Programmes d'intervention en matière de violence envers le partenaire intime

QUÉBEC

Contexte

Loi : Aucune

Tribunal pour l’instruction des causes de violence familiale : S.O.

Plan d’action provincial : Prévenir, détecter, contrer : plan d’action gouvernemental 2012-2017 en matière de violence conjugale

Le plan d’action provincial actuel s’inscrit dans la foulée de la Politique d’intervention en matière de violence conjugale : prévenir, dépister, contrer la violence conjugale (1995).

Le plan regroupe 135 engagements selon 4 axes d’intervention : (1) prévention de la violence et promotion de la non-violence (2) dépistage et identification précoces (3) intervention psychosociale (4) intervention policière, judiciaire et correctionnelle. Ces engagements sont guidés par les principes directeurs suivants :

  1. La société doit refuser toute forme de violence et la dénoncer.
  2. La société doit promouvoir le respect des personnes et de leurs différences.
  3. L’élimination de la violence conjugale repose d’abord sur des rapports d’égalité entre les sexes. La violence conjugale est criminelle.
  4. La violence conjugale est un moyen choisi pour dominer une autre personne et affirmer son pouvoir sur elle.
  5. La sécurité et la protection des femmes victimes et des enfants ont priorité en matière d’intervention.
  6. Toute intervention auprès des victimes doit être basée sur le respect de leur autonomie et reposer sur leur capacité à reprendre le contrôle de leur vie.
  7. Toute intervention doit tenir compte des effets de la violence conjugale sur les enfants et viser à les atténuer.
  8. Les agresseurs sont responsables de leurs comportements violents; l’intervention doit viser à leur faire reconnaître leur responsabilité face à leur violence et à l’assumer.

L’intervention auprès des agresseurs vise à les responsabiliser relativement à leurs actes. Certaines des mesures envisagées consistent à diriger les contrevenants vers des services spécialisés adaptés tout en assortissant les conditions de leur mise en liberté de l’obligation de recevoir ces services, et à consolider la concertation intersectorielle, locale et régionale.

Le Plan entend également définir une approche propre à la culture des Premières nations et de la population inuite, par exemple en adaptant les outils d’intervention en matière de VPI et en favorisant l’uniformité et la complémentarité des interventions dans tous les services et secteurs.

Un Comité de coordination interministériel sur la violence conjugale, familiale et sexuelle a été formé et chargé de coordonner et de surveiller la mise en œuvre du Plan.

Évaluation du risque

Les services de police du Québec sont tenus d’utiliser la Liste de vérification pour les enquêtes policières sur la violence conjugale relativement à tout incident lié à une situation de violence conjugale.

Les organismes communautaires qui assurent la prestation de certains services liés à la VPI ne font appel à aucun outil d’évaluation du risque reconnu. L’information n’est échangée qu’en cas de risque aigu, et ce, sans le consentement du contrevenant.

Le Carrefour sécurité en violence conjugale est un groupe de travail qui a pour mission de former les différents intervenants œuvrant en violence conjugale à l’utilisation d’outils d’évaluation du risque, de leur apporter du soutien et d’augmenter la concertation entre eux.

Dans l’ensemble de la province, on compte 33 organismes offrant des programmes pour les auteurs de VPI. En plus d’offrir un programme d’intervention de groupe, un bon nombre d’entre eux proposent aux hommes d’autres formes d’aide, comme des services de prévention de la violence pour adolescents, des services thérapeutiques et de soutien aux hommes ayant des problèmes de santé mentale (p. ex. dépression ou traumatisme) et des thérapies individuelles et de groupe portant sur des problématiques comme le deuil, une perte, une séparation ou un licenciement. Dans la ville de Québec, on trouve également un groupe offrant des services aux hommes qui ont été victimes de violence familiale.

Financement

Les programmes sont financés principalement par le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. Certains organismes augmentent leur financement provincial par d’autres moyens, par exemple, des sources privées et des frais aux clients. L’information n’est communiquée qu’en cas de risque en évolution ou de danger potentiel.

Les programmes offerts par les organismes en matière de VPI comportent les volets suivants :

Intervention téléphonique : on communique d’abord avec les hommes par téléphone pour établir un lien de confiance et pour évaluer le risque et le besoin d’aiguillage vers d’autres organismes. On communique également avec les victimes pour leur expliquer le programme, évaluer si elles sont en sécurité et leur offrir des ressources.

Accueil et préparation aux séances de groupe : avant que le contrevenant se joigne au groupe, un intervenant le rencontre à deux reprises au moins pour lui offrir soutien et appui, vérifier s’il est prêt à intégrer un groupe, évaluer ses besoins, sa motivation et le type de violence qu’il a exercée et l’orienter vers d’autres organismes, s’il y a lieu. On remet aux participants un cahier de sensibilisation dans lequel figure un outil leur permettant de mesurer les répercussions de la violence dans leur vie.

