Traitement par la justice pénale des homicides commis par un partenaire intime par opposition aux autres types d'homicides
4. Résultats
4.1 Résultats d'une analyse bidimensionnelle visant la relation intime et la justice : examen préliminaire
Échantillon total | Homicide commis par un partenaire intime | Autre type d'homicide | |
---|---|---|---|
Variables | (N=1,137) | (N=230) | (N=907) |
Résultats du processus pénala a | |||
Accusation de meurtre au premier degré (N=1,137) |
37 % (419) | 35 % (80) | 37 % (339) |
Affaire soumise à un tribunal (N=1,130) |
58 % (654) | 53 % (122) | 59 % (532) |
Verdict de culpabilité (N=654) |
60 % (395) | 64 % (79) | 60 % (316) |
Verdict de non responsabilité criminelle (N=259) |
37 % (96) | 57 % (25)** | 33 % (71) |
Probabilité de condamnation (N=1,137) |
76 % (866) | 80 % (185) | 75 % (681) |
Condamnation pour meurtre (N=866) |
39 % (341) | 41 % (76) | 39 % (265) |
Peine de ressort fédéral (N=866) |
83 % (715) | 81 % (149) | 83 % (566) |
Durée de la peine (N=866) |
9,20 ans | 9,11 ans | 9,23 ans |
Nota : * p< 0,05 ** p < 0,01 *** p < 0,001
a Les nombres inscrits entre parenthèses indiquent la taille de l'échantillon à l'étape du processus pénal qui est visée, car le nombre d'accusés varie d'une étape à l'autre.
Nous présentons dans le tableau 4.1 les résultats d'une analyse bidimensionnelle dans le cadre de laquelle sont comparés les traitements réservés, à divers stades du processus pénal, aux deux types d'homicides visés. En ce qui concerne les huit résultats examinés, il ressort que le traitement accordé aux personnes accusées d'homicide sur la personne d'un partenaire intime ne diffère de celui que reçoivent celles qu'on accuse d'un autre type d'homicide que par rapport à un seul aspect, à savoir celui du type d'acquittement. De façon plus précise, mentionnons que, parmi les personnes acquittées comprises dans notre échantillon, celles qu'on avait accusées d'avoir tué un partenaire intime étaient beaucoup plus susceptibles de recevoir un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux (57 % contre 33 %; voir l'encadré 3). En revanche, il ne semble pas que la relation entre la victime et l'accusé influe sur les décisions prises à d'autres étapes, à tout le moins sur le plan bidimensionnel.[27] Présentant les résultats d'un examen plus détaillé de la durée de la peine, le tableau 4.2 montre la distribution, par type d'homicide, de cinq durées de peine pour l'ensemble des personnes condamnées dans notre échantillon. Nous n'avons relevé entre les différentes durées aucune différence significative en fonction du type de relation entre la victime et l'accusé.
Encadré 3. Accusés déclarés criminellement non responsables pour cause de maladie mentale
Cas no 8633
L'homme accusé dans ce cas affirmait que sa grand-mère décédée lui parlait depuis sa mort et que, la nuit précédant le meurtre, elle lui avait donné instruction de tuer sa mère – la victime. Ce matin-là, l'accusé a pris un couteau dans la cuisine et il a attaqué sa mère. Il l'a poignardée en tout 125 fois. Pendant qu'elle gisait dans une mare de sang à la cuisine, le défendeur se lavait et lavait ses vêtements dans la salle de bain. Lorsqu'il est revenu dans la cuisine, il a cru voir sa mère bouger et murmurer. Il a repris le couteau et il l'a poignardée plusieurs fois au cou, sectionnant la jugulaire. Lorsqu'il a vu qu'elle était morte, il a appelé la police et une ambulance et confessé l'avoir tuée. L'accusé suivait un traitement psychiatrique depuis plus de dix ans. Il avait également été hospitalisé un certain nombre de fois. L'accusé a été accusé originalement de meurtre au deuxième degré, mais il a été trouvé non coupable pour cause d'aliénation mentale.
Cas no 9702
La victime et l'accusé, tous deux des hommes, logeaient temporairement dans un refuge. Le matin du meurtre, ils ont été vus tous les deux en train de sortir du refuge. Plus tard, ils ont été vus se tenant debout sur le trottoir alors que l'accusé frappait la victime, lui infligeant un coup de couteau à l'œil. La victime s'est effondrée sur le sol et l'accusé s'est éloigné. Un témoin a appelé le 911 pour signaler le crime et communiquer à la police la direction que l'individu avait prise. Une enquête a révélé que la victime était un pensionnaire régulier du refuge, mais que l'accusé n'y séjournait que depuis peu. La nuit précédant le meurtre, l'accusé est rentré tard et le lit qui lui avait été attribué était alors occupé par l'individu qui l'utilisait régulièrement – la victime. L'accusé s'est fâché parce qu'il estimait que le lit lui appartenait étant qu'il y avait dormi la nuit précédente, mais on lui a attribué une autre place. Aucune confrontation n'a été signalée jusqu'au lendemain matin, lorsque l'accusé a poignardé la victime. Les deux individus n'avaient eu aucun contact précédemment. L'individu a été accusé de meurtre au premier degré, mais il a été trouvé criminellement non coupable pour cause d'aliénation mentale.
