L'étude dans de nombreux sites sur les victimes de la criminalité et les professionnels de la justice pénale partout au Canada : Rapport sommaire du sondage, répondants « Avocats de la défense »

Conclusions du sondage auprès des avocats de la défense (suite)

Conclusions du sondage auprès des avocats de la défense

4. Déclarations de la victime

Les déclarations des victimes (DV) sont des énoncés écrits dans lesquels les victimes peuvent décrire l'effet du crime sur elles et le tort ou la perte attribuable au crime. Les modifications de 1999 du Code criminel permettent aux victimes de lire de vive voix leur déclaration au moment de la détermination de la peine; exigent que le juge demande avant la détermination de la peine si la victime a été informée de la possibilité de rédiger une DV; permettent au juge de suspendre la détermination de la peine afin de donner à la victime le temps de rédiger une déclaration.

Les victimes d'un crime peuvent soumettre leur déclaration à la détermination de la peine et à la libération conditionnelle. À la libération conditionnelle, la victime peut miser sur sa déclaration de la détermination de la peine et/ou présenter une autre déclaration de la victime à la commission des libérations conditionnelles. Nous offrons ci-dessous des idées sur les déclarations de la victime au moment de la détermination de la peine.

À la détermination de la peine

Fréquence des présentations

Il a été demandé aux répondants du sondage si, compte tenu de leur expérience, les victimes présentent généralement au tribunal une déclaration de la victime. Le Tableau 10 contient les réponses des répondants à cette question.

TABLEAU 10 : EST-CE QUE LES VICTIMES PRÉSENTENT HABITUELLEMENT DES DÉCLARATIONS DE LA VICTIME À LA DÉTERMINATION DE LA PEINE ? BASE : RÉPONDANTS QUI ONT RÉPONDU (SONT EXCLUS CEUX QUI NE SAVAIENT PAS OU N'ONT PAS RÉPONDU).

Les avocats de la défense sont divisés en ce qui concerne la fréquence de la présentation des déclarations de la victime. Quarante-cinq pour cent des avocats de la défense croient que les victimes ne présentent généralement une déclaration de la victime que dans les cas graves tels qu'une agression sexuelle, d'autres infractions avec violence et certaines infractions contre les biens. Quelque 40 % croient que des déclarations de la victime sont présentées dans la plupart des cas, et environ un cinquième des répondants a dit que, d'après leur expérience, les victimes ne présentent habituellement pas de déclaration de la victime, quelle que soit la gravité de l'infraction.

Présentation d'information relative aux déclarations de la victime

L'offre aux victimes d'information sur les déclarations est reliée à la question de la présentation de déclarations de la victime. Si la sensibilisation est faible, les taux de présentation le seront également. Pendant les entrevues, quelques avocats de la défense ont demandé si les professionnels de la justice pénale assument pleinement leur rôle en matière de déclarations de la victime lorsqu'ils discutent la présentation de ces déclarations.

En revanche, quelques avocats de la défense qui ont été interviewés attribuent le taux de présentation au manque de diligence des procureurs de la Couronne. Selon ces avocats de la défense, les procureurs de la Couronne ne s'efforcent pas d'obtenir les déclarations de la victime ou bien ils reçoivent les déclarations, mais ne les présentent pas au tribunal. La perception chez ces avocats de la défense est que les procureurs de la Couronne croient qu'ils peuvent plus efficacement servir les intérêts de la victime à la détermination de la peine ou que la déclaration de la victime est redondante parce que le juge a déjà entendu le témoignage de la victime. Des déclarations de procureurs de la Couronne à un emplacement confirment cette perception; ils ont affirmé ne pas toujours présenter au tribunal la déclaration de la victime et, plutôt, racontent tout simplement au tribunal ce que la victime a subi. [2]

Méthode de présentation

Des 180 répondants avocats de la défense ayant assez d'expérience pour répondre, près de 80 % ont été d'accord pour dire que les déclarations de la victime sont habituellement présentées par écrit seulement. À peu près un cinquième des répondants du sondage a déclaré que les procureurs de la Couronne lisent la déclaration. Deux pour cent des avocats de la défense croient que la victime lit sa déclaration. Le Tableau 11 contient les résultats du sondage, provenant des répondants qui ont été capables de répondre à cette question.

