Le lien #29 ... octobre 2008

Le Service de révision bijuridique (fiscalité et droit comparé) du Groupe des services de révision législative du ministère de la Justice Canada tient à vous informer des plus récents développements en matière d’harmonisation et de bijuridisme.

Bijuridisme et interprétation d’accords internationaux

Système canadien de fiscalité internationale

Exprimé en termes simples, l’impact du bijuridisme canadien en regard de l’interprétation des lois fédérales est clair : lorsqu’une loi du Parlement renvoie à des concepts relevant du domaine de la propriété et des droits civils sans toutefois les définir, la portée de ces concepts sera régie par le droit de la province dans laquelle la loi fédérale doit s’appliquer. Le Canada est toutefois signataire de plusieurs accords internationaux. Les questions suivantes se posent alors : comment doit-on définir les termes non définis d’un accord international? Les principes généraux de l’interprétation bijuridique au Canada peuvent-ils s’appliquer?

L’article 31 de la Convention de Vienne sur le droit des traités ne prévoit pas le recours par défaut au droit interne d’un état contractant. Le paragraphe 1 de l’article 31 établit plutôt la règle générale suivante : « Un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but. » La Convention de Vienne reconnaît toutefois le droit qu’ont les signataires d’un traité d’attribuer une signification particulière aux termes du traité. Les conventions fiscales canadiennes (il y en a plus de 80) ont adopté une approche hybride quant aux termes non définis.

La plupart des conventions fiscales canadiennes contiennent une clause semblable au deuxième paragraphe de l’article 3 de la Convention modèle de 2005 de l’OCDE, lequel prévoit que, sauf si le contexte exige une interprétation différente, les termes non définis d’une convention ont le sens que leur attribue le droit interne, en privilégiant toutefois le sens que leur attribue le droit fiscal interne. Selon cette approche, pour déterminer le sens d’un terme non défini dans une convention fiscale il faut d’abord vérifier que le contexte n’exclut pas le recours au droit interne. Si rien ne s’y oppose, on peut ensuite procéder à la recherche du sens en droit interne. Ce renvoi au droit interne a potentiellement pour effet d’exporter au niveau international les principes canadiens en matière de bijuridisme, et de rajouter ainsi plusieurs sources de droit interne canadien.

En avril 2008, le Groupe consultatif sur le régime canadien de fiscalité internationale a publié un document de consultation invitant les parties intéressées à soumettre leurs commentaires sur une foule de sujets reliés au régime canadien de fiscalité internationale. L’un des problèmes identifiés par le Groupe a trait à l’inquiétude générale entourant la portée de l’expression « bénéficiaire effectif », un concept clé lorsqu’il s’agit de restreindre l’accès aux avantages découlant d’une convention. Cependant, si l’on doit effectivement se référer au droit interne afin d’interpréter cette expression (une question qui demeure entière) cela entraîne de graves problèmes d’un point de vue bijuridique puisque le concept de « propriété effective » est complètement étranger au droit civil. Cette difficulté se retrouve au cœur de la décision récente de la Cour canadienne de l’impôt dans l’affaire Prévost Car Inc., 2008 DTC 3080, laquelle est présentement en appel à la Cour fédérale d’appel (A-252-08). Nous suivrons l’évolution de cette affaire au cours des prochains numéros. Nous attendons également avec intérêt les recommandations du Groupe consultatif, qui doit déposer son rapport auprès du ministre des Finances en décembre.

Conférence nationale

Institut canadien d’administration de la justice

Vraiment… qui rédige les lois? Voilà le thème de la conférence tenue à Ottawa les 11 et 12 septembre et organisée par le Comité de rédaction législative de l’ICAJ, présidé par Me John Mark Keyes, premier conseiller législatif du Canada. La conférence a mis en lumière les différents aspects du processus de rédaction, dont le rôle joué par les bijuristes et les jurilinguistes. Chose intéressante, plusieurs des conférenciers et des participants ont fait allusion au défi de légiférer dans un environnement global. Afin d’en savoir plus sur les activités de l’ICAJ, rendez-vous à l'Institut canadien d'administration de la justice.

Législation portant sur le bijuridisme

Le projet de loi C-10 est mort au feuilleton lors de la dissolution du Parlement

Le 7 septembre, la deuxième session de la 39e législature a pris fin et des élections générales ont été déclenchées. Le projet de loi C-10 a dès lors cessé d’exister. Parmi les mesures proposées dans ce projet de loi l’on retrouvait celles ayant trait aux fiducies non résidentes et aux entités de placement étrangères, diverses modifications techniques ainsi que plusieurs propositions d’harmonisation découlant de considérations bijuridiques.

Le projet de loi C-10 (anciennement le projet de loi C-33), soit la Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, notamment en ce qui concerne les entités de placement étrangères et les fiducies non-résidentes ainsi que l'expression bijuridique de certaines dispositions de cette loi, et des lois connexes, avait été adopté par la Chambre des communes le 29 octobre 2007, avait fait l’objet d’une seconde lecture au Sénat le 14 décembre 2007 et se trouvait devant le Comité permanent des banques et du commerce au moment de la dissolution du Parlement.

Veuillez consulter https://canada.justice.gc.ca/fra/sjc-csj/harmonization/index.html pour d’autres documents et références sur le bijuridisme législatif au Canada.