Toutes les voix comptent : les répercussions des problèmes juridiques graves chez les jeunes de 16 à 30 ans de la communauté noire
Observations
Une fois les discussions de groupe terminées, l’équipe de recherche a procédé à l’analyse des données recueillies et a constaté qu’un certain nombre de tendances générales se dégageaient en ce qui concerne la fréquence et l’incidence de certaines expériences. Ces tendances jettent un éclairage supplémentaire sur les résultats.
Âge
L’âge des participants semble avoir eu une incidence sur certaines de leurs réponses. Certains des participants les plus jeunes pouvaient n'avoir jamais occupé un emploi ou signé un bail ou un contrat de travail. Certains se sont d'abord abstenus de partager leurs expériences, mais ont ensuite formulé des commentaires en réaction à l’histoire d’un autre participant Il est possible qu’ils aient pris conscience de la dimension juridique de leur problème au cours de la discussion. Cela a pu également influer sur leur façon de catégoriser un problème juridique grave ou d'en évaluer la fréquence.
L’âge relativement jeune de certains participants a aussi pu influer sur les types de répercussions identifiés par ces derniers. À titre d'exemple, plusieurs participants ont dit avoir quitté un emploi en raison des traitements discriminatoires qu’ils subissaient, avoir été victimes de discrimination dans le cadre d’un processus d’embauche ou avoir été en situation d’insécurité résidentielle pendant de longues périodes, mais peu d’entre eux ont attribué des répercussions financières à ce genre de problèmes juridiques. On ne sait pas s’il en est ainsi parce qu’ils concevaient le problème juridique séparément des répercussions financières d’une période de chômage imprévue ou parce qu’ils n'avaient pas encore ressenti ces répercussions financières.
L’influence de l’âge est également évidente au niveau des stratégies que les participants ont ou non mises en œuvre pour résoudre leurs problèmes juridiques graves. Les participants plus âgés étaient plus susceptibles de prendre des mesures précises ou directes en réponse à des expériences de discrimination, comme aborder la situation sans détour avec leurs enseignants ou leur employeur, ou quitter leur emploi. Les jeunes participants étaient plus susceptibles de tolérer les mauvais traitements, d’accepter le harcèlement, l’étiquetage ou l’intimidation à l’école, ou d’avoir recours à des stratégies d’évitement, comme éviter de fréquenter certains magasins.
Les participants plus âgés comprenaient les mécanismes de plainte et de résolution, et étaient prêts à prendre les mesures nécessaires pour régler des problèmes de nature individuelle comme une contravention. Cependant, la majorité des participants étaient réticents à déposer une plainte officielle contre la police.
Sexe
Les données révèlent également des résultats différentiels selon le sexe. Tous les parents ayant participé à l’étude ont indiqué être des femmes et ont décrit des problèmes liés à la sécurité ou aux risques pour la sécurité de leurs enfants Toutefois, les hommes comme les femmes ont eu à gérer des questions familiales à la place de leurs parents ou ont dû aider leurs frères et sœurs à composer avec l’éclatement de la famille.
Les femmes ont indiqué avoir été victimes de harcèlement sexuel et de discrimination de la part de clients alors qu’elle travaillait dans des commerces de détail, ce qui concorde avec les expériences des femmes à cet égard, peu importe leur identité raciale.10
Le profilage racial et les contrôles policiers abusifs, un problème souvent associé aux hommes noirs, se sont révélés concerner autant les hommes et que les femmes sans différence sexospécifique dans la fréquence, le niveau d’agression, le risque personnel, l’impact sur la sécurité physique ou les mesures prises par les participants pour éviter les interactions avec la police.
Répercussions durables et envahissantes
Le fait pour les participants d’avoir vécu des problèmes juridiques graves dans leur enfance, notamment en étant exposés aux problèmes juridiques de leurs parents, a eu des répercussions considérables dans leur vie. La façon dont ils percevaient leurs problèmes juridiques et les mesures qu’ils ont prises en réponse à ces derniers ont a été influencées par leur exposition aux problèmes juridiques qu’ont connu leurs parents et par l’instabilité qui a marqué leur enfance pour des raisons liées à la discrimination, à l’immigration, à l’insécurité résidentielle et à l’éclatement de la famille. Les participants avaient déjà des appréhensions vis-à-vis des employeurs, des propriétaires de logements, des services gouvernementaux, des personnes en position d'autorité et des services d’aide lorsqu’ils ont eu à faire face à leurs propres problèmes juridiques.
Bien que les participants aient généralement obtenu des résultats acceptables dans les dossiers relatifs au droit de la famille, aucun des participants ayant eu des problèmes juridiques relevant du droit criminel n’a eu l’impression que son dossier avait été géré adéquatement par la police ou le système de justice, malgré qu’ils aient participé activement au processus de résolution.
Les expériences que les participants aux groupes de discussion ont partagées variaient en gravité et en complexité selon le domaine du droit dont elles relevaient. En dépit de ces variations, tous les participants envisageaient leurs problèmes juridiques sous l’angle combiné de la race et de la situation sociale. Ils ont décrit leurs expériences des systèmes et des institutions, ainsi que les avenues qui s’offraient à eux en matière de résolution, comme étant intiment liées aux problèmes de racisme auxquels ils étaient exposés dans leur vie. L’identité raciale n’était pas seulement un facteur dans les cas flagrants de discrimination ou de traitement raciste, elle intervenait également dans leurs expériences en matière de problèmes juridiques civils et pénaux. Ils percevaient la race, le privilège social et les possibilités économiques comme étant intimement liés à la façon dont ils abordaient les questions juridiques et aux raisons pour lesquelles ils ont vécu des problèmes juridiques.
Notes de bas de page
10 Adam Cotter et Laura Savage. « La violence fondée sur le sexe et les comportements sexuels non désirés au Canada, 2018 : Premiers résultats découlant de l'enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés », Statistique Canada, 2019. Accessible à l'adresse : https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/85-002-x/2019001/article/00017-fra.htm
- Date de modification :