Thérapie préalable à la thérapie de groupe : les hommes ayant besoin de plus de préparation avant d’intégrer un groupe sont rencontrés en individuel pour tenter de régler certains problèmes, fixer des objectifs et les aider à faire tomber leur réticence. De deux à huit séances de cette nature ont lieu, après quoi les hommes se joignent au groupe.

Le Programme d’intervention de groupe peut être suivi à n’importe quelle étape du processus (avant le prononcé de la peine, en application d’une condition de probation, sur la recommandation d’un autre organisme ou de façon volontaire) par les contrevenants qui sont motivés à changer leur comportement et qui n’ont aucune dépendance ni maladie mentale grave. Les groupes sont « semi-ouverts », puisqu’ils peuvent accueillir de nouveaux membres s’il reste de la place. Le programme consiste en 15 à 25 séances (le plus souvent 20) de 2,5 heures chacune et comptant entre 4 et 8 participants. Les groupes sont généralement animés par un homme et une femme. L’objectif de l’intervention de groupe est d’aider les participants à repérer leurs schémas de violence, à choisir la non-violence et à adopter des stratégies de rechange pour régler les conflits. Durant la première rencontre, les participants doivent se présenter eux-mêmes au groupe. Lors des rencontres subséquentes, ils font part de leur expérience et des stratégies auxquelles ils ont recours pour prévenir la récidive au moyen de discussions, de simulations, d’activités et d’échange d’idées. À la vingtième rencontre, on demande aux participants de faire une auto-évaluation de leurs progrès. Il est possible de prolonger la participation des membres en négociant des objectifs additionnels et en fixant une échéance pour les atteindre. Le contenu des programmes n’est pas unifié à l’échelle de la province. D’un groupe à l’autre, le mode de traitement varie : certains intervenants appliquent une approche thérapeutique humaniste et axée sur le processus, alors que d’autres font appel à une approche cognitivo-comportementale, narrative ou motivationnelle, ou allient plusieurs de ces approches.

Thérapie individuelle : les hommes qui ne satisfont pas aux conditions requises pour intégrer le groupe se voient offrir des séances de counseling individuelles. Les participants qui ne progressent pas suffisamment en groupe peuvent également être transférés vers le counseling individuel pour continuer de travailler sur leurs objectifs.

Suivi postprogramme : les participants peuvent assister à des rencontres mensuelles de suivi. L’objectif du suivi est d’aider les hommes à retenir ce qu’ils ont appris. Des séances individuelles sont offertes 6, 12 et 18 mois après la fin du programme de groupe.

Compétences parentales et répercussions de la violence sur les enfants qui en sont témoins

La question des répercussions de la VPI sur les enfants qui y sont exposés fait normalement l’objet d’une ou deux séances de traitement, quoique cette pratique souffre certaines exceptions. Par ailleurs, dans la ville de Québec, un organisme, le GAPI, offre une démarche de groupe appelée « Papa » aux hommes qui ont fait usage de violence au sein de leur famille et qui ont suivi en entier un programme de traitement de la violence familiale. Les thèmes abordés en groupe comprennent l’identification des formes de violence envers les enfants, les conséquences de cette violence, le cycle de transmission intergénérationnelle de la violence, le soutien à la relation mère-enfant, la relation coparentale avec la mère, la séparation et la réunification de la famille et l’éducation axée sur les besoins de l’enfant. Il s’agit d’un programme de 10 semaines qui repose sur un modèle thérapeutique cognitivo-comportemental.

Responsabilités envers les victimes

La plupart des organismes du Québec proposent des services de soutien et d’orientation aux victimes de violence, le plus souvent par téléphone. Des séances d’information sont aussi normalement offertes conjointement avec les maisons d’hébergement et autres organismes de services destinés aux femmes. Certains organismes tiennent des séances d’information à l’intention des victimes de VPI pour passer en revue le contenu et les exigences du programme; ces séances sont souvent organisées en collaboration avec les maisons d’hébergement et services pour femmes. Au Québec, il est rare qu’un organisme offrant des services aux auteurs de VPI propose du soutien et d’autres genres de service aux victimes. Cette responsabilité revient plutôt aux maisons d’hébergement et aux organismes œuvrant auprès des femmes violentées. L’échange de renseignements entre organismes pour hommes et organismes pour femmes n’a lieu que dans les cas présentant un risque très élevé.

Évaluation

Des études ont été réalisées sur un certain nombre d’aspects des programmes québécois d’intervention en matière de VPI. Par exemple, Sonia Gauthier, professeure agrégée, a interrogé des policiers quant à l’utilisation de leur pouvoir de remettre l’accusé en liberté sous conditions dans une affaire de violence conjugale. Elle a également étudié les perceptions de divers intervenants quant à l’impact de l’abandon de poursuites criminelles, en anglais seulement. Geneviève Lessard s’est penchée sur les initiatives visant à favoriser une plus grande concertation entre les systèmes de justice et de protection de la jeunesse dans les cas où des enfants ont été exposés à des situations de violence familiale.