TABLEAU 11 : QUELLES SONT LES MÉTHODES LES PLUS HABITUELLES DE PRÉSENTER UNE DÉCLARATION DE LA VICTIME À LA DÉTERMINATION DE LA PEINE ? BASE : RÉPONDANTS QUI ONT RÉPONDU (SONT EXCLUS CEUX QUI NE SAVAIENT PAS OU N'ONT PAS RÉPONDU).
  Services d'aide aux victimes (n=194) Procureurs de la Couronne (n=184) Avocats de la défense (n=180) Magistrature (n=108)
Déclaration écrite seulement 82% 90% 79% 87%
La victime lit la déclaration 18% 5% 2% 7%
Le procureur de la Couronne lit la déclaration 16% 21% 18% 16%
Autre 2% 3% 4% --

Note : Les répondants pouvaient fournir plus d'une réponse; les sommes totalisent donc plus de 100 %.

Contre-interrogation de la victime

L'avocat de la défense peut contre-interroger la victime au sujet de sa déclaration de la victime, et ce, pendant le procès (si la déclaration est reçue avant un verdict de culpabilité) et à la détermination de la peine. Les résultats du sondage du Tableau 12 révèlent qu'environ un cinquième des avocats de la défense a eu affaire à un cas où la victime a été contre-interrogée à propos de sa déclaration de la victime lors du procès ou de la détermination de la peine. À certains endroits, la possibilité de contre-interroger la victime au sujet de la déclaration de la victime lors du procès est prévue parce que le procureur de la Couronne, le tribunal et l'avocat de la défense ne reçoivent la déclaration qu'après un verdict de culpabilité.

TABLEAU 12 : AVEZ-VOUS DÉJÀ EU UNE CAUSE OÙ L'AVOCAT DE LA DÉFENSE OU L'ACCUSÉ A CONTRE-INTERROGÉ LA VICTIME RELATIVEMENT À SA DÉCLARATION DE LA VICTIME?

Au procès
  Procureurs de la Couronne (N=188) Avocats de la défense (N=185) Magistrature (N=110)
Oui 24% 20% 12%
Non 71% 71% 80%
Ne sait pas 3% 4% 3%
Pas de réponse 3% 5% 6%

À la détermination de la peine
  Procureurs de la Couronne (N=188) Avocats de la défense (N=185) Magistrature (N=110)
Oui 26% 23% 10%
Non 65% 70% 80%
Ne sait pas 6% 3% 5%
Pas de réponse 3% 5% 6%

Note : Les répondants ne pouvaient donner qu'une seule réponse. Certaines sommes totalisent plus de 100% parce que les chiffres ont été arrondis.

Lors des entrevues, les procureurs de la Couronne ont fait remarquer qu'un contre-interrogatoire relatif à la déclaration de la victime est assez rare. Il y en a un parce que le contenu de la déclaration diffère de la preuve présentée pendant le procès ou si l'avocat de la défense doute des réclamations d'une victime au sujet d'effets ou de blessures de longue durée. Les avocats de la défense et les juges étaient d'accord. Les quelques avocats de la défense ayant rapporté un contre-interrogatoire de la victime ont dit l'avoir fait pour contester du matériel non pertinent (p. ex., le passé de l'accusé, sans rapport avec la cause) ou pour tester la crédibilité de la victime, en partie à cause d'incohérences entre la déclaration de la victime et les dires antérieurs de celle-ci.

Pendant les entrevues, les avocats de la défense ont dit que si le contre-interrogatoire de la victime est si peu fréquent c'est parce qu'il y a ordinairement entente pour supprimer l'information nuisible ou d'autre matériel inadmissible, avant de présenter au tribunal la déclaration de la victime. Plusieurs avocats de la défense ont également dit se fier au juge pour intervenir ou pour refuser la déclaration de la victime ou pour ne tenir aucun compte des sections non pertinentes. Quelques avocats de la défense ont mentionné que, bien qu'ils n'aient pas contre-interrogé la victime au sujet de sa déclaration, ils ont contesté la déclaration de la victime à la détermination de la peine ainsi que ses réclamations.

