Recueil des recherches sur les victimes d'actes criminels, no 4

Victimisation et consommation d'alcool ou de drogues : perspectives issues de la pratique

Les ouvrages récents sont nombreux à établir un lien positif entre la victimisation et la consommation d'alcool ou de drogues. Selon l'une des principales hypothèses avancées pour expliquer cette relation, la toxicomanie constitue une stratégie d'adaptation permettant de composer avec l'inconfort physique et émotionnel entraîné par le traumatisme de la victimisation (Danielson et coll., 2006; Office for Victims of Crime, 2005). Cette stratégie s'entend de la consommation de substances dans le but [Traduction] « d'éviter, de fuir ou d'oublier la profonde détresse provoquée par les souvenirs de l'acte traumatisant » (Danielson et coll., 2006, p. 2). La recherche révèle que les traumatismes associés à la victimisation contribuent à accroître la vulnérabilité à la fois aux problèmes de santé mentale et à la consommation abusive d'alcool ou de drogues (Jacobsen et coll., 2001; Logan et coll. 2002). Ce comportement est également associé à une multitude de risques concomitants pour la santé et la sécurité des victimes. Ces risques peuvent comprendre les conflits avec la loi, l'exposition aux maladies transmissibles, les relations malsaines et violentes, l'automutilation, la perturbation des études ou de la vie professionnelle et l'itinérance. Par conséquent, la consommation abusive d'alcool ou de drogues chez les victimes peut aussi faire augmenter la vulnérabilité potentielle à d'autres risques et à la victimisation.

En janvier 2008, la Direction des services aux victimes du ministère de la Sécurité publique du Nouveau‑Brunswick a entrepris une étude de recherche portant sur les pratiques exemplaires en matière de soutien et d'intervention auprès des victimes d'actes criminels qui présentent un problème de consommation d'alcool ou de drogues. L'étude comportait cinq phases. L'une d'elles consistait en une série d'entretiens avec des intervenants clés, à savoir des professionnels de la santé et des spécialistes des traitements ayant une connaissance approfondie et une vaste expérience de l'élaboration et de la prestation de services d'intervention auprès des victimes d'actes criminels aux prises avec un problème de consommation d'alcool ou de drogues.

Méthodologie

Les intervenants clés ont été sélectionnés en consultation avec les membres du comité consultatif de projet et de l'équipe de recherche. Ces intervenants clés ont ensuite été joints et informés du but de l'initiative et de leur participation éventuelle à ce volet du projet. Des entretiens individuels ont été organisés avec ceux qui ont accepté de participer. Les intervenants interrogés avaient en moyenne 17 années d'expérience de travail direct ou d'expérience clinique avec une clientèle composée, entre autres, de victimes ayant un problème de consommation d'alcool ou de drogues. Au total, 18 intervenants clés ont été interrogés dans les régions du Pacifique, de l'Est, du Centre et de l'Ouest du Canada.

Le guide d'entretien semi‑structuré comprenait une série de questions ouvertes et de questions ciblées visant à recueillir des données essentielles en vue de mieux comprendre le profil des besoins des victimes d'actes criminels ayant un problème de consommation d'alcool ou de drogues et les stratégies de traitement à leur intention. Voici certains des thèmes abordés lors des entretiens :

Les réponses des intervenants clés ont été mises en commun et organisées en fonction de chacun des thèmes. Un examen du contenu des réponses a permis de faire ressortir les principaux thèmes et de les analyser. Pour être inclus, chaque thème devait être abordé par au moins trois intervenants.

Situation et sexe des clients à l'étude

Situation des victimes aux prises avec des problèmes de consommation d'alcool ou de drogues

Risques et conséquences.

Les intervenants clés ont été invités à décrire les situations particulières dans lesquelles se retrouvent les victimes d'actes criminels ayant un problème de consommation d'alcool ou de drogues. Tous les intervenants ont indiqué que les expériences de victimisation provoquaient un traumatisme sur le coup et laissaient des séquelles par la suite. Ils ont constaté que, dans bon nombre de cas, les victimes tentent de surmonter le traumatisme en recourant à l'alcool ou à d'autres drogues et développent un problème de consommation.

