Projet de loi C-48 : Modifications proposées pour renforcer le système de mise en liberté sous caution du Canada
Le 16 mai 2023, le gouvernement du Canada a déposé le projet de loi C-48, qui propose d’apporter des modifications aux dispositions du Code criminel qui régissent la mise en liberté sous caution afin de favoriser la sécurité des collectivités et de renforcer la confiance du public envers l’administration de la justice.
Le projet de loi C-48 vise à apporter des modifications ciblées au régime de mise en liberté sous caution prévu par le Code criminel afin de mieux répondre aux cas de récidive grave avec violence impliquant l’usage d’armes à feu, de couteaux, de répulsif à ours et d’autres types d’armes. Le projet de loi C-48 propose également d’apporter des modifications à l’étape de la mise en liberté sous caution afin d’atténuer les risques associés à la violence envers un partenaire intime (VPI). Les modifications proposées visent à améliorer la sécurité de la population et des collectivités de l’ensemble du pays.
Les modifications proposées ont été élaborées en étroite collaboration avec l’ensemble des provinces et des territoires, notamment lors d’une réunion fédérale-provinciale-territoriale spéciale des ministres responsables de la justice et de la sécurité publique tenue le 10 mars 2023. Elles tiennent compte également des observations formulées par d’autres partenaires et intervenants, dont les forces de l’ordre, des organismes communautaires et des partenaires autochtones, et répondent directement aux appels des premiers ministres des provinces et de la communauté policière à opérer une réforme.
Les réformes proposées dans le projet de loi C-48 ne sont qu’un élément de la solution à plus grande échelle qui est nécessaire pour assurer l’atteinte des objectifs du système de mise en liberté sous caution. Ce système relève de la responsabilité conjointe des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Le gouvernement fédéral édicte les lois pénales et veille à ce que ces dernières respectent les limites fixées par la Charte canadienne des droits et libertés. Les gouvernements provinciaux et territoriaux sont responsables de l’administration de la justice et à ce titre, ils tiennent la plupart des audiences sur la mise en liberté sous caution, vérifient le respect des conditions de mise en liberté sous caution et gèrent la plupart des établissements où sont détenues les personnes qui sont en attente de leur procès.
La réforme du droit contribuera de façon importante au maintien et à l’accroissement de la sécurité publique, mais des programmes, des politiques et des investissements sont également essentiels pour favoriser des collectivités plus sûres. Cela inclue des investissements permettront de renforcer l’application de la mise en liberté sous caution et d’améliorer les mesures de soutien en matière d’accès au logement, de santé mentale et de dépendances. Tous les ordres de gouvernement conviennent qu’une meilleure collecte de données est nécessaire pour comprendre pleinement la façon dont fonctionne le système de justice pénale et, en particulier, la mise en liberté sous caution.
- Renforcer le système de mise en liberté sous caution pour mieux assurer la sécurité des collectivités – Communiqué de presse (16 mai 2023)
- Progrès accomplis à la réunion des ministres responsables de la justice et de la sécurité publique afin de renforcer le système de mise en liberté sous caution du Canada – Communiqué (10 mars 2023)
- Fiche d’information : le processus de mise en liberté sous caution
Sur cette page
- Réformes ciblées proposées au système de mise en liberté sous caution
- Créer une nouvelle disposition d'inversion du fardeau de la preuve pour les cas de récidive grave avec violence et usage d’une arme
- Allonger la liste des infractions liées aux armes à feu qui entraînent une inversion du fardeau de la preuve
- Élargir l’application du fardeau inversé visant les récidivistes en matière de violence envers un partenaire intime
- Clarifier la signification du terme « ordonnance d’interdiction » dans le contexte du fardeau inversé qui s’applique aux infractions impliquant des armes
- Exiger des tribunaux qu’ils tiennent compte, dans toute décision relative à la mise en liberté sous caution, des condamnations antérieures pour violence de la personne prévenue et des préoccupations liées à la sécurité des collectivités
- Obligation d’amorcer un examen parlementaire du projet de loi C-48 cinq ans après son adoption afin d’évaluer l’efficacité des mesures
- Préambule énonçant les principes fondamentaux qui sous-tendent le système de mise en liberté sous caution
Réformes proposées au système de mise en liberté sous caution
Le projet de loi propose un certain nombre de modifications qui permettraient de mieux répondre aux défis que posent les cas de récidive avec violence et usage d’une arme à l’étape de la mise en liberté sous caution, y compris les infractions impliquant l’usage d’armes à feu, de couteaux ou de répulsif à ours.
Les modifications qui seraient apportées aux dispositions du Code criminel qui régissent la mise en liberté sous caution auraient pour effet de :
- créer une nouvelle disposition d’inversion du fardeau de la preuve pour les cas de récidive grave avec violence et usage d’une arme;
- allonger la liste des infractions liées aux armes à feu qui entraînent une inversion du fardeau de la preuve;
- élargir l’application du fardeau inversé visant les récidivistes en matière de violence envers un partenaire intime (VPI);
- clarifier la signification du terme « ordonnance d’interdiction » dans le contexte du fardeau inversé qui s’applique aux infractions impliquant des armes à feu;
- exiger des tribunaux qu’ils tiennent compte, dans toute décision relative à la mise en liberté sous caution, des condamnations antérieures pour violence de la personne prévenue et des préoccupations liées à la sécurité des collectivités.
