Recueil des recherches sur les victimes d'actes criminels, no 6
Aperçu comparatif des droits des victimes, des mécanismes d’exécution et des mesures de réparation en Angleterre et au pays de Galles et dans le système judiciaire fédéral américain
Marie Manikis Note de bas de la page 42
L’élaboration de politiques concernant les victimes et la promulgation de lois sur les « droits » des victimes sont de plus en plus courantes dans les États qui appliquent la common law. Bien que la plupart des pays ne confèrent pas aux victimes de droits ayant force de loi devant les tribunaux, les politiciens, les universitaires et les médias utilisent fréquemment le terme « droits » pour désigner un vaste éventail d’attentes que les victimes devraient avoir à l’égard du système judiciaire. De manière générale, les droits des victimes se divisent en deux grandes catégories : les droits en matière de services et les droits en matière de procédureNote de bas de la page 1. Les droits en matière de services sont des mesures prises pour assurer aux victimes un meilleur traitement et une meilleure expérience dans le système de justice pénale. Les droits en matière de procédure sont plus controversés du point de vue de l’exigence d’un débat contradictoire, puisqu’ils confèrent aux victimes un rôle participatif plus central dans le processus décisionnelNote de bas de la page 2.
En Angleterre et au pays de Galles, les droits des victimes consistent surtout en droits en matière de services. Il existe certains droits en matière de procédure, mais ils s’appliquent généralement ailleurs que dans les poursuites pénales. Les documents établissant ce type de politique sont assez variés : des lois, des serments, des régimes et des codes. Bien que le Code of Practice for Victims of Crime (code de pratique sur les victimes d’actes criminels)Note de bas de la page 3 (le Code) ait été adopté en 2005 par application de la Domestic Violence, Crime and Victims Act 2004, beaucoup de politiques concernant les victimes en Angleterre et au pays de Galles ne sont pas inscrites dans des lois. Cette façon de faire diffère beaucoup de l’approche américaine, essentiellement législative. Aux États-Unis, les droits des victimes sont principalement inscrits dans des lois et des constitutions d’États et portent généralement surtout sur la participation de la victime aux poursuites pénales. Dans une certaine mesure, la nature et la force juridique de ces politiques est un facteur important qui influence la façon dont elles sont appliquées. Cependant, d’autres facteurs entrent également en ligne de compte, dont le type de mécanismes d’exécution à la disposition des victimes, leur accessibilité et la volonté des personnes d’y recourirNote de bas de la page 4.
Ce bref article présente un aperçu de la nature et de la portée des droits des victimes et discute des mécanismes d’exécution dont disposent actuellement les victimes en Angleterre et au pays de Galles, particulièrement aux termes du Code of Practice for Victims of Crime, et sur le territoire américain, en vertu de la Crime Victims’ Rights Act (CVRA)Note de bas de la page 5.
La nature des droits des victimes dans ces deux systèmes judiciaires
Les droits des victimes en Angleterre et au pays de Galles : la primauté des droits à des services personnalisés, à l’information et à une participation aux procédures par l’intermédiaire des procureurs
En Angleterre et au pays de Galles, les droits des victimes se résument surtout à des services. Le Code of Pratice for Victimes of Crime joue un rôle déterminant pour offrir aux victimes un niveau minimal de services de onze organismes de justice pénaleNote de bas de la page 6, dont l’accès à une liste exhaustive et détaillée de leurs droits à l’informationNote de bas de la page 7. De plus, le Code divise clairement les obligations de service qui incombent aux différents organismes de justice pénale afin de faciliter leur mise en œuvre et d’éviter la confusion entre les différents organismes. Par exemple, le Code (de même que les serments des procureurs et le Code for Crown Prosecutors [Code des procureurs de la Couronne]) atteste du rôle clé du procureur, non seulement pour informer les victimes au sujet des décisionsNote de bas de la page 8, mais aussi pour rencontrer certaines d’entre elles afin de leur fournir des explications sur certaines décisions prises en matière de poursuite dans les affaires criminelles les plus gravesNote de bas de la page 9. Les unités d’aide aux témoins ont également le devoir unique d’informer les victimes de la progression de l’affaire et d’identifier les victimes et les témoins qui auraient besoin de services accrus pour répondre à des besoins particuliers en vertu du CodeNote de bas de la page 10. Enfin, le régime des déclarations personnelles des victimes (DPV) qui s’applique à l’échelle nationale depuis 2001 octroie aux victimes le droit de soumettre une déclaration personnelle de la victime aux services de police, un document qui sera déposé au dossier de la victime pour informer les organismes de justice pénale des besoins particuliers de la victime en matière de servicesNote de bas de la page 11.
