Les droits et libertés au Canada
Au Canada, la Constitution et les lois fédérales, provinciales et territoriales protègent les droits et les libertés fondamentales de la personne.
La Déclaration canadienne des droits, adoptée en 1960, a été la première loi fédérale en matière de droits de la personne au Canada. Elle garantit de nombreuses libertés et de nombreux droits fondamentaux, notamment « le droit de l’individu à la vie, à la liberté, à la sécurité de la personne ainsi qu’à la jouissance de ses biens » ainsi que le droit de ne pas se voir privé de n’importe lequel de ces droits sans qu’il y ait application régulière de la loi, c’est-à-dire sans équité procédurale.
La Loi canadienne sur les droits de la personne, adoptée en 1977, protège également les droits de la personne dans les secteurs public et privé fédéraux (par exemple les banques, le transport ferroviaire, les télécommunications et le transport interprovincial), particulièrement en ce qui concerne le droit à l’égalité et à l’absence de discrimination dans les domaines de l’emploi, du logement et de la prestation des services.
Toutes les provinces et tous les territoires disposent également de lois sur les droits de la personne qui interdisent la discrimination dans l’emploi, le logement et la fourniture de biens, de services et d’installations au public. Certaines lois provinciales et territoriales protègent une plus vaste gamme de droits et de libertés. Mais comme toute autre loi, ces lois peuvent être abrogées ou modifiées et leur protection peut donc être limitée. C’est seulement lorsque la Charte canadienne des droits et libertés a vu le jour que les droits de la personne au Canada ont finalement été protégés par écrit dans la Constitution.
Que dit la Charte canadienne des droits et libertés?
La Constitution précise que la Charte a préséance sur toute autre loi au Canada parce qu’elle fait partie de la « loi suprême » du Canada. Elle s’applique à toutes les mesures gouvernementales, et donc aux législatures provinciales et au Parlement ainsi qu’à toutes les activités découlant de leur autorité. Cela signifie que les gouvernements doivent tenir compte de la Charte lorsqu’ils élaborent toutes leurs lois et leurs politiques. Cela signifie également que lorsqu’une personne qui croit que le Parlement ou une législature a violé des libertés ou des droits fondamentaux garantis par la Charte demande l’aide des tribunaux, ceux-ci peuvent déclarer une loi invalide si elle entre en conflit avec la Charte ou ordonner des mesures de réparation « convenables et justes ».
Toutefois, l’article 1 de la Charte reconnaît également que, même dans une démocratie, les droits et les libertés ne sont pas absolus. Par exemple, personne n’est libre de crier « au feu! » dans un théâtre bondé, ni de diffamer quelqu’un, ni de s’adonner à des pratiques religieuses qui causent du tort à autrui, ni de diffuser de la pornographie juvénile ou de la propagande haineuse, ni de se rendre au Canada ou de quitter le Canada sans aucune restriction. Par conséquent, le Parlement ou une législature provinciale peuvent limiter des droits fondamentaux, mais seulement s’ils peuvent montrer que la limite imposée :
- est prescrite par la loi, qu’elle vise un objectif important justifiable dans le cadre d’une société libre et démocratique;
- qu’elle poursuit cet objectif de manière raisonnable et mesurée.
Il faut toujours préserver l’équilibre entre les intérêts de la société et ceux de l’individu pour déterminer si les limites aux droits individuels peuvent se justifier.
La Charte affirme également que nous formons un pays multiculturel et que ses dispositions doivent être interprétées en respectant cet idéal.
Selon la Constitution, tant le Parlement que les législatures provinciales gardent un pouvoir limité d’adopter des lois qui peuvent violer certains droits garantis par la Charte. Toutefois, ils ne peuvent agir en ce sens que si le Parlement ou la législature provinciale en cause déclarent spécifiquement qu’ils adoptent une loi en invoquant la clause dérogatoire à l’égard de certaines dispositions de la Charte. Cette déclaration doit être examinée et adoptée de nouveau tous les cinq ans, sans quoi elle ne peut rester en vigueur. Cette déclaration informe les Canadiens des limites imposées aux libertés ou aux droits garantis par la Charte. Elle oblige également le gouvernement à s’expliquer, à accepter la pleine responsabilité de ses actes et à en assumer les conséquences politiques. Jusqu’à maintenant, le Parlement n’a jamais invoqué la clause dérogatoire.
