Lacunes relatives à la mise en liberté sous caution au Canada : comment y remédier?

2. La dynamique du problème

Bien que les sources (techniques) du problème soient apparemment faciles à cerner (c. à d. le fait que de plus en plus de personnes sont détenues par la police avant leur enquête sur le cautionnement jumelé à des périodes plus longues passées en détention préventive en attente d’une décision sur la mise en liberté sous caution ou l’issue de l’affaire criminelle), les éléments dynamiques qui animent ces réalités sont considérablement plus complexes et interdépendants. En bref, le système bancal de mise en liberté sous caution du Canada aurait surtout besoin d’un changement important de mentalité. Plus particulièrement, au cours des trois ou quatre dernières décennies, les Canadiens ont été témoins de la montée d’un climat culturel qui se caractérise principalement par l’aversion pour le risque et la gestion du risque. En termes généraux, le remplacement graduel de l’idéologie de l’État-providence par une philosophie néo libérale a exacerbé les préoccupations causées par les risques ou les dangers potentiels dans la société, ce qui provoque un malaise et la peur chez les citoyens (respectueux de la loi).

Dans le milieu de la justice pénale, l’État a dorénavant pour rôle de limiter autant que possible les risques pour la sécurité publique que représentent les contrevenants. Il n’est pas étonnant que cette mentalité d’aversion pour le risque ait imprégné le processus de la mise en liberté sous caution et s’est traduite par des efforts vigoureux pour éviter de libérer des personnes accusées qui pourraient par la suite commettre des crimes pendant qu’elles sont en liberté sous caution. Étant donné que nous n’avons pas encore réussi à mettre au point un moyen de distinguer, avec une certitude absolue, ceux qui vont en fait commettre une infraction après avoir été libérés sous caution, la culture d’aversion pour le risque dans le système de mise en liberté sous caution a créé, en pratique, une incitation généralisée pour tous les acteurs de la justice pénale à éviter, aussi longtemps que possible, de mettre en liberté quiconque présente une probabilité plus que non négligeable de commettre un crime. Sur le plan législatif, nous avons à toutes fins utiles abandonné le principal motif de détention, en vertu de l’article 515(10)(a) du Code criminel de 1985)Note de bas de page 1 qui est d’assurer la présence de l’accusé au tribunal, comme première préoccupation quand il s’agit de déterminer si une personne devrait être mise en liberté sous caution, et nous avons élevé les motifs secondaires, qui consistent à assurer la protection et la sécurité du public contre tout autre acte criminel que l’accusé pourrait perpétrer pendant qu’il se trouve en liberté sous caution, (en vertu de l'alinéa 515(10)b) du Code criminel de 1985)Note de bas de page 2 au rang d’élément central du processus décisionnel.

Plus important encore, ce changement de priorité a fait en sorte que les décideurs du milieu de la justice pénale ont commencé à conceptualiser toutes les décisions sur la mise en liberté en se souciant de la possibilité qu’ils aient raison (c. à d. l’accusé ne commet pas d’infraction criminelle pendant qu’il est en liberté) ou qu’ils aient tort (c. à d. l’accusé commet en fait un crime pendant qu’il se trouve au sein de la collectivité), au lieu de se préoccuper simplement de prendre la meilleure décision au moment opportun en tenant compte de l’information dont ils disposent. En termes plus généraux, les décisions au sujet de la mise en liberté et de la détention sont maintenant considérées comme le produit d’une personne en particulier qui, dans le cas d’un incident tragique, sera tenu personnellement responsable (autrement dit, blâmée). Par extension, la réduction individuelle et institutionnelle du risque est devenue une préoccupation primordiale.