En Angleterre, les victimes jouissent également de droits en matière de procédure, qui sont généralement mis en œuvre par contact direct avec les organismes de justice pénale. Ces organismes jouent donc un rôle central pour faire valoir les intérêts et les opinions des victimes au cours du processus pénal. Cette façon de faire contraste avec l’accès direct aux tribunaux de justice pénale que prévoit la CVRA aux États-Unis.
En effet, depuis quelques années, les procureurs anglais sont de plus en plus contraints d’inclure les victimes dans le processus. Non seulement doivent-ils leur fournir de l’information, mais ils doivent tenir compte de leurs intérêts et de leurs opinions dans leurs décisions de poursuivre ou non, et cela dans l’intérêt du public en généralNote de bas de la page 12. Notons parmi ces droits le droit des victimes d’exprimer leurs points de vue sur les questions de savoir s’il y a lieu d’intenter une poursuite dans l’intérêt publicNote de bas de la page 13 et s’il est souhaitable d’accepter des plaidoyers de culpabilité,Note de bas de la page 14 ainsi que sur les demandes d’indemnisation ou d’ordonnance accessoireNote de bas de la page 15. Enfin, les victimes ont le droit de soumettre une déclaration personnelle de la victime (DPV), qui sera consignée à leur dossier, et les procureurs ont le devoir d’attirer l’attention du tribunal chargé de prononcer la sentence sur la déclaration personnelle de la victime afin d’aider le tribunal à établir une peine appropriéeNote de bas de la page 16.
Les droits des victimes dans le système fédéral américain : favoriser leur participation à la procédure de justice pénale
Le modèle américain, à l’opposé du modèle anglais, s’est beaucoup plus développé sur la base du principe de la participation de la victime à la procédure pénale, un phénomène d’autant plus important depuis la promulgation de la Crime Victims’ Rights Act (CVRA) par le gouvernement fédéral en 2004. L’une des principales caractéristiques de cette loi, une nouveauté dans les États qui appliquent la common law, c’est d’accorder aux victimes le pouvoir de prendre part à la procédure pénale afin d’affirmer leurs droits et d’embaucher des avocats pour les représenter dans ces instances. Parmi les droits que la CVRA confère aux victimes, on trouve les suivants :
- le droit de jouir d’une protection raisonnable contre l’accusé;
- le droit d’être avisées, dans un délai raisonnable, avec exactitude et en temps opportun, de toute audience de la cour ou de toute audience sur la libération conditionnelle;
- le droit de ne pas être exclues des audiences publiques en la matière;
- le droit d’être entendues de manière raisonnable dans toute audience publique du tribunal de première instance concernant la libération, les plaidoyers, le prononcé de la peine ou la libération conditionnelle;
- le droit raisonnable de s’entretenir avec le procureur du gouvernement saisi de l’affaire;
- le droit à une restitution complète et rapide, conformément à la loi;
- le droit à une action en justice sans délai excessif;
- le droit d’être traitées avec équité, dans le respect de leur dignité et de leur vie privéeNote de bas de la page 17.
