Les problèmes juridiques de la vie quotidienne
La nature, l'étendue et les conséquences des problèmes justiciables vécus par les Canadiens

Chapitre VII : L'issue des problèmes

Il ressortait des propos des répondants que plus de la moitié - 53,9 % - de tous les problèmes avaient été réglés au moment de l'entrevue et qu'un peu plus du tiers -35,2 % - de tous les problèmes n'avaient pas été réglés. Les répondants ont dit qu'ils avaient arrêté d'essayer de régler le problème dans 7,8 % des cas. Par ailleurs, ils ne savaient pas si le problème était réglé dans 2,1 % de tous les cas et ils estimaient qu'il était trop tôt pour dire si le problème était réglé dans 1 % des cas.

Figure 12 : Issue des problèmes

Figure 12 : Issue des problèmes

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Comme il fallait s'y attendre, la proportion des problèmes réglés augmente chaque année. Environ 40 % (40,8 %) des problèmes survenus au cours de l'année précédant l'enquête avaient été réglés. Ce taux augmente à 53,4 % dans le cas des problèmes survenus entre un et deux ans avant l'enquête et à 57,8 % dans le cas des problèmes survenus entre deux et trois ans avant l'enquête. Cette augmentation constante du nombre de problèmes réglés avec le temps baisse légèrement pour ce qui est des problèmes survenus il y a quatre ans ou plus. Cette tendance va de pair avec la diminution constante de la proportion de problèmes qui ne sont pas réglés d'une année à l'autre. La proportion diminue avec le temps, d'un tout petit moins que la moitié des problèmes (49,5 %) apparus il y a un an, à un peu plus du quart (28 %) des problèmes remontant à deux ou trois ans. La proportion de problèmes non réglés après quatre ans ou plus augmente à 34,5 %.

Les problèmes que les répondants ont arrêté d'essayer de régler sont les plus intéressants. Leur proportion augmente de 6,5 % dans le cas des problèmes apparus il y a un an, à 10,6 % dans le cas des problèmes qui ont pris naissance entre deux et trois ans avant l'enquête. Sept pour cent (7 %) des problèmes étant apparus il y a plus de quatre ans ont été abandonnés.

Figure 13 : Issue des problèmes par durée du problème (en années)

Figure 13 : Issue des problèmes par durée du problème (en années)

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Issue et types de problèmes

Les problèmes qui ont été le moins souvent réglés avaient trait aux pensions d'invalidité. Ces problèmes n'ont pas été réglés dans 64,6 % de tous les cas. De même, les problèmes liés à l'aide sociale n'auraient pas été réglés dans 51 % des cas. Les problèmes en matière d'immigration n'auraient pas non plus été réglés relativement souvent. La plupart de ces problèmes avaient trait à l'obtention de l'asile et le taux de problèmes non réglés - 57,1 % - s'explique probablement par la durée du processus d'obtention de l'asile. Les problèmes de discrimination étaient également relativement peu nombreux à avoir été réglés, à 50,6 %. Une proportion similaire - 50,9 % - a été constatée dans le cas des problèmes concernant les blessures corporelles. De même, un pourcentage relativement élevé de problèmes relevant du droit de la famille sont restés sans solution : 49,5 % des problèmes liés à l'éclatement de la famille et 48,5 % des autres problèmes relevant du droit de la famille.

C'est à l'égard des problèmes liés à la consommation que les répondants ont été le plus nombreux à abandonner l'idée de trouver un règlement : 12,8 %. Ces problèmes sont suivis de près par les problèmes de discrimination. Les répondants ont dit qu'ils avaient mis fin à leurs efforts pour régler le problème dans 12,1 % de tous les cas de discrimination. De plus, le pourcentage de répondants ayant laissé tomber l'idée de régler le problème était également relativement élevé dans le cas des problèmes en matière d'emploi - 9,1 %. Le tableau 43 montre les proportions de problèmes réglés et non réglés pour tous les types de problèmes.

Tableau 43 : Issue des problèmes
Type de problèmes Réglé Non réglé Abandonné Trop tôt pour le dire Ne sait pas « N » total
Consommation 58,3 % 27,9 % 12,8 % 0,7 % 2,2 % 1 480
Emploi 55,2 % 32,5 % 9,1 % 1,1 % 2 % 1 421
Endettement 56,4 % 34,6 % 5,6 % 1,6 % 1,8 % 1 444
Aide sociale 40,8 % 51 % 4,1 % 0 % 4,1 % 49
Pensions d'invalidité 29,2 % 64,6 % 4,2 % 0 % 2,1 % 48
Logement 54,7 % 35,8 % 7,4 % 0 % 2,1 % 95
Immigration 37,1 % 57,1 % 2,9 % 0 % 29 % 35
Discrimination 34,1 % 57,1 % 0 % 12,1 % 2,2 % 91
Intervention policière 65,1 % 25,2 % 4,9 % 1 % 3,9 % 103
Éclatement de la famille 47,1 % 49,6 % 1 % 1 % 1,3 % 244
Autres problèmes relevant du droit de la famille 48,5 % 48,6 % 0 % 0 % 2,9 % 68
Testaments et mandats 52,4 % 42,2 % 2,1 % 0 % 3 % 330
Blessures corporelles 41,6 % 50,9 % 6,2 % 0,6 % 0,7 % 161
Hospitalisation et congé 55,8 % 31,4 % 7 % 1,1 % 4,7 % 86
Menace de poursuites judiciaires 50,9 % 47,1 % 0 % 2 % 0 % 51

