souvent à un deuil sain (Lebel et Ronel [2005]). La colère envers les terroristes semble liée au fait de vouloir qu’ils acceptent leur responsabilité et qu’ils déclarent leur culpabilité plutôt qu’au désir de vengeance ou à d’autres aspects de la colère (Lebel et Ronel [2005]). Le fait de mettre ainsi l’accent sur la responsabilité peut ressembler à la situation des victimes de tout autre crime qui veulent que justice soit rendue et que les auteurs du crime admettent leur culpabilité. Il y a aussi certaines preuves du lien direct entre des attentats terroristes et les crimes haineux ultérieurs contre des membres des communautés semblables à celle des auteurs de l’attentat (Volpe et Strobl [2005]). Les intervenants devraient noter que les auteurs de ces crimes haineux ne sont pas nécessairement les personnes qui étaient les victimes directes ou indirectes des attentats terroristes. Il est très important que les intervenants considèrent la colère de la victime comme une réaction normale et qu’ils traitent celle-ci pour l’aider à faire face aux émotions et aux réactions complexes qu’elle peut vivre (Dalenberg [2004]).
On rappelle aux intervenants de porter une attention particulière aux questions culturelles en ce qui concerne le deuil (Nordanger [2007]). Les intervenants devraient faire des recherches sur la culture de la victime pour savoir en quoi consiste un deuil normal dans sa communauté d’origine. Nordanger a constaté que les victimes éthiopiennes qui font le deuil de personnes décédées en temps de guerre ont tendance à utiliser des techniques d’évitement comme penser à d’autres choses, se distraire ou se concentrer sur l’avenir pour faire face au deuil. En particulier, ils considèrent le fait de ressasser ou d’approfondir une perte comme une façon de s’attirer des problèmes sociaux, familiaux, spirituels ou de santé. Les intervenants pourraient aussi se demander s’il faut encourager les victimes en deuil à demander l’aide de guérisseurs et de conseillers spirituels de leur propre communauté (Nordanger [2007]).
Dépression
Plusieurs chercheurs ont relevé une hausse du nombre de dépressions chez les survivants des attentats terroristes (Engdahl [2004]; Gabriel et coll. [2007]; Khaled [2004]; Miller et Heldring [2004]; Neria et coll. [2006]; Neria et coll. [2007]; SAMHSA [2004]; Schlenger [2004]). La dépression est définie à la figure 3. Dans un échantillon de personnes fortement traumatisées qui ont survécu à des attentats terroristes, Khaled [2004] a constaté que 23 p. 100 des personnes étaient déprimées. Dans des échantillons d’enfants et de jeunes, toutefois, les chercheurs ont observé des taux plus faibles : 8 p. 100 chez les enfants (Pfefferbaum et coll. [2004]) et environ 15 p. 100 chez les jeunes (Pat-Horenczyk [2004]). Il est intéressant de noter qu’il semble y avoir une réaction à retardement dans le cas de la dépression, qui atteint un sommet environ 6 mois après l’attentat terroriste (Miller et Heldring [2004]). De plus, Neria et coll. [2006] ont noté que les victimes des attentats du 11 septembre 2001 risquaient plus d’avoir des idées suicidaires, surtout si elles étaient associées à d’autres problèmes comme la dépression.
Culpabilité du survivant
Certains auteurs (Danieli et coll. [2004]; Courtois [2004]; SAMHSA [2004]; Thielman [2004]) font état d’un sentiment de culpabilité chez les personnes qui survivent à un attentat terroriste. Cela semble faire partie de la réflexion sur la recherche de la signification dans le cadre de laquelle la personne se demande non seulement pourquoi elle est une victime, mais aussi pourquoi elle a survécu alors que d’autres ont été blessées ou sont décédées. En particulier, Thielman [2004] fait remarquer qu’il semble y avoir des différences culturelles qui expliquent pourquoi une personne se sent coupable d’avoir survécu, mais il recommande aussi de se demander si le sentiment de culpabilité du survivant est attribuable à la dépression. Les intervenants doivent aider les victimes du terrorisme à comprendre que le sentiment de culpabilité du survivant n’est pas une réaction rare. De plus, vous pouvez aider les victimes à saisir la signification de l’attentat et de son incidence sur leur vie et les amener à se servir de ces connaissances pour faire une projection dans l’avenir. De toute évidence, si cette réaction cause beaucoup de détresse, il peut aussi être utile de diriger le client vers un spécialiste de la santé mentale.