Quels droits la Charte protège-t-elle?
La Charte protège :
- les libertés fondamentales;
- les droits démocratiques;
- la liberté de circulation et d’établissement;
- les garanties juridiques;
- les droits à l’égalité;
- les droits linguistiques.
Elle reconnaît et affirme également les droits ancestraux ou issus de traités des Autochtones.
Les libertés fondamentales
- Au Canada, chacun est libre de pratiquer n’importe quelle religion ou de n’en pratiquer aucune.
- Nous sommes libres de penser ce que nous voulons et de dire ce que nous pensons, de nous réunir pacifiquement en groupes et de nous associer avec qui nous voulons, à condition de ne pas enfreindre de lois valides qui protègent les droits et libertés des autres.
- Les médias sont libres d’imprimer et de diffuser des nouvelles et d’autres informations, dans les limites raisonnables et justifiables fixées par la loi.
Les droits démocratiques
- Chaque citoyen canadien a le droit de voter pour élire les députés et les représentants des législatures provinciales et territoriales et de se porter candidat, sous réserve de quelques rares exceptions (par exemple, l’âge minimum pour exercer son droit de vote) qui ont été jugées raisonnables et justifiables.
- Nos gouvernements élus ne peuvent rester au pouvoir indéfiniment. La Charte exige que les gouvernements convoquent des élections au moins une fois tous les cinq ans. La seule exception à cette règle est une situation d’urgence nationale comme une guerre, si les deux tiers des députés de la Chambre des communes ou d’une assemblée législative conviennent de retarder les élections.
- Chaque citoyen a le droit de voir son représentant élu siéger au moins une fois par année au Parlement ou à la législature, de manière à ce que le Parlement et les gouvernements rendent compte de leurs activités.
La liberté de circulation et d’établissement
- Les citoyens canadiens ont le droit d’entrer au pays, d’y rester et de le quitter.
- Les citoyens canadiens et les résidents permanents ont le droit d’habiter et de chercher du travail n’importe où au Canada. Les gouvernements du Canada ne peuvent exercer de discrimination contre une personne en fonction de sa province de résidence actuelle ou antérieure. Par exemple, si une personne est qualifiée dans une profession dans une province, par exemple comme comptable, elle ne peut être empêchée de travailler dans une autre province parce qu’elle n’y habite pas.
- Toutefois, les lois peuvent établir des exigences de résidence raisonnables pour l’obtention de certaines prestations sociales ou de bien-être. Les provinces dont le taux d’emploi est inférieur à la moyenne nationale peuvent également mettre sur pied des programmes à l’intention de leurs résidents défavorisés sur les plans social et économique sans être obligées d’en faire profiter les non-résidents.
Les garanties juridiques
- La Charte protège en outre les droits fondamentaux à la vie, à la liberté ainsi qu’à la sécurité physique et psychologique (ou « sécurité de la personne »).
- Nul ne peut être privé de ces droits sans qu’il y ait de procédure judiciaire en règle fondée sur des lois claires et équitables.
- Le droit d’être présumé innocent jusqu’à preuve du contraire est une garantie constitutionnelle fondamentale.
- La Charte protège également les attentes raisonnables de toutes les personnes en matière de respect de la vie privée dans leur foyer, dans les lieux privés et en ce qui concerne leurs renseignements personnels. Cela signifie notamment qu’ils sont protégés contre des fouilles et saisies abusives par les services policiers et par d’autres autorités gouvernementales, qui ont habituellement besoin d’un mandat approuvé par un juge pour pénétrer dans votre maison ou prendre d’autres mesures d’intrusion dans votre vie privée.