En pratique, tous les principaux acteurs du processus décisionnel relatif à la mise en liberté sous caution paraissent avoir décidé « de ne prendre aucun risque », soit en s’opposant à la mise en liberté sous caution, soit en faisant en sorte que quelqu’un d’autre prenne la décision. En fait, dans notre société qui a une aversion pour le risque, tout décideur rationnel penchera en faveur de la détention ou, encore mieux, évitera de prendre quelque décision que ce soit en ce qui concerne la détention, précisément parce que les incitations à s’opposer à la mise en liberté ou à la retarder sont plus grandes que celles qui militent pour la mise en liberté. Quand le décideur envisage une remise en liberté, tous les coûts possibles d’une récidive de la part de la personne accusée (p. ex. la désapprobation et la critique, la mauvaise presse, la confiance réduite dans le système de justice pénale) sont publics de nature et peuvent facilement être imputés au décideur. Par contre, les avantages de la mise en liberté sont cachés (p. ex. soutenir la présomption d’innocence, réaliser des économies, permettre à l’accusé de conserver son emploi) et ne profitent pas au décideur. Dans cette situation, le décideur peut seulement « perdre » s’il accorde ou recommande la mise en liberté. Quand un décideur envisage de détenir un accusé, les coûts potentiels sont complètement cachés (p. ex. le contrevenant perd son emploi, son incarcération entraîne des frais), tandis que les avantages sont directs pour le décideur et peuvent lui être attribués.

En tant que décideurs de première ligne, les agents de police (l’agent qui procède à l’arrestation et l’agent responsable) sont de moins en moins susceptibles de mettre en liberté une personne accusée. Bien que la criminalité globale (et en particulier, les crimes violents) diminue depuis des décennies, la proportion des affaires devant les tribunaux criminels qui commencent par une enquête sur le cautionnement semblerait augmenter avec le temps. Autrement dit, les agents de police semblent de plus en plus enclins à envoyer un dossier au tribunal pour que la Couronne ou un officier de justice décide s’il convient de mettre l’accusé en liberté. En fait, les personnes accusées en Ontario étaient plus susceptibles de demeurer détenues en vue de l’enquête sur le cautionnement que d’être mises en liberté par la police sur une citation à comparaître après le dépôt d’accusations en 2007. Je soupçonne que l’une des raisons pour lesquelles les agents qui procèdent à des arrestations ne mettent pas beaucoup d’accusés en liberté, c’est qu’ils croient que pour assurer la protection du public, la personne accusée devrait être mise en liberté une fois que des conditions lui ont été imposées – un choix qui ne s’offre pas à l’agent qui procède à l’arrestation. Dans le même ordre d’idées, même si l’agent responsable au poste de police dispose en fait du pouvoir de mettre en liberté une personne accusée à certaines conditions, il peut détenir de nombreuses personnes en vue de leur enquête sur le cautionnement, parce qu’il croit qu’une garantie est « nécessaire » pour assurer la sécurité de leur mise en liberté – un choix qui ne s’offre par à l’agent responsable.

Notamment, il semblerait, du moins dans certains ressorts, que l’augmentation du nombre de personnes accusées qui sont renvoyées en détention préventive par la police avant de subir leur enquête sur cautionnement est en partie attribuable aux nombreux cas relativement mineurs. Alors que ces infractions mineures (voies de fait sans gravité, par exemple) auraient probablement été réglées sans formalités par la police dans le passé, leurs auteurs sont maintenant de plus en plus souvent renvoyés devant le tribunal, ce qui représente encore un autre moyen d’assurer une plus grande sécurité publique. En particulier dans les cas qui mettent en cause un accusé qui a un casier judiciaire ou qui a commis une infraction mineure pendant qu’il était assujetti à une forme quelconque de mandat judiciaire, la probabilité de mise en liberté par la police sur citation à comparaître ou sur engagement diminue radicalement. Dans le même ordre d’idées, il semblerait que la police porte également davantage d’accusations en général par dossier ainsi qu’un plus grand nombre de chefs relatifs à « l’administration de la justice » qu’auparavant. Dans les deux cas, la mise en liberté sous caution devient considérablement moins probable. Mais surtout, ces deux phénomènes sont interdépendants. Plus particulièrement, le nombre croissant de chefs d’accusation déposés à la cour, du moins en Ontario, est imputable dans une grande mesure aux accusations concernant « l’administration de la justice ».

