Programmes d'intervention en matière de violence envers le partenaire intime

COLOMBIE-BRITANNIQUE

Contexte

Loi : Family Law Act, 2013 (en anglais seulement)

Plan d’action provincial : Taking Action on Domestic Violence in British Columbia (2012 – 2013) (en anglais seulement)

Tribunal pour l’instruction des causes de violence familiale : Dans certaines collectivités

Plan provincial relatif à la violence familiale (Provincial Domestic Violence Plan)

En février 2014, le gouvernement de la Colombie-Britannique publiait son plan provincial de trois ans sur la violence familiale (le Provincial Domestic Violence Plan, ou le « plan »). Soutenu par un budget de 5,5 millions de dollars, ce plan s’inscrit dans l’engagement du gouvernement de rendre la C.-B. plus sûre pour les femmes, les enfants et les familles aux prises avec la violence familiale.

Ce plan, qui est le fruit de consultations entre le gouvernement, la population et des intervenants anti-violence, prévoit la création d’unités chargées de la violence familiale supplémentaires, de programmes visant les familles autochtones, de services directs s’adressant aux auteurs d’actes violents et un accès amélioré aux services ainsi que des logements sociaux pour les survivants vivant dans des collectivités rurales éloignées.

Le plan s’attaque au grave problème qu’est la violence familiale dans les collectivités autochtones en investissant dans des approches adaptées sur le plan culturel. Il comporte aussi des approches qui abordent les besoins des femmes réfugiées et immigrantes, ainsi que des femmes handicapées.

Le 5 août 2015, le bureau provincial chargé de la violence familiale (Provincial Office of Domestic Violence, ou PODV) publiait son premier rapport annuel faisant état des travaux réalisés entre le 1er avril 2014 et le 31 mars 2015 ainsi que des initiatives et des activités qui se poursuivront au cours des années 2 et 3 de la mise en œuvre du plan.

Les travaux s’inscrivant dans les engagements pris pour les années 2 et 3 dans le plan sont déjà bien avancés. L’investissement de 5,5 millions de dollars se décline en quatre volets, qui sont les suivants :

Le PODV publiera son deuxième rapport annuel (Second Annual Report) à l’été 2016 afin de rendre compte des travaux réalisés en 2015-2016.

Le plan provincial relatif à la violence familiale (Provincial Domestic Violence Plan) et le premier rapport annuel (First Annual report) sont accessibles à l’adresse (en anglais seulement).

Tribunaux chargés des causes de violence familiale

Les tribunaux chargés des causes de violence familiale sont présents dans certaines collectivités de la Colombie-Britannique. Il existe dans la province trois modèles distincts de tribunaux chargés des causes de violence, chacun différant de l’autre en ce qui a trait à leurs buts et à leur approche.

Établi en 2009, le tribunal chargé des causes de violence familiale de Duncan est une initiative dirigée par des juges qui adopte une approche en matière de justice axée sur la collaboration et la thérapie et qui réunit divers services communautaires et organismes gouvernementaux. Le tribunal s’est donné comme premier objectif d’éradiquer la violence dans les couples et d’assurer la sécurité des familles. Toutes les infractions liées à la violence familiale, à l’exception des plus graves, et les demandes en vertu de l’article 810 du Code criminel peuvent être assujetties à ce tribunal. Des représentants de divers fournisseurs de services et organismes communautaires s’y présentent pour rencontrer les victimes et les accusés.

Le tribunal pour l’instruction des causes de violence familiale de Nanaimo a été mis sur pied en 2013 dans le cadre d’un effort concerté du comité régional Community Coordination for Domestic Safety (CCDS), composé de représentants d’organismes gouvernementaux et de fournisseurs de services communautaires. Toutes les infractions liées à la violence familiale commises par des adultes, à l’exception des cas d’homicide, ainsi que les demandes en vertu de l’article 810 du Code criminel peuvent être assujetties à ce tribunal. Comme c’est le cas avec le tribunal de Duncan, les fournisseurs de services communautaires jouent un important rôle dans le soutien des victimes et des personnes accusées.

Des audiences de remise chargées des causes de violence familiale ont été établies à Kelowna et à Penticton. Elles visent principalement à améliorer l’efficacité et la gestion des cas de violence familiale dont l’issue en cour est fortement incertaine, de sorte que d’autres tribunaux puissent leur fournir des ressources pour les cas dont l’issue est plus certaine. La Direction sur la pratique judiciaire provinciale (Provincial Court Practice Direction) établit les types de cas pouvant être assujettis aux audiences de remise et énonce les exigences précises en matière de gestion de cas et d’établissement du calendrier. En règle générale, les cas assujettis aux audiences de remise se limitent aux infractions moins graves en matière de violence familiale. Sauf décision contraire du tribunal, les cas soumis aux audiences de remise doivent être pris en charge à des dates consécutives, et un seul témoin de la Couronne n’est requis à la date d’ouverture du procès.