Ces droits sont fortement inspirés de la modification aux droits des victimes qui a été rejetée après trois tentatives infructueuses et qui ressemblent donc beaucoup plus à une charte des droits constitutionnels qu’à une loi détailléeNote de bas de la page 18. Ainsi, contrairement au code anglais qui présente moult détails, les droits accordés en vertu de la CVRA sont assez vagues. Selon cette loi, les juges de même que les procureurs doivent contribuer à leur mise en œuvre, mais il n’y a, en général, aucune répartition claire des responsabilités.
Au fil du temps, cependant, les tribunaux fédéraux ont clarifié la portée de certains droitsNote de bas de la page 19. Par exemple, pour ce qui est du droit de recevoir des avis, il a été précisé dans le jugement TurnerNote de bas de la page 20 que les tribunaux avaient l’obligation expresse et indépendante de veiller à ce que les victimes soient avisées des audiences de la cour. Ainsi, le tribunal a instruit le procureur de fournir une liste des victimes à la cour afin qu’elles soient avisées adéquatement du calendrier des audiences. De plus, les tribunaux ont précisé la portée des droits des victimes de s’entretenir avec le procureur et ont laissé entendre que l’objectif de ce droit n’était pas de leur permettre de deviner les décisions du procureur ou d’exercer leur droit de veto, mais de permettre aux victimes [TRADUCTION] « d’obtenir de l’information du gouvernement, puis de formuler et d’exprimer leurs points de vue au gouvernement et au tribunal »Note de bas de la page 21. Plus précisément, dans une affaire de négociation de plaidoyer, le tribunal a établi que le droit de la victime de s’entretenir avec le procureur lui permettait de s’entretenir avec les procureurs avant qu’ils ne s’entendent sur la négociation de plaidoyerNote de bas de la page 22. Enfin, une cour d’appel chargée d’interpréter le droit de la victime de présenter une déclaration des répercussions sur la victime lors de la détermination de la peine a précisé que les victimes avaient le droit de s’adresser à la cour directement et verbalement pour s’assurer que la procédure est équitableNote de bas de la page 23. Le juge a d’ailleurs ajouté que [TRADUCTION] « la CVRA vise clairement à faire des victimes des participants à part entière »Note de bas de la page 24 au processus judiciaire criminel et que, par conséquent, elle leur donne le droit de s’adresser au tribunal pendant l’audience de détermination de la peine. De plus, il déclare qu’en vertu de la CVRA, [TRADUCTION] « les victimes jouissent désormais d’un droit indéfectible de s’exprimer, semblable à celui du défendeur, à toutes les audiences publiques, y compris celles sur la libération, les plaidoyers, la détermination de la peine ou la libération conditionnelle »Note de bas de la page 25.
Les mécanismes d’exécution et les mesures de réparation dont disposent les victimes dans les deux systèmes judiciaires en cas de non-respect de leurs droits
Dans les deux systèmes judiciaires, les victimes jouissent pour la première fois de mécanismes explicites d’application de la loi pour faire valoir leurs droits lorsque ceux ci ne sont pas respectés. Toutefois, bien qu’ils partagent des objectifs similairesNote de bas de la page 26, soit que les victimes aient accès à des mécanismes efficaces, objectifs et accessibles pour obtenir rapidement une réparation adéquate, les principaux mécanismes mis à la disposition des victimes dans les deux systèmes fonctionnent de manière très différente.