L’évitement des risques a aussi imprégné nos tribunaux criminels. Cela devient le plus évident quand on constate qu’un plus grand nombre de dossiers de cautionnement sont traités qu’auparavant. Du moins en Ontario, les enquêtes sur le cautionnement pour déterminer si un accusé devrait être mis en liberté sous caution ou, subsidiairement, s’il devrait être détenu jusqu’à son procès prennent de plus en plus de temps et nécessitent davantage de comparutions. Même si on pourrait être tenté de présumer que le problème est imputable au surplus de travail des tribunaux, la cause immédiate de ces retards semble reposer principalement sur les épaules des avocats de la défense qui demandent des ajournements à répétition. Plus particulièrement, les ajournements semblent être la norme, plutôt que l’exception, dans le processus de la mise en liberté sous caution. En fait, c’est précisément la création et la perpétuation de cette « culture d’ajournements » qui facilitent (sinon qui encouragent) cette attitude d’aversion pour le risque chez les autres acteurs clés du processus de la mise en liberté sous caution. En particulier, étant donné que tout le monde s’attend à ce qu’un nombre important d’affaires soient ajournées au cours d’une journée normale d’audience de mise en liberté sous caution il est plus facile pour le juge ou le juge de paixNote de bas de page 3 ou pour la Couronne de simplement accepter ces demandes, car elles sont devenues inévitables ou même acceptables. Puisqu’elles rencontrent rarement de l’opposition, ces demandes permettent d’éviter tout simplement pour une autre journée de prendre une décision concernant la détermination du cautionnement d’une personne accusée (qui devient alors probablement le problème d’un autre procureur de la Couronne, juge ou juge de paix). Il en découle des séjours plus longs en détention. Pour ceux qui sont en fin de compte mis en liberté, les nombreuses comparutions supplémentaires devant le tribunal en attendant une décision sur le cautionnement se traduisent par des journées additionnelles de renvoi en détention. Pour ceux qui sont en fin de compte détenus jusqu’à leur procès, l’attente peut se calculer en mois. Même si les affaires dans lesquelles l’accusé est détenu ont en pratique la priorité sous forme d’un traitement judiciaire plus rapide, les longs délais de traitement des dossiers (c’est à dire l’inefficacité des tribunaux) représentent un problème croissant partout au Canada et font augmenter encore plus la durée de la détention des accusés à qui on a refusé la mise en liberté sous caution.

Toutefois, cette « culture d’ajournements » est seulement un aspect de la mentalité d’aversion pour le risque dans le cadre du processus de la mise en liberté sous caution. Premièrement, les Canadiens ont aussi été témoins de nombreuses modifications législatives qui agissent comme entraves ou obstacles supplémentaires à l’obtention de la mise en liberté sous caution. De toute évidence, le droit canadien en matière de mise en liberté sous caution a connu un changement en ce qui concerne le fardeau de la preuve (qui est passé du procureur de la Couronne à la personne accusée, laquelle doit démontrer pourquoi sa mise en liberté est justifiée) dans un nombre croissant de situations. Certes, pour les nombreux accusés qui ne sont pas représentés par un avocat et qui comparaissent dans le cadre d’une audience de mise en liberté sous caution, ce fardeau est particulièrement lourd. Mais il est aussi important pour notre étude de faire remarquer qu’une inversion du fardeau de la preuve a aussi été ajoutée dans le cas d’un accusé qui, pendant qu’il se trouve dans la collectivité après avoir été mis en liberté relativement à une autre infraction, est accusé d’une infraction relative à l’administration de la justice.

