Problèmes graves rencontrés par diverses personnes en situation de handicap – Ouest du Canada
Sommaire
Ce rapport présente les résultats d’une étude menée auprès de personnes en situation de handicap vivant dans les provinces de l’Ouest du Canada, c’est-à-dire en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan et au Manitoba. L’objectif principal de cette étude qualitative est d’obtenir des renseignements de diverses personnes en situation de handicap sur les types de problèmes graves qu’elles ont rencontrés au cours des trois dernières années, les moyens qu’elles ont pris pour résoudre ces problèmes, ainsi que les résultats et les effets sur leur vie.
Au total, 30 personnes en situation de handicap vivant dans l’Ouest canadien ont participé à cette étude au moyen de 25 entretiens et d’un groupe de discussion pour les personnes en situation de handicap intellectuel et cognitif. Le processus de sensibilisation a permis une intersectionnalité diversifiée entre les participants à l’étude vivant avec un vaste éventail de déficiences physiques et intellectuelles. Il s’agit de femmes, d’hommes, d’âges variés, de personnes racisées, immigrées, autochtones, 2SLGBTQ+, et de personnes à revenus faibles ou moyens. Par rapport à la population générale, on constate une surreprésentation intentionnelle des populations marginalisées, c’est-à-dire les femmes, les autochtones, les personnes racisées, les immigrants et les personnes 2SLGBTQ+. Les personnes vivant avec un handicap intellectuel, cognitif et/ou de santé mentale étaient également surreprésentées dans cette étude étant donné leurs expériences de marginalisation aiguë.
Les résultats montrent que les personnes en situation de handicap rencontrent de graves problèmes lorsqu’elles tentent d’accéder aux éléments de base que nous recherchons tous pour vivre en sécurité et mener une vie riche de sens, c’est-à-dire gagner un revenu décent, vivre dans un endroit sûr, élever ses propres enfants et être à l’abri de la violence. Les problèmes rencontrés ont été classés comme suit :
- les services liés à l’emploi;
- les problèmes d’accès aux services de santé, aux services sociaux et aux services éducatifs;
- le manque d’accès aux mesures de soutien en matière d’incapacité et de revenu;
- les questions liées à la garde des enfants;
- les problèmes avec leurs compagnies d’assurance;
- les problèmes avec leurs propriétaires;
- les expériences de violence;
- les problèmes avec les autorités légales qui gèrent les fonds fiduciaires.
Quel que soit le problème, les participants ont décrit avoir subi un traitement discriminatoire, grossier et méprisant, et la majorité d’entre eux n’a pas contesté ces mauvais traitements. Les personnes se sont senties obligées de se conformer à des systèmes discriminatoires par crainte, par exemple, de ne pas recevoir le soutien du revenu pour invalidité dont elles ont besoin ou de perdre leur emploi. La majorité des participants à l’étude ont décrit le sentiment que leurs adversaires ne comprenaient pas leur handicap, qu’ils ne les considéraient pas comme crédibles et avoir l’impression d’être exploités et/ou que l’on profite de leur handicap. Un nombre important d’entre eux ont indiqué qu’on leur avait refusé les mesures d’adaptation pour personnes en situation de handicap qu’ils avaient demandées et beaucoup de personnes étaient réticentes à révéler leur handicap par crainte, par exemple, de voir leur demande d’assurance rejetée.
Les participants à l’étude ont tenté de résoudre leurs problèmes de la manière suivante :
- en traitant directement avec l’organisation où le problème s’est produit;
- en communiquant avec la police;
- en communiquant avec leur syndicat;
- en sollicitant le soutien d’un tiers;
- en déposant une plainte en matière de droits de la personne;
- en intentant une action en justice.