Angleterre et pays de Galles : des mécanismes informels dans la plupart des cas et un examen judiciaire en dernier recours
Depuis la création de chartes des victimes dans les années 90, les victimes en Angleterre peuvent porter plainte contre l’organisme qui contrevient à leurs droits. Aux termes du Code, qui a remplacé ces chartes en 2006, la première étape qui consiste à porter plainte à l’organisme contrevenant demeure mais, pour la première fois, les victimes peuvent se prévaloir d’un mécanisme leur permettant de présenter les cas de non-respect de leurs droits à une entité indépendante, c’est à dire l’ombudsman parlementaire (OP), par l’intermédiaire de leur député si elles demeurent insatisfaites de la réponse de l’organisme qu’elles accusent d’enfreindre leurs droits. Il s’agit là d’une démarche beaucoup plus informelle qu’une procédure judiciaire; elle nécessite beaucoup moins de démarches écrites et aucune représentation juridique. Le bureau de l’OP ne s’appuie pas sur le principe de la confrontation comme un tribunal ordinaire; il utilise davantage des techniques d’enquête qui favorisent la discussion et les explications entre les parties et le décideurNote de bas de la page 27.
L’OP n’est pas investi de pouvoirs lui permettant de donner force de loi à ses décisions, mais il peut tout de même recommander des solutions à l’organisme contrevenant pour remédier à la situation. Il y a différentes solutions possibles :
- des excuses, des explications et une reconnaissance de responsabilité;
- la révision ou la modification d’une décision concernant le service offert à un plaignant; la révision de documents publiés; la révision de procédures afin de prévenir que la même situation ne se répète; de la formation ou de la supervision du personnel; une combinaison de ces différentes options;
- une indemnisation financière pour les pertes financières directes ou indirectes subies, les occasions manquées, le dérangement, la détresse ou une combinaison de plusieurs de ces élémentsNote de bas de la page 28.
Bien que le nombre de plaintes qui se sont rendues jusqu’à l’étape de la résolution soit très faible, des renseignements obtenus au moyen d’une demande d’accès à l’information laissent croire que les organismes visés ont suivi les recommandations de l’OP. En effet, les victimes ont bénéficié d’une combinaison de solutions allant des simples excuses à une indemnité de réparation d’un maximum de 5 000 £ (environ 8 000 $ CAN)Note de bas de la page 29.
La révision judiciaire : l’exception?
Bien que les victimes n’aient pas de droit de comparaître dans les poursuites criminelles afin de faire respecter leurs droits, elles peuvent se prévaloir d’un mécanisme de révision judiciaire en Angleterre et au pays de Galles, particulièrement dans les cas d’atteinte à leurs droits aux termes du Code for Crown Prosecutors. C’est notamment le cas lorsqu’une victime veut contester la décision de ne pas intenter de poursuitesNote de bas de la page 30. Cette technique judiciaire demeure certes exceptionnelle, mais une décision récente de la Cour d’appel a récemment reconfirmé l’existence de ce mécanisme et a surtout souligné le fait que les victimes ont le droit de demander une révision de la décision de ne pas intenter de poursuites, un droit pratiquement identique au droit prévu dans l’ébauche de directives de l’UENote de bas de la page 31. Pour se prévaloir de ce droit, la victime doit porter plainte à l’agence contrevenante ou demander une révision judiciaire.
Dans les cas de non-respect des règles concernant les DPV ou d’autres bris de serment, il n’est pas clair si les victimes disposent de mécanismes pour contester le non-respect des règles et obtenir réparation, à part peut-être celui de la plainte interne. Étant donné que ces « droits » ne figurent pas expressément dans des textes législatifs ou quasi législatifs et qu’il n’y a donc pas de règles formelles et explicites pour en assurer l’application, il se pourrait très bien qu’il s’agisse simplement de recommandations et de lignes directrices sans mesures réparatrices.
La CVRA américaine et les mécanismes d’exécution qu’elle établit
Un nouveau mécanisme d’exécution a été créé par la CVRANote de bas de la page 32. Il permet aux victimes ou à leur représentant juridique de déposer une motion de redressement pour obtenir réparation devant une cour de district criminelle pour violation des droits. Si le tribunal rejette la motion de redressement, les victimes peuvent enclencher une procédure de mandamus devant une cour d’appel. Le recours à une cour d’appel permet de tenir les tribunaux d’instance inférieure responsables et de procurer réparation aux victimes en cas d’erreur judiciaire.