- Toute personne est également protégée contre une détention ou une arrestation arbitraire. Un policier doit avoir des motifs raisonnables de croire que vous avez commis un crime avant de vous détenir. Le droit de contester la légalité de votre détention (qu’on appelle aussi « habeas corpus ») est garanti expressément par la Charte.
- La Charte vous protège également contre des actes aléatoires ou arbitraires d’organismes d’application de la loi. Par exemple, vous avez le droit d’être informé des raisons de votre arrestation ou de votre détention, de consulter un avocat sans délai, d’être informé de ce droit, et de faire déterminer rapidement par un tribunal si cette détention est légale.
- Toute personne a le droit de ne pas subir de peine cruelle et inusitée comme la torture, l’emploi d’une force excessive ou exagérée par des agents de l’application de la loi et une peine d’emprisonnement qui est « exagérément disproportionnée » par rapport à la gravité du crime commis.
- Lorsqu’une personne est accusée d’une infraction en vertu d’une loi fédérale ou provinciale, elle a aussi le droit :
- d’être informée rapidement de cette infraction;
- d’être jugée dans un délai raisonnable;
- de ne pas être contrainte de témoigner à son propre procès;
- d’être présumée innocente jusqu’à preuve du contraire hors de tout doute raisonnable par un tribunal indépendant et impartial à l’issue d’un procès public et équitable;
- de ne pas être privée sans motif valable d’une mise en liberté assortie d’un cautionnement raisonnable;
- de bénéficier d’un procès avec jury en cas d’accusation grave;
- d’être déclarée coupable uniquement pour un acte ou une omission qui constituait un crime au moment où l’acte ou l’omission a eu lieu;
- de ne pas être jugée ou punie deux fois pour la même infraction;
- de recevoir la peine la moins lourde si le châtiment pour un crime change entre le moment où il a été commis et le moment où elle est condamnée.
- À titre de témoin lors d’un procès, toute personne a droit à ce qu’aucun témoignage incriminant qu’elle donne ne soit utilisé contre elle lors de procédures subséquentes, à moins d’être accusée de parjure (c’est-à-dire d’avoir menti au cours de procédures judiciaires).
Toute personne a droit à un interprète lors de procédures judiciaires si elle ne comprend pas la langue dans laquelle celles-ci se déroulent ou si elle est malentendante.
Les droits à l’égalité
Les droits à l’égalité sont au cœur même de la Charte. Ils visent à garantir que chacun soit traité avec le même respect, la même dignité et la même considération (c.-à-d. sans discrimination), indépendamment de ses caractéristiques personnelles comme la race, l’origine ethnique ou nationale, la couleur, la religion, le sexe, l’âge, les déficiences intellectuelles ou physiques, l’orientation sexuelle, la situation matrimoniale ou la citoyenneté.
- Cela signifie habituellement que toutes les personnes devraient être traitées de la même manière par la loi et que chacun devrait avoir droit aux mêmes avantages offerts par les lois ou les politiques gouvernementales. Cela dit, la Charte n’exige pas que tout le monde soit toujours traité exactement de la même manière. Par exemple, protéger l’égalité signifie parfois que les règles ou les normes doivent être adaptées de manière raisonnable pour tenir compte des différences entre les personnes, notamment en permettant aux gens d’observer des fêtes religieuses différentes sans perdre leur emploi ou en mettant des mesures particulières en place pour permettre aux personnes atteintes d’une déficience visuelle ou auditive d’avoir accès aux services gouvernementaux.
- Il est également constitutionnel de créer des programmes spéciaux destinés à améliorer la situation des personnes faisant partie de groupes qui ont historiquement été victimes de discrimination au Canada, notamment pour les motifs énumérés ci-dessus.
Les droits linguistiques
Le français et l’anglais sont les langues officielles du Canada, selon la Charte. Les deux langues ont un statut et des droits et privilèges égaux dans toutes les institutions du Parlement et du gouvernement du Canada.