Les intervenants clés ont fait remarquer que les traumatismes peuvent être accompagnés d'un sentiment de honte ou entraîner la stigmatisation sociale. C'est cette stigmatisation sociale qui fait augmenter les risques d'apparition ou d'aggravation d'un problème de consommation d'alcool ou de drogues. La crainte des répercussions possibles du problème de consommation peut également amplifier la détresse psychologique des clients. Voici quelques‑unes des répercussions possibles :

Il a également été constaté que les clients aux prises avec une consommation problématique continue d'alcool ou de drogues couraient plus de risques d'être de nouveau victimes d'un acte de violence. À cet égard, les clients qui avaient déjà eu une expérience de victimisation et un problème de consommation d'alcool ou de drogues au sein de leur foyer ou famille risquaient le plus d'être victimes d'actes de violence répétés.

Facteurs liés au système

Les intervenants clés ont également rapporté que les victimes d'actes criminels n'ont peut-être pas une connaissance suffisante des services de traitement des problèmes de consommation d'alcool ou de drogues. Quelques intervenants ont avancé que les clients qui ont reçu des services inadéquats de la part des fournisseurs pourraient se méfier des systèmes de services structurés. Par exemple, en vertu de certains protocoles de service, des clients pourraient être inadmissibles aux services de counselling en santé mentale à la suite d'un traumatisme parce qu'ils n'auraient pas été préalablement traités pour leur problème de consommation d'alcool ou de drogues.L'inverse est aussi possible, à savoir que des fournisseurs de soins aux toxicomanes peuvent exiger que les clients traitent d'abord leurs problèmes de santé mentale avant de recevoir un traitement pour leur problème de consommation. Parmi les autres obstacles du système, mentionnons les longs délais d'attente et les processus d'admission multiples ou complexes.

Facteurs personnels et familiaux

En plus des facteurs liés au système, une foule de facteurs personnels peuvent limiter ou entraver l'accès des victimes d'actes criminels aux services dont elles ont besoin. Ces facteurs peuvent comprendre les responsabilités parentales, les horaires de travail fixes, les ressources financières insuffisantes ne permettant pas l'absence du travail et le manque de moyens de transport. Ces facteurs personnels peuvent également s'accompagner de facteurs de stress interpersonnels ou familiaux lorsque les membres de la famille n'appuient pas les clients dans leur quête de soutien ou de traitement. Les intervenants ont fait valoir que de telles dynamiques familiales s'observent surtout lorsque l'expérience de victimisation est survenue en contexte familial ou lorsque les membres de la famille comprennent mal le processus de rétablissement ou le lien entre le problème de consommation et le traumatisme vécu par la victime. Dans d'autres cas, ce sont les valeurs culturelles de la famille qui peuvent dissuader la victime de parler de son expérience ou d'aller chercher de l'aide à l'extérieur du cercle familial. En région rurale, les familles des petites collectivités peuvent également se montrer réticentes à révéler des problèmes de victimisation ou de consommation d'alcool ou de drogues, craignant que le respect de leur vie privée et du caractère confidentiel de ces révélations ne soit pas assuré.

Besoins et différences en fonction du sexe

Les intervenants clés ont été invités à décrire les expériences et les besoins des victimes, femmes et hommes, aux prises avec un problème de consommation d'alcool ou de drogues. Les intervenants ont rapporté qu'il incombait souvent aux femmes d'assumer les responsabilités familiales et de prodiguer des soins. Par exemple, il arrive que les femmes doivent faire garder leurs enfants pour se rendre à un rendez‑vous chez le médecin ou pour aller suivre un traitement.