La CVRA vise à fournir aux victimes des outils rapides et robustes pour obtenir réparation dans certains cas de violation des droits. Ces outils font directement partie de la procédure criminelle et ont pour objectif de rétablir la situation dans laquelle se trouvaient les victimes avant la violation (dans la mesure du possible). Cela comprend la possibilité d’annuler ou de rouvrir une procédure lorsque le droit de la victime d’être entendue a été enfreintNote de bas de la page 33. Par exemple, dans l’affaire KennaNote de bas de la page 34, un tribunal de district a porté atteinte aux droits des victimes d’être entendues en vertu de la CVRA en ne permettant pas aux victimes de présenter leurs points de vue de vive voix au moment de la détermination de la peine. Les victimes ont donc enclenché une procédure de mandamus, et la cour d’appel a déterminé que la cour de district devait [TRADUCTION] « reconnaître que la seule façon d’appliquer le droit de Kenna de se faire entendre, que lui garantit la CVRA, est d’annuler la peine et de tenir une nouvelle audience de détermination de la peine »Note de bas de la page 35. La cour de district fédéral a donc annulé la peine et tenu une nouvelle audience de détermination de la peine conformément à l’opinion de la cour d’appel.
De plus, dans l’affaire US v MonzelNote de bas de la page 36, après la décision de la cour de district de ne pas accorder de restitution complète, la victime, par son avocat, a contesté le jugement au moyen d’une procédure de mandamus, et la cour d’appel a établi que la victime avait droit à un redressement compte tenu de son droit à une restitution complète et rapide. Elle a donc renvoyé l’affaire à la cour de district et lui a ordonné de refaire ses calculs pour établir un nouveau montant, qui serait proportionnel aux pertes attribuables à l'infraction commise par le défendeur.
Limites aux mesures de réparation prescrites par la CVRA
Les mesures de réparation qu’on trouve dans la CVRA sont limitées à bien des égards. Ces limites comprennent les suivantes :
- l’impossibilité d’invoquer une cause d’action pour obtenir un dédommagement en cas de violation des droits des victimesNote de bas de la page 37;
- la limite explicite selon laquelle le non-respect des droits ne justifie pas la tenue d’un nouveau procèsNote de bas de la page 38;
- des mesures de réparation qui permettent de rétablir la situation initiale des victimes d’exercer leurs droits ne sont pas disponibles pour tous les types de violation aux termes de la CVRA.
Par conséquent, de nombreux droits, particulièrement ceux qui imposent des obligations positives au gouvernement, ne s’accompagnent pas de mesures de réparation explicites et détaillées, applicables en cas de violation. Il incombe donc aux tribunaux de déterminer les mesures de réparation possibles. Dans de tels cas, les tribunaux ont généralement fait preuve d’une certaine réserve à l’égard des mesures de réparation autorisées.
Par exemple, en cas de non-respect des dispositions d’information prescrites à la CVRA, les mesures de réparation établies ne s’appliquent généralement qu’aux violations futures. Dans l’affaire US v RubinNote de bas de la page 39, dans laquelle une victime n’avait pas été informée de ses droits, les juges ont soutenu qu’étant donné qu’aucun droit substantiel de la CVRA n’avait été enfreint, ils considéraient ce faux pas du gouvernement comme un incident à corriger prospectivement plutôt que rétrospectivement. Dans l’affaire TurnerNote de bas de la page 40, où le droit à l’information sur la procédure n’a pas été respecté, la cour a instruit le gouvernement de fournir à toutes les présumées victimes un résumé écrit de la procédure suivie à ce jour, de même que de l’information sur leurs droits en vertu de la CVRA en ce qui concerne les audiences futures, notamment leur droit d’être avisées des prochaines dates d’audience et leur droit d’être entendues. Enfin, dans le jugement In re DeanNote de bas de la page 41, bien que la cour d’appel ait reconnu que les victimes n’avaient été ni informées ni consultées par l’avocat du gouvernement avant la conclusion d’une entente sur le plaidoyer, le juge a laissé entendre que cela n’aurait en rien changé le résultat du plaidoyer et a souligné que les critères requis pour autoriser une procédure de mandamus n’étaient pas satisfaits. Par conséquent, il n’a pas jugé approprié de permettre le redressement par rejet du plaidoyer.