Lorsque les participants ont tenté de résoudre leurs problèmes, ils ont subi le même traitement négatif que pendant leurs problèmes, c’est-à-dire un traitement discriminatoire, le fait de ne pas être cru ou considéré comme crédible, par exemple, par la police ou les tribunaux. Il y avait également un manque flagrant de compréhension de leur handicap et, par conséquent, un refus des services de soutien dont ils avaient besoin pour agir. Par exemple, la préparation d’un procès ou le dépôt d’une réclamation d’assurance les obligeait à rassembler de nombreux documents, une tâche souvent difficile pour les personnes souffrant d’un handicap cognitif, intellectuel ou lié à la santé mentale.
Il y avait une différence notable dans les expériences des personnes en situation de handicap qui étaient également autochtones, racisées, immigrantes, femmes et/ou membres de la communauté 2SLGBTQ+. Le racisme a été identifié comme étant le principal problème des personnes autochtones et racisées en situation de handicap lorsqu’elles ont affaire à la police et à la protection de l’enfance, ainsi que sur le lieu de travail. Les femmes en situation de handicap ont fait part de leur sentiment d’impuissance face à leur ex-conjoint masculin qui n’est pas en situation de handicap dans les affaires de garde d’enfants et à l’égard des propriétaires masculins. Les personnes en situation de handicap issues des communautés 2SLGBTQ+ se sont souvent demandé si leur identité queer n’intensifiait pas les problèmes qu’elles rencontraient. Une constatation importante a été que les personnes ayant des incapacités invisibles, c’est à dire un syndrome de fatigue chronique, des lésions cérébrales et des incapacités intellectuelles ou mentales, ont souvent dit qu’elles se sentaient moins crédibles, que leur incapacité n’était pas comprise et qu’on leur refusait les services de soutien dont elles avaient besoin.
Les participants à l’étude ont identifié la pauvreté comme la racine de leurs problèmes. Cela signifie qu’ils ne disposaient pas des ressources financières nécessaires pour résoudre leurs problèmes devant les tribunaux. Les participants ont indiqué que parce qu’ils étaient pauvres, ils étaient mis à l’écart de la société en général, ce qui leur valait un traitement discriminatoire et le fait de ne pas être compris. Cette situation s’est intensifiée pour les personnes en situation de handicap, dont les couches de marginalité se croisent. Les résultats de l’étude soulignent également que la ségrégation des personnes en situation de handicap a donné lieu à des systèmes et à des pratiques qui ne répondent pas à leurs besoins, les plaçant dans des conditions où elles sont vulnérables à l’exploitation et à la violence.
Les résultats de l’étude appuient le fait que la crise de la COVID-19 a le plus d’incidence sur les populations les plus pauvres et les plus marginalisées du Canada, soit les personnes en situation de handicap.
Depuis le début de la pandémie de COVID-19, les participants à l’étude ont signalé :
- un sentiment d’isolement accru;
- une forte peur de tomber malade;
- des difficultés à comprendre le protocole de la COVID-19 et à utiliser la technologie;
- ne pas pouvoir obtenir les soins de santé dont ils ont besoin;
- une augmentation du stress lié aux délais relatifs aux services liés à la justice;
- une perte de revenu de travail et/ou l’incapacité de travailler;
- être forcés d’aller travailler, même s’ils ont des problèmes de santé sous-jacents qui les rendraient plus vulnérables à la COVID-19.
Les participants ont également déclaré que la pandémie a souligné leur sentiment de ne pas être valorisés dans la société, car ils ont vu les gouvernements mettre rapidement en place des aides au revenu et à l’emploi pour les personnes n’étant pas en situation de handicap – le genre d’aide que les personnes en situation de handicap demandent depuis des décennies.
Ce rapport se conclut par quelques domaines clés de la réforme des politiques, mis en lumière par les résultats de cette étude :
- la formation obligatoire à la lutte contre les préjugés liés à l’intersectionnalité des handicaps dans les principaux secteurs de services;
- l’obligation pour tous les services de mettre en place des politiques de lutte contre la discrimination liée au handicap;
- une augmentation des services d’aide juridique abordables et accessibles et d’autres services tiers de représentation juridique.
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