Deuxièmement, les Canadiens ont également été témoins d’une expansion législative des critères de la mise en liberté qui a elle aussi rendu plus difficile l’obtention de la mise en liberté sous caution. Plus précisément, le législateur a expressément ajouté un motif d’intérêt public (ne pas miner la confiance du public dans l’administration de la justice). Bien que ce motif tertiaire de détention ait le potentiel – particulièrement dans notre mentalité actuelle de lutte à la criminalité – d’accroître considérablement le nombre d’accusés détenus, étant donné que la justification de l’emprisonnement d’une personne qui n’a pas été déclarée coupable n’a rien à voir avec l’accusé, mais repose plutôt sur ce que des membres non concernés de la collectivité pensent de l’affaire, la plus récente décision de la Cour suprême du Canada précise que le critère est celui de la personne raisonnable qui comprend les principes qui sous-tendent la loi, La Charte canadienne des droits et libertésNote de bas de page 4 et l’affaire elle-même. Mais les changements apportés aux motifs primaire et secondaire par rapport au texte original de la Loi sur la réforme du cautionnement, L.C. 1970-71-72, ch. 37Note de bas de page 5 sont peut-être plus restrictifs. D’une part, même si ces deux motifs devaient à l’origine être pris en considération séparément, le fonctionnaire judiciaire peut actuellement décider de se servir d’une « combinaison » de critères ou, peut-être, d’un peu de chacun. D’autre part, même si le critère servant à déterminer la possibilité d’infractions futures est demeuré une « probabilité marquée » que l’accusé commettra une infraction criminelle, il se limitait auparavant aux infractions qui causaient un préjudice grave ou qui nuisaient à l’administration de la justice, mais il englobe maintenant toutes les infractions criminelles.

Troisièmement, la mise en liberté sous caution est devenue plus difficile à obtenir en raison du recours à des ordonnances de mise en liberté plus sévères. Même si les dispositions législatives prévoient clairement que l’accusé devrait être mis en liberté sous caution sans condition, sans élément monétaire ou sans garantie, à moins que la Couronne ne puisse prouver qu’un type de mise en liberté plus pénalisant est justifié, « l’approche progressive » sous-jacente a, dans bien des cas, été mise de côté au profit de formes de mise en liberté de plus en plus rigoureuses. Dans ce contexte, le recours aux garanties dans les cas de mise en liberté sous caution semble être devenu la norme, plutôt que l’exception, devant de nombreux tribunaux. En fait, les recherches récentes ont démontré que le recours aux garanties est non seulement la forme la plus courante d’ordonnance de mise en liberté chez les adultes, mais qu’elle l’est aussi chez les adolescents dans plusieurs ressorts. Particulièrement pour les populations les plus vulnérables (p. ex. les démunis, les Autochtones), cette condition de mise en liberté constitue souvent un empêchement permanent à la mise en liberté. Même pour les personnes qui peuvent avoir accès à une caution, le temps qu’il faut pour l’identifier, prendre contact avec elle et la convaincre d’agir comme caution ainsi que la pratique fréquente d’obliger la caution à se présenter au tribunal et à se plier à une entrevue de la part de la Couronne (même s’il n’existe aucune exigence officielle forçant une caution à comparaître ou à être interrogée devant le tribunal) se traduisent par un séjour prolongé en détention préventive avant que le processus de la mise en liberté sous caution soit terminé.

De plus, la nature pénalisante des ordonnances de mise en liberté actuelles va bien au-delà du recours fréquent aux garanties. En fait, bon nombre des formes de mise en liberté, y compris la « mise en liberté sous caution », imposent généralement des conditions à l’accusé une fois qu’il est mis en liberté dans la collectivité. Même si les mesures législatives originales de 1971 sur le cautionnement prévoyaient clairement que les conditions des mises en liberté sous caution devaient être envisagées avec retenue et devaient être les moins pénalisantes possibles, compte tenu des éléments coercitifs qui s’y rattachaient, la grande majorité des mises en liberté sont actuellement assorties de conditions. Fait à noter, cette réalité existe non seulement chez les adultes, mais aussi chez les adolescents. De plus, des recherches récentes ont démontré non seulement que les personnes accusées sont mises en liberté avec un nombre considérable de conditions, mais aussi qu’elles sont assujetties à des « dispositions fourre tout » qui les obligent à « observer telles autres conditions raisonnables, spécifiées dans l’ordonnance, que le juge de paix estime opportunes » (Code criminel, 1985, s 515(4)(f))Note de bas de page 6. Ce vaste pouvoir discrétionnaire paraît entraîner, du moins dans de nombreux tribunaux, l’imposition routinière d’une foule de conditions qui paraissent fréquemment avoir peu de rapport avec l’infraction alléguée et qui ne semblent pas nécessaires pour donner suite aux critères de la mise en liberté. Certains ont plutôt laissé entendre que des conditions comme l’obligation de « fréquenter l’école » ou de « suivre une thérapie ou un traitement » peuvent s’inscrire dans l’atteinte d’objectifs sociaux plus vastes, mais elles n’ont aucun lien avec l’infraction alléguée.