Réactions au fait d’être pris en otage
Beaucoup de groupes terroristes utilisent la prise d’otages pour exercer une pression. Les otages se sentent souvent résignés, désespérés, hébétés et en état de choc, ils craignent d’être tués ou torturés et ils ont des idées et des sentiments déformés (Hillman [1983]). Hillman [1983]) décrit aussi un état de « résignation acquise » dans lequel l’otage commence à faire tout ce qu’on lui demande, sans poser de question. Turner [1985] fait allusion à l’otage qui passe de la peur et de la confusion à l’isolement et à l’ennui et qui se demande « pourquoi moi » en passant sa vie en revue et en faisant des rituels et en planifiant l’avenir. Frankly [1963], psychiatre qui a survécu aux camps de concentration nazis, soutiendrait que c’est cette « projection dans l’avenir » et le fait de survivre pour quelque chose de plus grand que soi (comme la famille, le travail, la spiritualité) qui aident certaines personnes à survivre à la captivité.
Une autre question concernant les otages est le développement possible du syndrome de Stockholm. Il s’agit d’un sentiment de confiance, parfois même de sympathie, que développe une victime de prise d'otages envers son ravisseur (Wilson [2003]). Turner [1985] a énuméré plusieurs facteurs qui semblent accroître les possibilités de développement du syndrome de Stockholm : contact en face-à-face, langue commune, croyances ou sympathies antérieures et durée de la captivité. Le lien est moins probable si la victime est consciente du risque de développer le syndrome ou s’il y a une violence inutile. L‘intervenants peut devoir consulter des spécialistes de la santé mentale ou leur recommander le client s’il croit que la victime éprouve ces genres de problèmes.
Question spéciale : Les enfants victimes
Des chercheurs ont examiné la façon dont les enfants s’adaptent aux attentats terroristes (Campbell et coll. [2004]; Courtois [2004]; Galili-Weisstub et Benarroch [2004]; Joshi et O'Donnell [2003]; Kaplan et coll. [2005]; Nielsen et coll. [2006]; Pat-Horenczyk [2004]; Pfefferbaum et coll. [2004]). Les enfants peuvent être des victimes directes, des victimes indirectes ou même des membres de la société qui assistent à l’événement à la télévision. Selon Joshi et O'Donnell [2003], les enfants exposés à un traumatisme peuvent éprouver des problèmes de comportement et de comportement agressif, des problèmes affectifs, des problèmes de santé mentale et des problèmes scolaires et souffrir d’un trouble avec retrait social. D’autres ont fait état de problèmes de comportement chez les jeunes exposés à des attentats terroristes (Campbell et coll. [2004]). Courtois [2004] signale également que les enfants peuvent être plus enclins à la dissociation [12] que les adultes. Tout comme les adultes, les enfants qui sont des victimes directes sont plus susceptibles de manifester des symptômes plus graves (Pfefferbaum et coll. [2004]). Les intervenants doivent savoir que les enfants peuvent avoir de la difficulté à exprimer directement pourquoi ils ont des problèmes; il importe donc d’être à l’affût de ces comportements. Il faut tenir compte de certaines questions spéciales lorsqu’on traite ce groupe, questions que des spécialistes de la santé mentale ou des collègues ayant déjà traité des enfants peuvent être mieux en mesure d’examiner.