Se reporter à la stratégie de 2016 du ministère de la Justice sur les tribunaux spécialisés (Specialized Courts Strategy) ainsi qu’au cadre de 2014 régissant les tribunaux chargés des causes de violence familiale en Colombie-Britannique (Framework for Domestic Violence Courts) pour de plus amples renseignements.

Évaluation du risque

Plusieurs outils d’évaluation du risque sont utilisés dans la province.

Le ministère de la Sécurité publique et du Solliciteur général a mis sur pied une formation normalisée, à l’intention de tous les policiers de première ligne, sur la conduite d’enquêtes en matière de violence familiale reposant sur des preuves et fondées sur les risques. Les policiers apprennent à utiliser le BC Summary of Domestic Violence Risk Factors (SDVRF), un outil permettant de relever les facteurs de risque dans les grandes catégories des antécédents relationnels, de la perception du risque du ou de la plaignante, des antécédents du suspect et de l’accès à des armes. Certains policiers, y compris les unités plus spécialisées, utilisent des outils plus perfectionnés pour évaluer de manière structurée les risques en lien avec la violence familiale, dont B-SAFER.

Les Services correctionnels communautaires emploient généralement le SARA et l’outil d’évaluation communautaire des besoins relatifs au risque (Community Risk Needs Assessment), document qui oriente la gestion des cas et aide les agents de probation à définir un degré approprié de surveillance et les stratégies d’intervention.

La Division des services de justice familiale du ministère de la Justice utilise un outil normalisé de détermination des besoins initiaux comportant deux questions touchant les antécédents et le risque immédiat de violence familiale. Les clients qui rencontrent un conseiller en justice familiale remplissent un outil d’évaluation du risque plus détaillé conçu précisément pour leur système (Family Justice Services Assessment Form).

Programmes de traitement imposés par voie judiciaire

Le ministère de la Sécurité publique et du Solliciteur général finance les programmes de traitement imposés par voie judiciaire.

Structure

Le traitement imposé par voie judiciaire comporte deux volets, connus collectivement sous le nom de Programme pour la prévention de la violence familiale (Relationship Violence Prevention Program). Le premier, intitulé Respectful Relationships (RR), est fourni par le personnel de la Direction des affaires correctionnelles aux contrevenants présentant un risque modéré à élevé (ainsi qu’évalué par les affaires correctionnelles). Le deuxième, intitulé Relationship Violence (RVP), est confié en sous-traitance à Stroh Health Services et mis en œuvre dans 45 collectivités à l’échelle de la province pour les contrevenants à risque modéré ou élevé une fois qu’ils ont terminé Respectful Relationships. Les progrès accomplis par l’agresseur sont communiqués aux affaires correctionnelles tout au long de sa participation au RVP, puis un rapport final est présenté lorsque le programme est terminé. Les présences sont consignées et signalées après chaque séance de même que toute inquiétude relativement à une escalade du risque.

De plus, le programme RR est coordonné dans des collectivités autochtones désignées par des agents de probation et des aides juridiques autochtones en s’assurant particulièrement que cela est fait d’une manière appropriée sur le plan culturel. Depuis 2005, 130 aides juridiques autochtones ont été formées dans le cadre du programme RR. Ces aides juridiques autochtones mettent à profit cette formation en coordonnant des programmes destinés aux contrevenants et en offrant des services axés sur la culture dans le cadre du programme. Les aides juridiques autochtones coordonnent aussi des programmes de violence familiale dans leurs collectivités en fournissant des services aux femmes, aux hommes, aux enfants et aux couples.

Le ministère de la Sécurité publique et du Sollicitateur général a aussi fait appel à plusieurs organismes du Lower Mainland pour fournir la version culturelle du programme RVP aux hommes dans diverses langues comme le pendjabi, le persan, le cantonais et le mandarin, dans des séances de groupe ou individuelles.

Le Programme pour la prévention de la violence familiale (Relationship Violence Prevention, ou RVPP) a été évalué en 2008 par les services correctionnels de la Colombie-Britannique. Les résultats ont tout particulièrement permis de constater une réduction de 50 % des récidives de violence conjugale et une réduction de 60 % de la récidive générale chez les hommes ayant participé au RVPP dans la collectivité en comparaison d’un groupe d’hommes témoin ayant été soumis uniquement à la surveillance communautaire. Les effets ont perduré tout au long de la période de suivi de deux ans, et on a observé un taux de récidive moindre chez les hommes qui achevaient les deux volets du programme.