Confronté au choix entre demeurer détenu ou être mis en liberté à des conditions qui, de son point de vue, peuvent paraître déraisonnables ou superflues, l’accusé se trouve dans une situation difficile : accepter les conditions et être mis en liberté ou risquer de demeurer en détention jusqu’à l’issue de l’affaire. Peu d’accusés choisissent cette dernière solution. Toutefois, même si cette décision peut, dans un certain sens, être sage à court terme, elle risque d’avoir des conséquences encore plus pénalisantes à long terme. En particulier, plus le nombre de conditions de l’ordonnance de mise en liberté est élevé, plus grandes sont les probabilités que l’accusé manque à l’une d’entre elles, ce qui risque de lui valoir une nouvelle accusation criminelle d’avoir « omis de se conformer à une ordonnance de la cour », une infraction qui est considérée dans presque tous les cas comme une violation de l’ordonnance de mise en liberté sous caution. Quand de multiples conditions de mise en liberté sont jumelées à l’attente de plus en plus longue en liberté sous caution avant l’issue de l’affaire, la possibilité de faire l’objet d’une accusation relative à l’administration de la justice augmente considérablement.

Le tableau 2 confirme cette situation.

Tableau 2 : Pourcentage de toutes les personnes accusées par la police dont l’infraction la plus grave dans l’incident était un manquement à une ordonnance judiciaire (Source : Statistique Canada, CANSIM, Statistiques des crimes fondés sur l’affaire)
Année Adultes et ado. Adultes Ado.
1998 6,1 6,1 6,1
1999 6,4 6,4 6,2
2000 7,2 7,3 6,8
2001 8,2 8,3 7,9
2002 8,7 8,8 48,2
2003 9,6 9,6 9,6
2004 10,0 9,9 10,4
2005 10,1 10,0 10,6
2006 10,2 10,1 11,2
2007 11,1 11,1 11,7
2008 11,8 11,8 12,1
2009 11,9 11,9 12,2
2010 12,2 12,2 12,0
2011 12,7 12,6 12,9
2012 12,9 12,9 13,2
2013 13,1 13,1 12,9

Au cours des 15 dernières années, la proportion des personnes accusées d’avoir « omis de se conformer à une ordonnance » dont il s’agissait du chef d’accusation le plus grave a plus que doublé, tant chez les adultes que chez les adolescents. Autrement dit, chez approximativement 1/8 de tous les accusés qui ont comparu devant les tribunaux en 2013, c’est cette infraction qui était le chef d’accusation le plus grave. En réalité, un cercle vicieux paraît s’être créé du fait que le système de justice pénale « fabrique » son propre crime. Particulièrement dans les cas où l’accusé est reconnu coupable de l’accusation d’avoir omis de se conformer à une ordonnance de mise en liberté sous caution, une autre entrée s’ajoute à son casier judiciaire, ce qui lui compliquera la tâche s’il demande une mise en liberté sous caution à l’avenir. De plus, une infraction concernant l’administration de la justice qui a été commise après que le contrevenant a été mis en liberté relativement à une autre infraction est maintenant assujettie aux dispositions sur l’inversion du fardeau de la preuve. Même dans les cas où l’accusé est de nouveau mis en liberté sous caution, le tribunal est susceptible de lui imposer des conditions encore plus sévères, créant ainsi d’autres occasions de manquer aux conditions de sa nouvelle ordonnance de mise en liberté. Ce « modèle de rétroaction » devient particulièrement déconcertant quand on se rappelle que beaucoup des conditions originales de la mise en liberté pouvaient être superflues ou déraisonnables ou plaçaient manifestement l’accusé dans une situation propice à l’échec (p. ex. imposer la condition de s’abstenir de consommer des stupéfiants ou de l’alcool à une personne accusée qui a clairement des problèmes de toxicomanie ou obliger un accusé souffrant de l’ETCAF à se présenter à un poste de police une journée déterminée chaque semaine).