Tableau T1 – Réactions courantes des enfants selon leur âge (SAMHSA [2004], p. 24)
Niveau de développement
Même s’il y a un débat au sujet du groupe d’âge le plus susceptible d’éprouver des problèmes après un attentat terroriste (Pat-Horenczyk [2004]), il est important de tenir compte de l’âge de l’enfant et d’autres questions de développement lorsqu’on traite des enfants victimes. Selon Galili-Weisstub et Benarroch [2004], la réaction des fournisseurs de soins peut avoir une incidence directe sur les très jeunes enfants (moins de deux ans). Les enfants d’âge préscolaire sont également affectés par la réaction des fournisseurs de soins, mais ils peuvent poser des questions et parler de leur réaction. Dans le cas des enfants d’âge préscolaire, on pourrait aussi vouloir être à l’affût d’autres signes de détresse, comme le fait de se coller de manière excessive, les explosions d’émotions et l’irritabilité, les changements de comportement ou même la régression à un comportement antérieur (Kaplan et coll. [2005]). Les enfants d’âge scolaire peuvent avoir tendance à éprouver de la difficulté à dormir, des problèmes à l’école et d’autres problèmes comportementaux (Kaplan et coll. [2005]). Tout comme pour les autres groupes de jeunes, la réaction des parents et le modèle qu’ils projettent semblent influer aussi sur les enfants d’âge scolaire.
Enfin, les adolescents semblent réagir davantage aux traumatismes, peut-être en raison de leur conflit intérieur entre le fait de vouloir être indépendants et le soutien dont ils ont encore besoin par suite du traumatisme (Kaplan et coll. [2005]). Les adolescents manifestent plus de peur (Addington [2003]; Ronen et coll. [2003]) et ont plus de cauchemars après un attentat. Ce qui est plus préoccupant, c’est que cet effet est observé même deux ans après l’événement (Nielsen et coll. [2006]). Le tableau T1 a été établi au moyen de renseignements provenant d’un excellent ressource (Mental health response to mass violence and terrorism: A training manual, SAMHSA [2004]) et peut aider les intervenants qui veulent un résumé. Il convient de noter que les enfants peuvent avoir bon nombre des mêmes réactions que les adultes à la suite d’un traumatisme.
Réaction des fournisseurs de soins
Les parents et les autres fournisseurs de soins veulent souvent des conseils sur la façon de parler de l’attentat terroriste aux enfants (Miller et Heldring [2004]). Comme nous l’avons observé précédemment, la réaction des fournisseurs de soins peut avoir une incidence positive ou négative sur les enfants (Galili-Weisstub et Benarroch [2004]). Les fournisseurs de soins servent non seulement de modèle en ce qui concerne la manière de faire face émotivement à la victimisation, mais ils aident aussi l’enfant à mieux maîtriser sa réaction à l’égard de l’attentat.
Les intervenants peuvent enseigner aux parents les signes associés au traumatisme ou d’autres réactions aux attentats terroristes, comme ceux qui sont mentionnés plus haut. Les fournisseurs de soins doivent rassurer les enfants sur le fait qu’ils sont en sécurité et ils doivent pouvoir écouter les préoccupations de leurs enfants. Il est possible qu’il faille aussi recourir aux spécialistes ou aux intervenants paraprofessionnels qui sont habitués à travailler auprès des enfants pour aider l’enfant à se sentir en sécurité, à comprendre et à accepter l’attentat, à examiner les problèmes et à s’adapter efficacement afin qu’il puisse reprendre les activités normales qui conviennent à son âge et la vie quotidienne (SAMHSA [2004]). Les fournisseurs de soins eux-mêmes peuvent avoir besoin de soutien pour faire face à leurs réactions tout en créant une vie familiale propice à la guérison (SAMHSA [2004]).
Questions cliniques
Comme l’affirment Neria et Litz [2004], les victimes du terrorisme doivent revenir à une vie normale et se sentir à nouveau en sécurité, à l’aise et protégées afin de se rétablir. Les intervenants peuvent aider les victimes du terrorisme à atteindre cet objectif. Tout comme pour les autres victimes d’actes criminels, il ne s’agit pas de retourner à la situation antérieure au crime, mais d’intégrer l’expérience dans leur nouvelle réalité (Casarez-Levison [1992]). Les stades de rétablissement, les stratégies de prévention des traumatismes, la recherche de la signification, les antécédents en matière de traumatisme, la définition des points forts et les réseaux de soutien influent sur le processus de rétablissement de la victime.