Respectful Relationships et Relationship Violence sont offerts dans divers endroits au Canada sous une forme normalisée. Une description de ces programmes figure dans l’encadré 1.

Encadré 1

Respectful Relationships

Structure :
Séances en groupes fermés pendant 10 semaines, à raison de 2 heures par semaine, dirigées par le personnel de la Direction des affaires correctionnelles. 8 à 10 participants par séance

Modalité thérapeutique :
Programme de psychoéducation cognitivo-comportemental

Composantes du programme : comprendre le comportement violent; répercussions de la violence sur les victimes et les enfants; stratégies de maîtrise des émotions et du comportement; compétences en résolution de problèmes

Deuxième volet : Relationship Violence

Structure :
Séance en groupes fermés pendant 17 semaines; 8 à 10 participants

Modalité thérapeutique :
Programme cognitivo-comportemental qui utilise de méthodes d’enseignement axées sur les résultats

Composantes du programme : sources du conflit; conscience de soi; influence de la famille et des amis; remise en question des pensées et des schèmes de réflexion; cerner et maîtriser les émotions; jalousie; sexualité et intimité; examen et intégration; habiletés en communication; résolution de problèmes; résolution des conflits, paternité et prévention des rechutes.

Compétences parentales et répercussions de la violence sur les enfants qui en sont témoins

Le programme Relationship Violence comporte une séance sur la paternité. On y couvre les sujets suivants : les enfants apprennent ce qu’ils ont vécu; la roue des enfants maltraités; la roue de la nurturance; lignes directrices sur les compétences parentales; cinq bonnes raisons de ne plus donner la fessée; comment faire face au comportement difficile de son enfant; la discipline positive; l’utilisation du « temps de retrait ».

Responsabilités envers les victimes

Les contacts avec les victimes relèvent souvent des services aux victimes, des services correctionnels et des instances de surveillance des personnes mises en liberté sous caution, mais certains fournisseurs de services intègrent ces démarches à leur programme. Les contacts visent généralement à expliquer le programme, à faciliter l’évaluation du risque et à s’assurer que la victime a accès à des services de planification de sa sécurité et à des ressources connexes. Des groupes parallèles et une aide individuelle aux victimes sont parfois mis sur pied par les services communautaires.

Services communautaires de traitement des agresseurs

Le ministère de la Sécurité publique et du Solliciteur général s’affaire actuellement à l’élaboration de programmes d’intervention s’adressant aux auteurs d’actes de violence familiale avant leur prise en charge par le système de justice pénale, y compris à l’amélioration et à l’évaluation de programmes adaptés sur le plan culturel s’adressant aux collectivités autochtones. En avril 2015, 1 million de dollars ont été débloqués pour soutenir ces travaux dans le cadre du plan provincial relatif à la violence familiale.

À l’heure actuelle, les fournisseurs de services thérapeutiques communautaires aux agresseurs et les praticiens privés offrent des thérapies aux hommes qui ne font pas l’objet d’une ordonnance judiciaire dans divers endroits de la province. Ces programmes sont généralement financés par des collectes de fonds de l’organisme, des petites subventions ou des frais d’utilisation payés par les clients.

Même s’il n’y a pas de lien direct entre ces programmes communautaires et les tribunaux, certains participants entrés dans le système de justice pénale ont accès à ces organismes ou y sont aiguillés pour recevoir des services. L’échange d’information est très limité entre les services correctionnels de la Colombie-Britannique et l’organisme qui assure les services, et alors seulement en général avec le consentement des participants. L’organisme fournit à ceux-ci une lettre confirmant leur participation au programme. Il ne remet pas d’évaluation ni de lettre d’appui. Les programmes varient suivant leur orientation thérapeutique, leur durée et les sujets qui sont abordés.

Deux des plus importants programmes communautaires sont décrits ci-dessous :

Northern Society for Domestic Peace
Domestic Peace Program
(en anglais seulement)

Financement

Le Domestic Peace Program est financé au moyen d’une subvention versée par la commission des jeux du hasard de la province (BC Gaming Commission) et des collectes de fonds de l’organisme.

Structure

Le programme offre des services à des contrevenants en matière de VPI présentant un risque élevé, modéré ou faible. Les participants s’inscrivent sur une base volontaire, mais les services de probation y dirigent des agresseurs lorsqu’une ordonnance judiciaire l’impose. Il ne remet aucune évaluation au tribunal, mais il confirme la participation après 12 séances. Les hommes peuvent y assister tant et aussi longtemps qu’ils en ont besoin.