Les intervenants clés ont souligné le fait que, dans bien des cas, les femmes sont seules ou ne bénéficient d'aucun soutien social qui pourrait les aider à surmonter les difficultés concomitantes liées à la famille ou aux traitements. Cette réalité s'observerait plus particulièrement dans les contextes sociaux et culturels où les femmes qui consomment de l'alcool ou d'autres drogues sont ouvertement désapprouvées ou stigmatisées. Selon divers intervenants, en raison de la stigmatisation perçue des femmes, celles‑ci pourraient être moins enclines à exprimer certains problèmes personnels ou à rechercher activement du soutien ou des traitements. Il a aussi été mentionné que les femmes seraient à risque de nouer des relations malsaines dans le cadre de traitements qui comprennent des clients hommes et femmes.

Les femmes comme les hommes fragilisés par le traumatisme de la victimisation pourraient être portés à garder pour eux‑mêmes leurs problèmes de consommation abusive d'alcool ou de drogues. Les hommes ont été décrits comme particulièrement réticents à relater leurs expériences de victimisation. Selon l'un des intervenants, ce sont les perceptions de faiblesse, de vulnérabilité ou l'idée selon laquelle « les hommes devraient être capables de se protéger eux‑mêmes » qui rendraient ceux‑ci réticents à révéler leurs expériences traumatisantes (p. ex. les agressions sexuelles). D'autres ont fait remarquer que les incidents criminels subis par les hommes étaient généralement plus violents, et que les jeunes hommes sont souvent surreprésentés dans les populations d'hommes victimes d'actes criminels. Dans l'ensemble, les intervenants clés ont confirmé qu'il fallait pousser les recherches et les enquêtes sur les besoins des victimes de sexe masculin potentiellement aux prises avec un problème de consommation d'alcool ou de drogues.

Intervention précoce

Selon les intervenants clés, les interventions précoces sont des mesures prises ou des interventions faites auprès de personnes qui risquent de se livrer à des comportements nuisibles, ou qui s'y livrent déjà. L'intervention précoce auprès des victimes d'actes criminels aux prises avec un problème d'abus d'alcool ou de drogues a été jugée essentielle pour freiner l'évolution et l'aggravation des habitudes de consommation. Les intervenants considéraient ces interventions comme bénéfiques, car elles éliminent ou réduisent les divers facteurs de risque (problèmes de sécurité, revictimisation, etc.) et elles préviennent ou atténuent les conséquences psychosociales du problème de consommation (conflits avec la loi, perte du soutien social, dégradation des relations familiales, pauvreté).

Dépistage

Le repérage ou le dépistage précoce du problème de consommation d'alcool ou de drogues était considéré comme un aspect essentiel de l'intervention auprès des victimes d'actes criminels. La majorité des intervenants clés ont insisté sur l'importance de dépister les problèmes de consommation tôt dans le processus d'admission des victimes. Ceux qui emploient actuellement des méthodes de dépistage ont mentionné des méthodes structurées et non structurées. Pour ce qui est des mesures standardisées, des intervenants ont dit utiliser actuellement les questionnaires CAGE, MAST, DAST et OQ45Note de bas de la page 1.

En ce qui concerne les méthodes de dépistage non structurées, les intervenants clés ont mentionné l'utilisation d'approches axées sur la conversation ou sur le récit pour déceler les problèmes potentiels de consommation d'alcool ou de drogues. Dans le cadre de telles approches, une conversation portant sur les mesures prises actuellement ou antérieurement par la victime pour se rétablir ou obtenir du soutien était souvent le prélude à des questions précises au sujet de l'abus d'alcool ou de drogues. Par ailleurs, l'un des intervenants clés a mentionné l'utilisation d'une approche narrative semi‑structurée au moyen de « schémas » permettant de déterminer comment le client perçoit ses besoins et sa situation. Les méthodes de dépistage non structurées axées sur la conversation étaient considérées comme bénéfiques en ce qu'elles contribuaient fortement à faire diminuer l'anxiété des clients et à créer un environnement propice à l'établissement d'une relation de collaboration. Comme l'un des intervenants clés l'a fait remarquer, dans le cadre d'approches axées sur la conversation, il faut bien s'assurer que l'entretien ne prend pas l'allure d'un questionnaire de dépistage.