c2 = 244,8, p = 0,0001

Problèmes réglés, mais règlement injuste

La majorité des problèmes étaient réglés au moment de l'entrevue. Dans une grande proportion, le règlement obtenu était toutefois injuste aux yeux des répondants. Dans l'ensemble, pour tous les types de problèmes, les répondants estimaient que le règlement était injuste dans 44,4 % de tous les cas et juste dans 53,2 % de tous les cas; ils ne le savaient pas dans une très petite proportion de 2,5 % de tous les problèmes.

Les chiffres varient encore une fois en fonction du type de problèmes. Le tableau 44 montre l'opinion exprimée par les répondants quant à l'équité du règlement obtenu, pour chacun des types de problèmes.

Tableau 44 : Perception de justice des règlements obtenus
Types de problème Juste Injuste Ne sait pas « N » total
Consommation 45,1 % 52,9 % 1,1 % 1 022
Emploi 46,7 % 50,7 % 2,6 % 914
Endettement 65,6 % 32,4 % 2 % 896
Aide sociale 45,5 % 50 % 4,5 % 22
Pensions d'invalidité 62,5 % 37,5 % 0 % 16
Logement 59,3 % 37,3 % 3,4 % 59
Immigration 78,6 % 21,4 % 0 % 14
Discrimination 38,1 % 61,9 % 0 % 42
Intervention policière 31,9 % 61,1 % 7 % 72
Éclatement de la famille 66,7 % 29,1 % 4,2 % 117
Autres problèmes relevant du droit de la famille 45,5 % 51,5 % 3 % 33
Testaments et mandats 68,9 % 27,8 % 3,3 % 180
Blessures corporelles 54,6 % 42,8 % 2,6 % 77
Hospitalisation et congé 53,7 % 42,6 % 3,7 % 54
Menace de poursuites judiciaires 61,5 % 34,6 % 3,9 % 26

c2 = 164,9, p = 0,0001

Il n'est peut-être pas étonnant, bien que quelque peu ironique, de constater que les répondants qui n'ont fait aucun effort pour régler leur problème étaient relativement très nombreux à penser que l'issue était injuste. Les personnes qui n'ont entrepris aucune démarche pour une raison quelconque (voir le chapitre V) étaient les plus nombreuses à penser que la façon dont les choses s'étaient terminées était injuste. Le tableau 45 montre que les personnes qui n'ont rien fait pour régler leur problème parce qu'il n'était pas assez important selon elles étaient également très nombreuses à considérer comme injuste l'issue du problème. Les répondants ayant tenté de trouver une solution à leur problème étaient beaucoup moins nombreux à penser que cette solution était injuste. Les pourcentages sont semblables dans le cas des répondants qui ont demandé à la fois de l'aide non juridique et de l'assistance juridique, ce qui indique clairement que le fait de ne prendre aucun moyen pour régler le problème est une mauvaise stratégie. Il est fortement souhaitable que les personnes aux prises avec un problème puissent obtenir dès le début une certaine forme d'aide afin de comprendre la nature et la gravité du problème et de choisir la façon de procéder qu'il convient d'adopter. Il semble qu'il serait utile d'offrir une certaine forme d'aide active aux personnes qui restent plutôt passives devant les problèmes. En outre, à l'instar des conclusions de la commission Hughes dont il a été question dans le chapitre précédent, ces résultats fait ressortir l'importance de l'information juridique et l'importance de connaître les sources d'information facilement accessibles.

Tableau 45 : Impressions de justice et moyens pris pour régler le problème
Impression de justice Moyens pris pour régler le problème
Aucun : pas important Aucun : raison quelconque A réglé le problème par lui-même Aide non juridique Assistance juridique
Juste 39,5 % 31,8 % 58,7 % 60 % 56,2 %
Injuste 55,6 % 64,4 % 39,5 % 37,8 % 41,7 %
Ne sait pas 4,9 % 3,8 % 1,8 % 2,2 % 2,1 %
« N » total 243 556 1710 735 324

c2 = 159,9, p = 0,0001

Aggravation des problèmes non réglés

Le fait que des problèmes ne sont pas réglés et que la situation se détériore ou ne s'améliore pas peut être la preuve que des besoins ne sont pas comblés. La figure 14 montre que 18,6 % des répondants qui ont dit que le problème n'avait pas été réglé ont mentionné que la situation s'était améliorée, 12,3 %, que la situation s'était détériorée et 65,7 % - la plus grande proportion - que la situation était restée à peu près la même depuis l'apparition du problème.