Stades de rétablissement
Nous pouvons considérer les victimes du terrorisme, autant que les victimes d’autres actes criminels, comme passant du stade de la prévictimisation à ceux de la victimisation, de la transition et, finalement, de la réorganisation (Casarez-Levison [1992]). Les intervenants peuvent consulter les chapitres précédents pour orienter les victimes vers les services clés. Au début, la victime pourrait avoir besoin d’un soutien pratique (logement, aliments, soins médicaux, etc.), d’une intervention d’urgence, d’un soutien psychologique à court terme, de renseignements, etc. Tout au long de son rétablissement, il peut être davantage nécessaire de rechercher la signification ou de recourir aux counseling en matière de deuil. En d’autres termes, les intervenants doivent effectuer une évaluation soignée de la victime et faire correspondre les interventions aux besoins définis.
Stratégies de prévention des traumatismes
Des entreprises internationales et locales ont eu recours à la formation de leurs employés sur la façon de faire face aux traumatismes (par exemple, la prise d’otages) pour les protéger en cas d’attentat terroriste. Étant donné la gamme étendue de réactions possibles, il est difficile de préparer complètement des personnes au chaos (Hall et coll. [2004]). Cependant, le public s’attend à ce que l’État et les organismes communautaires aient un plan clair et efficace (Lahad [2005]; Laor et coll. [2005]). De même, plusieurs auteurs soutiennent que les médias peuvent aider le grand public à comprendre ce qui s’est produit et ce qu’il faut faire (Durodié et Wessely [2002]; Reyes et Elhai [2004]; Ross [2004]; Thielman [2004]). Comme cette stratégie de santé publique emploie les mêmes moyens pour assurer les services que les terroristes utilisent pour propager la peur, elle devrait permettre de rejoindre une grande partie du même public (Ross [2004]; Thielman [2004]).
Recherche de la signification: raconter l’histoire
Rappelez-vous le modèle décrit dans la première partie et le fait que les victimes d’actes criminels doivent comprendre ce qui est arrivé et en saisir la signification. Si les victimes du terrorisme réussissent à le faire, elles peuvent apprécier davantage la vie, réorganiser leurs priorités et se rendre compte qu’elles sont plus fortes qu’elles ne l’avaient cru (Danieli et coll. [2004]; Frankl [1963]). En racontant son histoire, la victime du terrorisme peut commencer à saisir la signification, d’une manière contrôlée, de l’événement (Kutz et Bleich [2005]) et réinterpréter la situation (Adessky et Freedman [2005]). Contrairement au retour incontrôlé sur ce qui s’est produit, le fait de le raconter à nouveau aide à regagner la maîtrise de sa vie (Amsel et coll. [2005]; Kutz et Bleich [2005]).
Recherche de la signification: permettre l’émotion
Il est important pour toutes les victimes d’actes criminels de pouvoir exprimer ouvertement leurs sentiments. La victime peut exprimer sa colère, sa tristesse, son désespoir ou n’importe quel genre d’émotion, et le rôle de l’intervenant consiste à lui en donner la chance, mais aussi à l’aider à saisir la signification des événements (Kutz et Bleich [2005]). Il faut retenir que les victimes de traumatisme peuvent recevoir des messages directs et indirects de personnes de leur entourage, qui leur disent qu’elles ne devraient pas exprimer leurs sentiments et leurs émotions (Danieli et coll. [2004]). Par conséquent, il s’avère encore plus important de leur offrir un cadre qui les incite à faire ce partage et de les soutenir.
Antécédents en matière de traumatisme et retraumatisation
Les intervenants doivent également connaître deux aspects du traumatisme subi par les victimes du terrorisme : le traumatisme antérieur et les traumatismes répétés (Adessky et Freedman [2005]). Premièrement, les attentats du 9 septembre ont eu l’effet le plus important sur les personnes qui avaient déjà subi un traumatisme (Danieli et coll. [2004]; Neria et coll. [2006]; SAMHSA [2004]). Par conséquent, devant une réaction plus vive, les intervenants voudraient peut-être connaître les antécédents du client en matière de traumatisme, car seulement certains des symptômes et des problèmes courants peuvent se rapporter à l’attentat terroriste. Deuxièmement, un traumatisme antérieur accroît la vulnérabilité de la personne à ce mal si d’autres événements se produisaient (Kinzie [2004]). Pendant cette période déroutante et délicate, la victime peut être très vulnérable. Il convient de noter en particulier que le fait de regarder les reportages télévisés sur l’attentat terroriste peut avoir un effet négatif sur la réaction au traumatisme des adultes et des enfants (Delahanty [2007]; Miller et Heldring [2004]).