Les intervenants clés ont énuméré un certain nombre de questions à aborder qui pourraient être intégrées aux processus de dépistage structurés ou non structurés. Elles permettraient de déceler les problèmes potentiels d'abus d'alcool ou de drogues. Les questions pourraient entre autres porter sur les thèmes suivants :

Le fait d'aborder ces sujets avec les clients pourrait amener à leur poser des questions plus précises sur la consommation d'alcool ou de drogues aux fins de dépistage, le cas échéant. Ces questions ou discussions pourraient porter sur la sensibilisation aux problèmes potentiels d'abus d'alcool ou de drogues, sur les habitudes de consommation, sur les intentions de consommation dans l'avenir et sur la disposition à recevoir du soutien ou à suivre un traitement.

Les intervenants clés ont fait ressortir le fait que les méthodes de dépistage pourraient être intégrées dans les processus d'admission ou d'évaluation existants. D'autres ont indiqué que le dépistage de la consommation d'alcool ou de drogues pourrait aussi être inclus dans les protocoles de dépistage ou d'évaluation des victimes. Les intervenants clés ont souligné à quel point il était important que les personnes chargées d'appliquer les méthodes de dépistage structurées ou non structurées tiennent compte de la situation et des besoins particuliers de chaque victime et évitent de porter tout jugement. Quelques intervenants se sont dits préoccupés par la possibilité que les renseignements recueillis au cours de tels processus soient utilisés pour empêcher des clients d'avoir accès à certains services essentiels. À cet égard, ils ont affirmé que les renseignements sur les clients ne devraient servir qu'à planifier des stratégies de traitement appropriées et à faciliter l'accès des clients aux services nécessaires.

Intervention de soutien précoce et capacité d'intervention des fournisseurs de services

Les intervenants clés ont souligné que les victimes d'actes criminels aux prises avec un problème de consommation d'alcool ou de drogues peuvent se tourner vers divers professionnels et fournisseurs de services communautaires pour satisfaire nombre de leurs besoins personnels et fondamentaux. Pour les intervenants sollicités, ces interactions sont l'occasion de déceler chez les clients des problèmes liés à la victimisation ou à l'abus d'alcool ou de drogues. Elles permettent également de diriger les clients vers les sources d'aide ou les traitements appropriés. Voici quelques personnes‑ressources vers lesquelles les fournisseurs de services pourraient orienter les clients :

Les intervenants clés ont fait ressortir que la rencontre entre les clients et les professionnels aidants devait idéalement se faire dans un cadre sécurisant, où les clients pouvaient parler librement de la victimisation ou encore de l'abus d'alcool ou de drogues. Les locaux administratifs, les délais d'attente ou les distractions fréquentes causées par l'activité ambiante (les entrées et les sorties) incitaient moins les clients à faire part de leurs problèmes graves.

Les intervenants clés ont aussi été invités à nommer les connaissances, les attitudes et les compétences que devrait posséder tout aidant amené à effectuer des interventions précoces auprès de victimes ayant des problèmes de consommation d'alcool ou de drogues. Voici quelques‑unes des compétences professionnelles citées par les intervenants :

Au sujet des compétences susmentionnées, il serait pertinent, selon les intervenants, de donner aux fournisseurs de services communautaires une formation ciblée leur permettant de mieux répondre aux besoins des victimes pouvant présenter des problèmes de consommation d'alcool ou de drogues. Les éléments suivants pourraient être intégrés aux séances de formation ou d'orientation :

En ce qui concerne les interventions et les méthodes de dépistage précoces, plusieurs intervenants clés ont fait valoir qu'il serait utile d'adopter des protocoles communs facilitant la collaboration entre les professionnels offrant des services de soutien à l'échelle locale et régionale. D'autres ont suggéré l'utilisation de méthodes ou de questions de dépistage communes à tous les fournisseurs de services communautaires.

Principaux rôles en matière de services d'intervention

Les intervenants clés ont également décrit les rôles que diverses personnes pourraient jouer pour soutenir les interventions précoces auprès des victimes ayant un problème de consommation d'alcool ou de drogues. Ils ont attiré l'attention sur les contributions que pourraient apporter les membres de la famille, le personnel des services d'aide aux victimes et les thérapeutes en santé mentale et en toxicomanie.