Obstacles des déclarations de la victime

Dans les questionnaires il a été demandé ceci aux avocats de la défense : " Y a-t-il des obstacles s'opposant à l'utilisation de la déclaration de la victime? " La plupart des avocats de la défense (80 %) ont rapporté des problèmes avec les déclarations de la victime. Dans le Tableau 13 ci-dessous sont affichés les résultats de tous les répondants concernés.

TABLEAU 13 : Y A-T-IL DES OBSTACLES S'OPPOSANT À L'UTILISATION DE LA DÉCLARATION DE LA VICTIME?
  Services d'aide aux victimes (N=318) Procureurs de la Couronne (N=188) Avocats de la défense (N=185) Police (N=686)
Oui 30% 48% 80% 19%
Non 22% 43% 14% 45%
Ne sait pas 43% 6% 6% 36%
Pas de réponse 5% 3% 1% 1%

Note : Les répondants pouvaient fournir plus d'une réponse; les sommes totalisent donc plus de 100 %.

Interrogés sur les raisons pour lesquelles ils croient qu'il y a des obstacles ou des problèmes pour l'utilisation des déclarations de la victime, les avocats de la défense ont indiqué que le plus grand obstacle ou problème est l'inclusion de matériel non pertinent (80 %). Le Tableau 14 contient les principales raisons de tous les groupes de répondants; les résultats sont traités de façon plus détaillée.

Lors des entrevues, plusieurs avocats de la défense ont fait observer que, au lieu de se limiter à une description des répercussions du crime, fréquemment, les victimes présentent une énumération des faits de la cause, font référence à la participation présumée du délinquant à d'autres activités criminelles ou bien font connaître leur point de vue sur la détermination de la peine. Dans leurs réponses à ce sondage, les avocats de la défense ont aussi mentionné plusieurs autres inquiétudes entourant l'information contenue dans les déclarations de la victime. D'après un cinquième des avocats de la défense, les déclarations de la victime peuvent contenir des demandes outrageuses qui introduisent un parti pris dans le processus (18 %). Un dixième des avocats de la défense a aussi fait remarquer que les déclarations de la victime contiennent parfois de nouveaux renseignements ou de l'information contredisant la preuve présentée devant le tribunal.

TABLEAU 14 : OBSTACLES OU PROBLÈMES RELATIFS AUX DÉCLARATIONS DE LA VICTIME. BASE : RÉPONDANTS QUI CROIENT QU'IL Y A DES OBSTACLES OU PROBLÈMES LIÉS AUX DÉCLARATIONS DE LA VICTIME.

Un problème relié à l'inclusion d'information non pertinente est le besoin de divulguer la déclaration de la victime à l'avocat de la défense. Cela soulève la possibilité que l'avocat de la défense ait des objections pour la déclaration de la victime ou opte pour une contre-interrogation relative à la déclaration de la victime, que ce soit au procès ou bien à la détermination de la peine. Pour les procureurs de la Couronne (18 %), les fournisseurs de services d'aides aux victimes (16 %) et la police (21 %), il y avait là un obstacle majeur portant les victimes ou les procureurs de la Couronne à ne pas présenter de déclarations de la victime. Aux entrevues, les procureurs de la Couronne ont dit que la déclaration de la victime peut nuire à la cause du procureur de la Couronne; la victime peut alors devenir plus vulnérable et la défense peut être renforcée.

Les avocats de la défense ne s'opposent pas au recours aux déclarations de la victime. Ils ont plutôt dit avoir l'impression d'être limités dans les mesures pouvant être prises parce que la contestation des déclarations de la victime est perçue si négativement.

Quelques avocats de la défense ont fait remarquer à leur entrevue que certaines victimes ne semblent pas comprendre la raison d'être des déclarations de la victime. Ils attribuent cela au manque d'aide pour expliquer et pour examiner les déclarations. Parmi les autres difficultés, selon les avocats de la défense, il y a le fait que les déclarations de la victime peuvent faire dévier les juges par rapport aux directives de la détermination de la peine (14 %); ajoutent des émotions inappropriées dans l'administration de la justice pénale (13 %); sont difficiles à contester (10 %).


[2] La procédure de la déclaration de la victime est régie par un programme désigné provincial, et elle varie d'une province à l'autre.