Détermination des points forts
Beaucoup de chercheurs et de cliniciens se concentrent sur les points forts manifestés pendant et après les attentats terroristes (Danieli et coll. [2004]; Fredrickson et coll. [2003]; Raphael et coll. [2004]). Certains parlent de la « période héroïque » naturelle qui se déroule pendant l’attentat, lorsque des étrangers risquent leur vie pour des victimes, ainsi que de la période de lune de miel caractérisée par la gentillesse et la générosité (Reissman et coll. [2005]). D’autres font état de la résilience de ceux qui se prennent en charge à la suite de l’attentat et qui répondent aux besoins des victimes et de la collectivité (Fredrickson et coll. [2003]; Friedman [2005]; Danieli et coll. [2004]; Heldring et Kudler [2005]; Raphael et coll. [2004]; Ross [2004]; SAMHSA [2004]; Sederer et coll. [2005]). Peterson ([2002] cité dans Danieli, Brom et Sills [2004]) a utilisé Internet pour examiner les valeurs, les points forts et les vertus des Américains avant et après le 11 septembre et a constaté une intensification des manifestations d’amour, de gratitude, d’espoir, de gentillesse, de spiritualité et de travail en équipe. La spiritualité, par la participation à des activités religieuses ou à des démarches plus privées, est souvent mentionnée comme une stratégie d’adaptation importante pour faire face aux attentats terroristes (Berger [2005]; Nader et Danieli [2004]; Pat-Horenczyk [2004]; Sofka [2004]; Thielman [2004]; Yeh et coll. [2006]). Les intervenants devraient respecter les choix personnels des victimes et leur venir en aide en trouvant des façons appropriées dont elles pourraient mettre leurs forces à profit.
Réseaux de soutien
Comme nous l’avons mentionné plus tôt, la victimisation se produit dans un continuum. La victime d’une prise d’otage par des terroristes peut être la victime directe. Mais, sa famille, ses amis, la communauté en général et les spécialistes aidants en sont aussi victimes à des degrés différents. Cela devient très important lorsqu’on examine les réseaux de soutien de la victime, car c’est vers lui que cette dernière se tourne en premier pour chercher de l’aide. Des études révèlent que la demande d’aide est une stratégie d’adaptation efficace pour faire face à la détresse continue (Miller et Heldring [2004]). Il y a un consensus selon lequel la plupart des victimes d’attentats terroristes ne demandent pas l’aide de spécialistes quand elles ont réactions psychologiques à la suite de l’événement (Adams et coll. [2004]; Ben-Gershon et coll. [2005]; Neria [2005]; Raphael et coll. [2004]).
Les victimes préfèrent ne pas parler aux spécialistes, mais plutôt faire appel à leur réseau de soutien naturel (Leymann et Lindell [1992]). Selon des statistiques canadiennes, les victimes d’actes criminels ont demandé l’aide d’un organisme d’aide officiel (services aux victimes, centres d’assistance, lignes d’aide, services sociaux ou de santé) dans 9 p. 100 des incidents; les autres (90 p. 100) ont fait appel à leur réseau de soutien naturel (Gannon et Mihorean [2005]). Le stress causé par le fait d’aider la victime à s’adapter peut devenir accablant (Mikulincer et coll. [1993]; Nolen-Hoeksema et Davis [1999]). De plus, les aidants naturels eux-mêmes ressentent parfois les séquelles de l’attentat terroriste et ne sont pas en mesure d’aider ou d’être disponibles (SAMHSA [2004]). Les intervenants peuvent donc constater que pendant qu’ils traitent une victime identifiée, beaucoup d’autres victimes éprouvant aussi des problèmes se trouvent à l’arrière-plan. Cela peut obliger à s’occuper d’un grand nombre personnes, et à jouer divers rôles de soutien en tant qu’intervenant (par exemple, sur le plan émotionnel, de l’appréciation, de l’information et matériel; tableau 4, page 30 du guide original où tableau 4, page 57 du cette guide).