Membres de la famille

Selon les intervenants clés, les membres de la famille peuvent prodiguer un soutien précieux et continu aux clients qui entreprennent des démarches pour obtenir des services et suivre des traitements. Les membres de la famille peuvent appuyer concrètement la victime en l'aidant à satisfaire ses besoins essentiels ou ses besoins de transport ou encore en l'écoutant sans la juger ni lui faire de reproches.

Il a aussi été admis que les dynamiques à l'œuvre dans les divers contextes familiaux ne sont pas toutes propices à l'accroissement du bien‑être des clients et qu'elles peuvent décourager la participation à un traitement. De telles situations peuvent être particulièrement évidentes dans les familles ou les foyers où la sécurité du client est menacée (p. ex. en cas de violence conjugale) ou lorsqu'un des proches ou le conjoint souffre d'un problème de consommation d'alcool ou de drogues. Dans ces cas-là, il peut être nécessaire de modifier les relations ou les interactions familiales pour que les clients réalisent des changements positifs et durables.

Coordonnateurs et fournisseurs de services aux victimes

Les intervenants clés ont insisté sur le fait que les fournisseurs de services aux victimes doivent bien connaître les ressources communautaires et les processus d'aiguillage de façon à ce que les clients puissent obtenir les services ou les traitements nécessaires. Ces fournisseurs sont principalement chargés d'évaluer les besoins des clients et de veiller à ce que ceux‑ci aient accès aux services de soutien essentiels. Pour ce faire, ils doivent coordonner l'aiguillage, collaborer avec les fournisseurs de services communautaires, mettre les clients en contact avec des personnes‑ressources et organiser des séances de suivi.

Les intervenants clés ont fait ressortir qu'il pourrait être utile aux fournisseurs de services aux victimes d'assister à des séances éducatives portant sur le lien entre la victimisation et la consommation d'alcool ou de drogues. La sélection de questions de dépistage de la consommation d'alcool ou de drogues a été considérée comme une avenue à explorer dans l'avenir et comme un thème de formation possible pour les fournisseurs de services aux victimes. L'intégration de questions aux processus de dépistage existants a soulevé quelques préoccupations, tout comme la possibilité que ces demandes de renseignements nuisent à l'établissement d'une relation de collaboration avec les clients. D'autres intervenants clés ont parlé des avantages qu'il y avait à sonder les préoccupations par rapport au problème de consommation d'alcool ou de drogues au moyen de discussions informelles avec les clients sur leurs méthodes d'adaptation actuelles et passées.

Fournisseurs de services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie

Les cliniciens en santé mentale et les intervenants en toxicomanie ont été désignés comme les principaux fournisseurs de traitements visant le rétablissement des victimes ayant un problème de consommation d'alcool ou de drogues. Selon les intervenants clés, les services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie sont d'une grande aide aux clients dans la mesure où ces derniers y ont accès rapidement et que les traitements soient coordonnés ou intégrés. Plusieurs intervenants soulignent à quel point il est important, dans la prestation de services de traitement, d'appliquer de façon concomitante les méthodes de traitement, les perspectives de réduction des préjudices et les interventions axées sur les forces. Les intervenants clés ont aussi fait valoir qu'il serait enrichissant pour les fournisseurs de services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie de suivre des séances éducatives portant sur le processus de rétablissement après la victimisation, sur la sécurité des clients et sur le lien entre les traumatismes et l'abus d'alcool ou de drogues.

D'autres intervenants clés ont fait ressortir le rôle consultatif que les professionnels en santé mentale et les intervenants en toxicomanie pourraient jouer auprès des professionnels de l'aide aux victimes et des fournisseurs de services communautaires dans la prestation de services de dépistage et de soutien aux victimes ayant un problème de consommation. À cet égard, ils ont souligné la nécessité d'accroître la collaboration et la planification conjointe des cas entre les fournisseurs offrant des services aux victimes d'actes criminels dans la collectivité.

