Pouvoir discrétionnaire de la police à l'égard des jeunes contrevenants

V. Facteurs conjoncturels influant sur le pouvoir discrétionnaire de la police

14.0 Engagement des parents

La seule recherche canadienne que nous ayons pu trouver sur le rôle de l'engagement parental dans la décision des policiers est celle de Doob qui a constaté que, lorsqu'un parent était la victime ou le plaignant, l'adolescent était plus susceptible d'être accusé. En effet, on estimait que le fait de porter plainte indiquait qu'un élément traditionnel du processus de socialisation, la famille, avait échoué (1983 : 158 à 160).

Aux entrevues, les policiers interprétaient généralement notre question sur l'engagement parentale comme un engagement « positif », c'est-à-dire l'intérêt manifesté envers la démarche et l'appui donné aux jeunes. Cependant, certains policiers ont affirmé spontanément qu'il est parfois plus compliqué de traiter avec les parents qu'avec l'adolescent. La figure V.17 illustre la répartition de l'opinion des policiers sur l'importance de l'engagement des parents dans la décision.

Figure V.17: Incidence de l'implication des parents dans la décision des policiers

Figure V.17: Incidence de l'implication des parents dans la décision des policiers - Si vous ne pouvez visualisez ce graphique, veuillez communiquer avec la Section de la politique en matière de justice applicable aux jeunes à Youth-Jeunes@justice.gc.ca pour obtenir un autre format approprié.

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Presque tous nos répondants tiennent compte du niveau d'engagement parental en prenant leur décision et près de la moitié estiment qu'il s'agit d'un facteur ou d'un facteur important. Plusieurs ont indiqué qu'ils étaient plus portés à envisager des mesures de rechange si « les parents collaboraient. » De même, ces policiers étaient beaucoup plus portés à libérer l'adolescent en vertu d'un avis de comparaître ou d'une sommation lorsqu'ils étaient d'avis que les parents étaient très engagés. Si l'infraction était plus grave, plutôt que de détenir l'adolescent jusqu'à l'enquête de mise en liberté provisoire par voie judiciaire, ils remettaient l'adolescent en liberté en vertu d'une promesse de comparaître (avec ou sans engagement personnel).

Par ailleurs, on a cité quelques exemples où l'attitude des parents pouvait avoir une incidence négative sur la décision. Si, après l'arrestation de l'adolescent, ses parents

  1. ne voulaient pas s'en occuper ou
  2. minimisaient la gravité de la situation ou
  3. niaient que leur enfant avait commis un crime,

les policiers étaient alors plus enclins à porter une accusation et, si les circonstances l'exigeaient, à libérer l'adolescent en vertu de conditions exigeantes ou à le garder en détention jusqu'à l'enquête de mise en liberté provisoire par voie judiciaire.

La figure V.18 illustre les variations régionales sur la question de l'importance accordée par les policiers à l'engagement parental. Au Québec, la grande importance attachée à l'engagement parental témoigne peut-être de l'approche davantage axée sur le bien-être de l'enfant dans cette province.

Figure V.18 Répartition régionale des opinions sur l'incidence de l'implication parentale dans la décision

Figure V.18 Répartition régionale des opinions sur l'incidence de l'implication parentale dans la décision - Si vous ne pouvez visualisez ce graphique, veuillez communiquer avec la Section de la politique en matière de justice applicable aux jeunes à Youth-Jeunes@justice.gc.ca pour obtenir un autre format approprié.

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Les policiers œuvrant dans des collectivités ayant « beaucoup » de criminalité chez les adolescents étaient plus susceptibles de tenir compte de l'engagement parental. Ainsi, 69 p. 100 d'entre eux ont dit qu'il s'agissait d'un facteur ou d'un facteur important dans leur décision, comparativement à 38 p. 100 de ceux des collectivités présentant un « niveau normal » de criminalité adolescente et à 33 p. 100 dans les collectivités présentant « peu » de criminalité De même, les policiers des collectivités ayant un problème de crimes violents graves chez les adolescents sont plus susceptibles de considérer l'engagement parental comme un facteur ou un facteur important (60 p. 100 comparativement à 44 p. 100 des autres policiers) que ne le sont ceux des collectivités ayant un problème de gangs d'adolescents (58 p. 100 par rapport à 45 p. 100), de crimes liés à la drogue chez les adolescents (53 p. 100 comparativement à 40 p. 100) et, surtout, de prostitution juvénile (78 p. 100 comparativement à 46 p. 100).

La seule autre différence systémique dans les réponses à cette question était sexospécifique, les policières étant plus portées (60 p. 100) que les policiers (45 p. 100) à intégrer l'engagement parental dans leur décision.