Questions relatives aux fournisseurs de soins
Pour les intervenants qui traitent les victimes d’actes criminels, l’autothérapie est exceptionnellement importante, comme l’indique le premier chapitre. Après un attentat terroriste, les habitudes d’autothérapie sont encore plus importantes en raison de l’atmosphère d’urgence initiale et des besoins ultérieurs en matière de services (Waizer et coll. [2004]). Beaucoup de spécialistes disent qu’ils ont de la difficulté à assimiler leurs réactions aux attentats terroristes (Colarossi et coll. [2005]; Shamai [2005]). Il y a donc d’autres questions relatives à l’autothérapie dont il faut tenir compte lorsqu’on traite les victimes du terrorisme. Il est important de discerner les premiers symptômes de détresse, de parler aux autres, de reconnaître ses compétences et ses limites, de constituer des ressources personnelles et d’accepter la difficulté du travail (Danieli [2005]). La présente section porte sur les principaux domaines que les intervenants doivent comprendre lorsqu’ils traitent les victimes du terrorisme.
Points de vue personnels
Bien qu’il s’agisse peut-être d’une question difficile à saisir pour certains, tous ceux qui traitent les victimes d’un acte terroriste doivent examiner leurs points de vue personnels sur les objectifs politiques des terroristes. À titre d’intervenant auprès des victimes, vous avez sans aucun doute de l’empathie pour elles et une réaction négative à l’endroit des criminels. Toutefois, dans le cas du terrorisme, vous pouvez trouver que même si vous ne souscrivez pas au recours à la violence, vous pouvez être sympathique à la cause des terroristes. D’autre part, vous pouvez désapprouver leurs actions et leurs objectifs. Dans un cas comme dans l’autre, ces sentiments personnels peuvent influer sur votre travail auprès des victimes. En outre, vous pouvez avoir un point de vue bien arrêté, positif ou négatif, sur la réaction des autres autorités ou gouvernements à un attentat terroriste. Étant donné la nature politique du terrorisme, il est plus compliqué d’y faire face. Votre rôle consiste à aider la victime à s’adapter à la victimisation. Le fait de ne pas tenir compte de votre réaction personnelle aux efforts des terroristes (et non leurs actions), toutefois, pourrait réduire votre efficacité. Par conséquent, vous voudrez peut-être avoir recours à la supervision, à la consultation, aux groupes de discussion ou aux ateliers ou tenir un journal pour aplanir ces réactions et établir des limites claires.
Traumatisation vicariante
Tout comme les autres crimes, les infractions associées au terrorisme peuvent avoir une incidence profonde sur vous en tant qu’intervenant. Vous devez évaluer votre propre réaction : Avez-vous des idées ou des images envahissantes ou passez-vous beaucoup de temps à penser aux épreuves de la victime? Vous voudrez peut-être examiner l’effet personnel de l’attentat terroriste sur votre propre vie (Danieli [2005]). Selon la nature de l’événement, vous pouvez faire face à une tragédie de grande ampleur ou à des incidents continus, qui peuvent créer un traumatisme vicariant (Fraidlin et Rabin [2006]). Vous pouvez discuter ces questions dans des équipes, ou au cours de consultations ou avec les supérieurs. Si vous croyez que votre réaction nuit à votre capacité de faire du bon travail, il est logique de recourir à la thérapie pour faire face à ces sentiments.
Acceptation
Selon Danieli [2005], pour guérir et nous développer, nos devons accepter que notre vie ne sera plus la même. Cette « nouvelle normalité » se répercute sur tous les aspects de notre vie : victimes, intervenants et société (Danieli et coll. [2004]). Dans nos fonctions d’intervenants auprès de personnes qui sont en détresse par suite d’un traumatisme (crime ou autre), nous voyons de nombreuses personnes dont la vision d’un monde sûr et juste est modifiée. La « nouvelle normalité » a aussi un effet sur vous et, à mesure que vous en venez à accepter la nouvelle réalité, vous pouvez aider vos clients à faire de même. Fait important, l’acceptation ne signifie pas que vous ne pouvez pas améliorer la « nouvelle normalité ». En fait, aider les victimes du terrorisme améliore la « nouvelle normalité » d’une personne, d’une famille ou d’un groupe à la fois.
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