Fournisseurs de services communautaires

Les victimes d'actes criminels ayant un problème de consommation d'alcool ou de drogues ont peut‑être d'autres impératifs liés à la santé, aux responsabilités familiales ou aux besoins fondamentaux. En plus des services aux victimes et des services de traitement, les intervenants clés ont reconnu l'importance du soutien communautaire prodigué par les groupes de bénévoles, les organismes religieux et les organismes non gouvernementaux locaux. Les intervenants ont cité un certain nombre de mesures de soutien importantes offertes par les fournisseurs de services communautaires, dont les suivantes :

Les intervenants clés ont insisté sur l'importance d'utiliser et de coordonner ces services d'une façon qui s'intègre au cadre de gestion structurée des cas ou aux plans de traitement des victimes ayant un problème de consommation d'alcool ou de drogues. Ils ont également indiqué que de tels services étaient souvent nécessaires pour assurer la participation du client et son assiduité aux programmes de traitement ou aux services.

Autre personnel du système de justice pénale

Parmi les autres intervenants du système de justice pénale qui pourraient interagir avec des victimes ayant un problème de consommation d'alcool ou de drogues, mentionnons les forces policières, les procureurs de la Couronne et les juges. Selon les intervenants clés, il serait utile que ces professionnels assistent à des séances de sensibilisation à divers sujets se rapportant à leur travail auprès des victimes, notamment l'expérience de victimisation, les méthodes d'intervention axées sur le soutien des clients et le lien entre le traumatisme et l'abus d'alcool ou de drogues.

Nouveaux services à envisager

Après avoir donné leur point de vue sur les besoins des clients et sur la prestation adéquate de services, les intervenants clés ont décrit un certain nombre de services qu'il serait avantageux d'améliorer ou de mettre sur pied au bénéfice des victimes ayant un problème de consommation d'alcool ou de drogues. Voici quelques‑unes des idées avancées.

Conception ou sélection d'un outil de dépistage de problèmes de consommation d'alcool ou de drogues

Idéalement, un tel instrument permettrait aux fournisseurs de services aux victimes de déceler l'existence d'un problème potentiel de consommation d'alcool ou de drogues chez les victimes d'actes criminels. L'outil de mesure pourrait comprendre l'administration d'une série de questions fondamentales qui seraient intégrées aux processus d'évaluation actuels des services communautaires ou des services aux victimes.

Séances de formation multidisciplinaires

La majorité des intervenants clés étaient d'avis qu'il serait profitable de dispenser des formations interprofessionnelles aux cliniciens et aux fournisseurs de services communautaires travaillant dans divers domaines et champs d'expertise. Les formations pourraient traiter, entre autres, de la nature de l'expérience de victimisation, de la typologie des victimes, de la sécurité et de l'adaptation du client, du processus de rétablissement et du lien entre le traumatisme et les problèmes de consommation d'alcool ou de drogues.

Adoption de protocoles de services communs

Dans chaque administration régionale, tout devrait être mis en œuvre pour assurer une planification coordonnée et intégrée de la gestion de cas. Avant toute chose, la mise sur pied de forums de sensibilisation à l'intention des divers fournisseurs de services en vue d'accroître la compréhension mutuelle de leurs rôles, mandats et services respectifs pourrait renforcer leur collaboration. Par la suite, il faudrait définir des stratégies communes d'admission, de dépistage, de partage de l'information et de prestation de services qui permettraient l'accès rapide des clients et de leur famille aux services de soutien et aux traitements appropriés.

Prochaines étapes

Le présent article résumait une partie de la recherche que la Direction des services aux victimes du ministère de la Sécurité publique du Nouveau‑Brunswick a entreprise pour étudier les pratiques exemplaires en matière de soutien et d'intervention auprès des victimes d'actes criminels ayant des problèmes de consommation d'alcool ou de drogues. La recherche comprenait cinq phases qui seront achevées d'ici mars 2011 :

L'espoir est que les conclusions tirées de cette recherche aideront le personnel des Services aux victimes ainsi que d'autres professionnels des services de santé et des services communautaires à élaborer des stratégies d'intervention auprès des victimes qui sauront répondre aux besoins.

Bibliographie