Figure 14 : Conséquences des problèmes non réglés

Figure 14 : Conséquences des problèmes non réglés

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Quand on compare les répondants qui ont dit que la situation s'était améliorée et ceux pour lesquels la situation s'était détériorée, on se rend compte qu'il existe un lien entre le moyen choisi pour régler le problème et les circonstances qui font que la situation s'est dégradée. Toutes choses étant égales, la situation s'est améliorée plus souvent qu'elle ne s'est détériorée. Le tableau 46 montre cependant que le fait d'entreprendre des démarches, quelles qu'elles soient, est plus susceptible d'améliorer la situation que de la détériorer.

Tableau 46 : Démarche entreprise pour régler les problèmes et résultat
Démarche entreprise pour régler le problème La situation s'est améliorée La situation s'est détériorée Différence de pourcentage « N » total
N'a rien fait : pas assez important 58,8 % 41,2 % 17,6 % 17
N'a rien fait : raison quelconque 53,4 % 46,5 % 6,9 % 101
A réglé le problème par lui-même 59,8 % 40,2 % 19,6 % 224
A demandé de l'aide non juridique 65,5 % 34,1 % 31,8 % 214
A demandé de l'assistance juridique 57 % 43 % 14 % 128

c2 = 76,3, p = 0,0001

Le fait de demander une aide non juridique a le plus d'incidences sur l'amélioration ou la détérioration de la situation. La différence entre la proportion de répondants qui ont demandé de l'aide non juridique et la proportion de répondants qui ont dit que la situation s'était améliorée est de 31,8 %. Par ailleurs, la différence entre la proportion de personnes qui n'ont rien fait pour régler le problème pour une raison quelconque et qui ont dit que la situation s'était améliorée et la proportion de celles qui ont dit qu'elle avait empiré est de 6,9 % seulement. Lorsqu'on compare ces deux groupes, le pourcentage de répondants qui ont dit que la situation s'était améliorée est plus élevée chez ceux qui ont demandé de l'aide non juridique que chez les autres. De plus, la demande d'aide a fait une différence beaucoup plus grande : l'écart est de 38,1 % entre les cas où la situation s'est améliorée et les cas où elle s'est détériorée pour les répondants qui ont sollicité une aide non juridique et de 6,9 % dans les cas où aucune démarche n'a été entreprise.

La différence entre les cas où la situation s'est améliorée et ceux où elle s'est détériorée est de 19,6 % lorsque les répondants ont réglé le problème par eux-mêmes, de 17.6 % lorsque les répondants n'ont demandé aucune aide parce qu'ils estimaient que le problème n'était pas assez important et de 14 % lorsque les personnes ont demandé de l'assistance juridique. Le fait que c'est l'obtention de services juridiques qui a le moins d'impact sur l'amélioration ou la détérioration de la situation est probablement attribuable à la complexité des problèmes que les personnes soumettent aux avocats. De même, le processus judiciaire peut être long en raison des nombreux ajournements et des longs délais entre eux. Dans une recherche sur les problèmes que les personnes éprouvent au regard de l'accès aux tribunaux, Stratton et Anderson ont démontré que la situation s'était détériorée dans certains cas où une assistance juridique avait été fournie[212]. La différence entre les cas où la situation s'est améliorée et ceux où elle s'est détériorée pour les répondants ayant réglé leur problème par eux-mêmes est de 19,6 %. De toute évidence, il est préférable de tenter de régler le problème, peu importe comment, que de ne rien faire. La différence est plus faible entre les cas où la situation s'est améliorée ou détériorée pour les répondants qui n'ont pris aucune mesure pour régler le problème parce qu'ils estimaient que celui-ci n'était pas assez important que pour les répondants qui ont tenté de régler le problème par eux-mêmes ou qui n'ont rien fait parce que le problème n'était pas important.

Il semble qu'il n'y ait aucun rapport entre, d'une part, le fait d'être aux prises avec des problèmes multiples et, d'autre part, le fait de ne pas les régler, la détérioration de la situation ou l'impression que l'issue des problèmes est injuste.

Les caractéristiques démographiques des répondants ne semblent pas avoir d'incidence sur les diverses issues. Dans l'ensemble, le fait d'être sans emploi est faiblement lié à la décision de mettre fin à toutes tentatives de règlement des problèmes[213] et à l'impression que l'issue est injuste[214]. Les personnes ayant des revenus de moins de 25 000 $ sont les plus susceptibles de considérer que les problèmes non réglés se sont aggravés[215].