- Chacun a le droit d’utiliser le français ou l’anglais lors des débats et des délibérations du Parlement.
- Les lois, archives, comptes rendus et procès-verbaux du Parlement doivent être imprimés et publiés dans les deux langues, les deux versions ayant le même poids.
- Toute personne a le droit d’utiliser le français ou l’anglais dans les procédures devant n’importe quel tribunal établi par le Parlement.
- Les membres du public ont en outre le droit d’employer le français ou l’anglais pour communiquer avec l’administration centrale des institutions du Parlement ou du gouvernement du Canada et pour recevoir leurs services. Ils ont les mêmes droits lorsqu’ils s’adressent à n’importe quel bureau d’une institution où l’emploi d’une de ces deux langues fait l’objet d’une demande importante. Il peut également être raisonnable que les communications et les services soient aussi offerts en français et en anglais, selon la vocation du bureau en question.
- Ces droits sont les mêmes au Nouveau-Brunswick, seule province officiellement bilingue du Canada. En fait, les citoyens du Nouveau-Brunswick ont le droit de communiquer avec tous les bureaux des institutions législatives et gouvernementales du Nouveau-Brunswick et de recevoir les services demandés en français ou en anglais. En vertu de l’article 16 de la Charte, les communautés francophone et anglophone du Nouveau-Brunswick ont également droit à l’égalité de statut et à l’égalité de leurs droits et privilèges, notamment celui d’avoir les institutions culturelles et les établissements d’enseignement distincts nécessaires pour préserver et voir s’épanouir leurs communautés.
- La Loi constitutionnelle de 1867 et la Loi de 1870 sur le Manitoba donnent également aux habitants du Québec et du Manitoba, respectivement, le droit d’employer le français et l’anglais dans les débats et les délibérations des législatures et devant les tribunaux de ces provinces. Ces dispositions exigent en outre que les lois provinciales soient adoptées et publiées dans les deux langues, et que les deux langues soient employées dans les archives, les procès-verbaux et les comptes rendus de ces législatures.
Les droits à l’instruction dans la langue de la minorité
- Chaque province et territoire comprend des communautés de langue officielle en situation minoritaire (des communautés de langue française à l’extérieur du Québec et des communautés de langue anglaise au Québec).
- À l’extérieur du Québec, les citoyens dont la langue maternelle est le français ou qui ont fait leurs études primaires ou secondaires en français au Canada ont le droit constitutionnel d’envoyer tous leurs enfants à l’école primaire ou secondaire dans cette langue. Cela est également le cas si leurs enfants fréquentent, ou ont fréquenté, l’école primaire ou secondaire en français au Canada.
- Au Québec, les citoyens qui ont fait leurs études primaires en anglais au Québec, ou qui ont des enfants qui font ou qui ont fait leurs études en anglais au Québec, ont le droit constitutionnel d’envoyer tous leurs enfants à des écoles anglaises.
Ce droit à l’instruction dans la langue de la minorité s’exerce là où le nombre d’enfants dans la même situation le justifie, et il peut comprendre le droit de ces enfants de recevoir cet enseignement dans des établissements de la minorité linguistique financés par les fonds publics.
Les droits ancestraux et issus de traités
Comme mentionné précédemment, l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 reconnaît et confirme les droits ancestraux ou issus de traités des peuples autochtones.
La Charte ne peut pas retirer ou diminuer ces droits, ni tous les autres droits et les autres libertés que les peuples autochtones pourraient obtenir à l’avenir (par exemple lors du règlement de revendications territoriales).
Les autres droits
La Charte garantit bon nombre des libertés et des droits de la personne fondamentaux. Mais nous avons aussi d’autres droits qui découlent de la loi fédérale, provinciale, territoriale et internationale ainsi que de la common law. De plus, le Parlement et les législatures provinciales ou territoriales peuvent toujours nous accorder d’autres droits.
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