Cas no 8751
L'accusé consultait des médecins pour des problèmes d'insomnie et de dépression. Un médecin avait recommandé l'admission dans un hôpital psychiatrique, mais l'accusé avait refusé. La victime, une amie, l'avait invité chez elle le jour du meurtre pour discuter de ses problèmes. Alors qu'il se trouvait chez la victime, l'accusé a perdu le contrôle de lui-même et il s'est mis en colère. Il a étranglé, poignardé et étouffé la victime. Il a essayé de déguiser la mort de la victime en agression sexuelle ayant mal tourné et il a quitté l'appartement. Plus tard, la femme de l'accusé l'a trouvé à côté d'elle dans le lit, avec une hache dans la main. Ils ont discuté jusqu'à ce qu'il perde connaissance à cause d'une trop grande quantité de drogue; sa femme a ensuite appelé la police. L'individu a été accusé de meurtre au premier degré, mais il a été trouvé non coupable pour cause d'aliénation mentale et il a été hospitalisé.
Cas no 9704
La victime, une femme, et l'accusé passaient la nuit chez des amis. Tôt le matin, les amis ont été éveillés par un cri provenant de la chambre où dormaient la victime et l'accusé. Ils sont entrés dans la chambre où ils ont trouvé l'accusé à genou sur la victime, en train de la poignarder à répétition. Les amis sont intervenus et la police a été appelée. Les amis ont indiqué que, pendant la soirée précédente, ils n'avaient pas consommé d'alcool. Ils n'étaient pas non plus au courant d'antécédents de violence entre la victime et l'accusé. La victime, qui était enceinte, a reçu 29 coups de couteau. Lorsqu'il a été arrêté, l'accusé ne semblait pas comprendre ce qui se passait et ne répondait pas aux questions. L'individu a été accusé de meurtre au deuxième degré, mais il a été trouvé criminellement non responsable.
Cas no 8138
L'accusé croyait que la victime, une femme, et leur locataire avaient une aventure. Il avait essayé sans succès de faire expulser le locataire par le tribunal le jour du meurtre. Plus tard, au cours de la soirée, pendant que l'accusé et la victime préparaient le souper, ils ont commencé à se disputer. L'accusé a alors saisi le couteau que la victime utilisait pour préparer le repas et il l'a attaquée, lui infligeant des blessures à la poitrine et à la tête. Il y avait déjà des antécédents de violence de la part de l'accusé contre la victime et la police avait déjà été appelée à intervenir quelques fois. Un psychiatre traitait l'accusé au moment du meurtre, mais il n'existait aucune indication des raisons pour lesquelles l'accusé était traité. L'individu a été accusé de meurtre au premier degré, mais il a été trouvé non coupable pour cause d'aliénation mentale et il a été condamné à être hospitalisé.
Cas no 8155
L'accusé était sans emploi depuis deux ou trois mois et il se querellait davantage avec sa femme, la victime. Le couple s'était apparemment disputé au sujet des enfants et l'accusé avait envoyé les enfants chez des amis. Le couple a repris ensuite sa querelle et l'accusé a étranglé la victime pour fuir ensuite les lieux. Les amis qui s'occupaient des enfants du couple ont découvert le corps de la victime cet après-midi là. L'accusé a affirmé que le diable lui avait ordonné de tuer la victime. On a affirmé qu'il avait des hallucinations qui lui faisaient croire notamment que sa femme le trompait. Il suivait un traitement psychiatrique en clinique externe. L'individu a été accusé de meurtre au deuxième degré, mais il a été trouvé non coupable pour cause d'aliénation mentale.
[27] Ces résultats entrent en contradiction avec ceux de la plupart des analyses bidimensionnelles réalisées en ce qui concerne la relation intime et la justice pénale. Cela peut être principalement dû au fait que les études antérieures ne faisaient pas la distinction entre les relations entre partenaires intimes et les autres types de relations intimes, comme nous l'avons mentionné précédemment. Dans la majorité de ces études, la violence entre partenaires intimes était définie comme la violence existant entre conjoints, entre membres de la famille ou entre amis, et on comparait le traitement réservé à cette catégorie plutôt « vaste » à celui accordé aux autres types de violence (notamment la violence entre des connaissances et celle entre étrangers).
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