Bref, en vertu de la CVRA, les tribunaux ont été généralement plus enclins à prévoir des mesures de réparation à l’égard de droits de participation aux audiences criminelles lorsqu’un tribunal porte atteinte à ces droits, mais ils ont été beaucoup moins enclins lorsque ce sont les procureurs (le gouvernement) qui portent atteinte à ces droits ou que la violation n’a pas d’incidence sur l’issue du procès.
Conclusion
Cette brève analyse comparative des droits, des mécanismes d’exécution et des mesures de réparation montre que les droits des victimes et les mécanismes qui existent pour les faire respecter ont évolué de manière très différente dans les deux systèmes judiciaires à l’étude. Alors que les droits et les mécanismes d’exécution se sont développés surtout à l’extérieur de la procédure criminelle en Angleterre et au pays de Galles, dans le système judiciaire fédéral américain, les victimes sont considérées comme des participants directs au processus et les mesures de réparation sont généralement prises dans ce contexte. La mise en œuvre de ces droits sur le terrain mériterait d’être analysée plus en profondeur pour bien comprendre les mécanismes qui s’appliquent, et c’est l’objet des études doctorales qu’entreprend actuellement l’auteur.
Pour terminer, les pays de common law comme le Canada peuvent en apprendre beaucoup de ces différences importantes et s’inspirer des modèles décrits ici. Cependant, il ne faut pas oublier que chaque mécanisme est conçu et mis en application dans un contexte culturel particulier; sa reproduction exacte dans un autre système judiciaire ne produira donc pas nécessairement les mêmes résultats.
Bibliographie
- ASHWORTH, Andrew, et Mike REDMAYNE. 2010. The Criminal Process, 4e éd., Oxford, Oxford University Press.
- BELOOF, Douglas, Paul CASSELL et Steven TWIST. 2010. Victims in Criminal Procedure, 4e éd., Carolina Academic Press.
- KIRKHAM, Richard. 2008. « Explaining the Lack of Enforcement Power Possessed by the Ombudsman », Journal of Social Welfare and Family Law, vol. 30, no 3, p. 253-263.
- MANIKIS, Marie. 2012a. « Navigating Through an Obstacle Course: The Complaints Mechanism for Victims of Crime in England and Wales », Criminology and Criminal Justice, vol. 12, no 2, p. 149-173.
- MANIKIS, Marie. 2012b. « Recognizing Victims’ Role and Rights During Plea Bargaining: A Fair Deal for Victims of Crime », Criminal Law Quarterly, vol. 58, no 3-4, p. 411-441.
- MOSTELLER, Robert P. 1999. « The Unnecessary Victims’ Rights Amendment », Utah Law Review, p. 443-477.
- ROBERTS, Julian V., et Marie MANIKIS. 2011. Victim Personal Statements: A Review of Empirical Research, Londres, Victims and Witnesses Commissioner, England and Wales.
- ROBERTS, Julian V., et Marie MANIKIS. 2012. « Victim Personal Statements: Latest (and Last) Trends from the Witnesses and Victims Experience Survey in England and Wales », Criminology and Criminal Justice, sous presse.
- SANDERS, Andrew. 2002. « Victim Participation in an Exclusionary Criminal Justice System », New Visions of Crime Victims, éd. C. Hoyle et R. Young, Oxford, Hart Publishing.
- TWIST, Steven J. 1999. « The Crime Victims’ Rights Amendment and Two Good and Perfect Things », Utah Law Review, p. 369.
- Date de modification :