Évaluation du risque

L’évaluation se poursuit tout au long du travail effectué avec le client. Les intervenants utilisent des outils formels comme le répertoire des mauvais traitements (Abuse Inventory) mis au point à partir du SARA et de l’ERA, de même que le B-SAFER, le SARA et Signs of Safety (Andrew Turnell). Ils peuvent aussi communiquer avec des tiers, comme l’ex-partenaire ou la partenaire du participant, de manière à obtenir un portrait complet du profil de risque de l’agresseur.

Traitement

Avant de participer au Domestic Peace Program, le contrevenant doit se soumettre à un counseling individuel d’au moins 12 heures. Les services suivent une approche axée sur la recherche de réponses, et l’accent thérapeutique est mis sur le choix et la volonté, le positionnement du participant comme sujet de ses actions, violentes ou non, et l’acceptation de sa capacité de choisir en tout temps de traiter sa partenaire avec respect (« Approaching the Subject of Violence:A Response-Based Approach to Working with Men who Have Abused Others », Nick Todd, Gillian Weaver-Dunlop et Cindy Ogden, Violence Against Women 2014 20:1117). Les participants se prêtent à une évaluation à la fin du programme. Le suivi s’effectue six mois et un an après.

Responsabilités envers les victimes

Le participant doit accepter qu’il y ait contact avec sa partenaire pour être admissible. Le thérapeute qui travaille avec lui communique avec la victime afin d’évaluer ses inquiétudes et de lui donner un soutien, notamment pour la planification de sa sécurité et l’aiguillage vers des services communautaires. L’organisme offre également des services de traitement aux victimes, de sorte qu’il peut accompagner toute la famille au besoin. Dans le cas où la victime n’est pas une cliente de l’organisme, le contact se fait au début du programme et à la fin.

Intégration

La Northern Society for Domestic Peace est exploitée dans un cadre collaboratif. Le comité de coordination communautaire pour la sécurité des femmes (Community Coordination for Women’s Safety committee) est constitué d’intervenants clés, notamment la police, les services aux victimes, les services correctionnels et la protection de l’enfance. Le comité vise les changements systémiques. La collectivité vient récemment d’établir une ICAT (Interagency Case Assessment Team) pour répondre aux besoins des contrevenants à risque élevé.

Northern John Howard Society
Stop Taking it Out on Your Partner

Prince George, C.-B. (en anglais seulement)

La Northern John Howard Society met en œuvre un programme à Prince George intitulé Stop Taking it Out on Your Partner (PG STOP).

Financement

PG STOP assure des services à des participants sur une base volontaire depuis 20 ans. Il est financé par des subventions et les bureaux locaux de Centraide.

Structure

Bien que les hommes participent volontairement au programme, le ministère du Développement social et de l’Innovation sociale (Social Development and Social Innovation) de même que les services de probation et de libérations conditionnelles y dirigent bon nombre de contrevenants qui sont obligés par un tribunal d’obtenir un traitement. Il y a échange de renseignements avec l’organisme d’aiguillage seulement si le participant y consent. À la fin du programme, les hommes peuvent réussir ou échouer. Ceux qui subissent un échec peuvent répéter le programme.

Évaluation du risque

Les services s’adressent aux agresseurs à risque élevé, modéré et faible.

L'évaluation des risques n'a pas été formellement effectuée, mais les conseillers utilisent jugement professionnel pour surveiller le changeant du profil de risque des participants.

Traitement

Le programme repose sur diverses modalités de traitement, dont les thérapies psychodynamique, humanistique et cognitivo-comportementale. La matière est divisée en huit volets mis en œuvre sur 15 semaines en séances de 3 heures. Sujets abordés : maîtrise de la colère, utilisation de la colère dans un but positif, maîtrise des émotions, monologue intérieur positif, fonctionnement du système émotionnel, colère et réponse/réaction, journal d’expression de la colère, temps de retrait, sentiment toxique de honte, estime de soi, formes de violence, effet de la violence sur les enfants, communication, écoute active, empathie, résolution des conflits et « lettre de reconnaissance de la responsabilité ». Les participants peuvent rencontrer un intervenant individuellement pour un suivi une fois qu’ils ont terminé le programme.

Responsabilités envers les victimes

Il y a communication avec la victime, et on lui donne accès à un groupe d’aide aux conjointes. Dans une perspective de continuité, l’intervenant qui travaille avec le contrevenant va aussi animer le groupe auquel participe la conjointe.

Évaluation

Le programme Stop Taking it Out on Your Partner a été évalué en 2013 (Reducing the recurrence of domestic abuse among male intimate partners: a case study of the PG STOP violence program of the Northern John Howard Society of British Columbia, Chiduzie Ezedebaego, étudiant à la maîtrise à l’université de la Colombie-Britannique). (en anglais seulement)