Conformément à la Charte, une personne accusée d’une infraction a le droit de ne pas être privée sans juste cause d’une mise en liberté assortie d’un cautionnement raisonnable.
On parle de mise en liberté sous caution lorsqu’une personne accusée d’une infraction criminelle est remise en liberté dans l’attente de son procès. Les personnes prévenues sont présumées innocentes tant qu’elles n’ont pas été déclarées coupables de l’infraction dont elles sont accusées. C’est la raison pour laquelle le fardeau de démontrer qu’une personne prévenue devrait se voir refuser une mise en liberté sous caution (et être maintenue sous garde dans l’attente de son procès) incombe généralement à la poursuite.
Il y a inversion du fardeau de la preuve lorsque le fardeau qui incombe à la poursuite est transféré à la personne prévenue. En situation de fardeau inversé, la présomption est que la personne prévenue sera maintenue sous garde dans l’attente de son procès, à moins qu’elle ne puisse démontrer au tribunal qu’elle devrait être remise en liberté.
La notion de juste cause exige de tenir compte de la question de savoir si la détention est nécessaire pour assurer la présence de la personne prévenue au tribunal, assurer la sécurité du public, notamment celle des victimes, ou pour préserver la confiance du public envers l’administration de la justice.
Créer une nouvelle disposition d’inversion du fardeau de la preuve pour les cas de récidive grave avec violence et usage d’une arme
Le projet de loi introduirait une nouvelle disposition inversant le fardeau de la preuve pour les personnes accusées d’une infraction grave (c’est-à-dire une infraction assortie d’une peine d’emprisonnement maximale d’au moins 10 ans) impliquant de la violence (usage, tentative ou menace de violence) et l’usage d’une arme, qui ont déjà (au cours des cinq années précédentes) été déclarées coupables d’une infraction répondant aux mêmes critères.
Allonger la liste des infractions liées aux armes à feu qui entraînent une inversion du fardeau de la preuve
Le projet de loi assujettirait davantage d’infractions liées aux armes à feu aux dispositions actuelles d’inversion du fardeau de la preuve qui s’appliquent dans le contexte de la mise en liberté sous caution. Ces infractions sont les suivantes :
- possession illégale d’une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte chargée (ou pouvant l’être facilement) (article 95);
- introduction par effraction pour voler une arme à feu (art. 98);
- vol qualifié visant une arme à feu (art. 98.1);
- fabrication d’une arme automatique (art. 102).
Élargir l’application du fardeau inversé visant les récidivistes en matière de violence envers un partenaire intime
Le projet de loi permettrait d’élargir la disposition d’inversion du fardeau de la preuve introduite par l’ancien projet de loi C-75 – qui s’applique actuellement à toute personne accusée d’une infraction de VPI au titre du Code criminel qui a déjà été déclarée coupable d’une telle infraction – afin qu’elle s’applique dorénavant non seulement aux personnes prévenues qui ont déjà été déclarées coupables d’une infraction de VPI, mais également à celles qui ont déjà obtenu une absolution relativement à une infraction de VPI dont elles avaient été déclarées coupables.
Une absolution peut être accordée en vertu de l’article 730 du Code criminel après qu’une personne accusée ait plaidé coupable ou ait été déclarée coupable d’une infraction criminelle à son procès. La personne qui obtient une absolution est réputée ne pas avoir été condamnée à l’égard de l’infraction. Une absolution inconditionnelle cesse de figurer au casier judiciaire de la personne absoute un an après avoir été accordée. Une absolution sous conditions est accordée seulement si le délinquant se conforme à l’ensemble des conditions prévues dans une ordonnance de probation et n’est déclaré coupable d’aucune autre infraction. Si le délinquant respecte l’ensemble de ces conditions, son absolution cesse de figurer à son casier judiciaire trois ans après avoir été accordée.
Clarifier la signification du terme « ordonnance d’interdiction » dans le contexte du fardeau inversé qui s’applique aux infractions impliquant des armes
Le Code criminel impose déjà un fardeau inversé aux personnes demandant une mise en liberté sous caution qui auraient commis une infraction impliquant une arme à feu ou d’autres armes désignées alors qu’elles étaient visées par une ordonnance d’interdiction de possession d’armes.
La modification proposée permettrait de préciser que le terme « ordonnance d’interdiction » englobe les ordonnances de mise en liberté sous caution rendues par les tribunaux. Cela signifie qu'un fardeau inversé s’appliquerait à l’étape de la mise en liberté sous caution dans le cas des personnes accusées d’avoir commis une infraction impliquant des armes à feu ou d’autres armes désignées, telles qu’une arme prohibée ou un dispositif prohibé, alors qu’elles étaient visées par une ordonnance de mise en liberté comportant une condition leur interdisant d’avoir une arme à feu ou d’autres armes désignées en leur possession.
Exiger des tribunaux qu’ils tiennent compte, dans toute décision relative à la mise en liberté sous caution, des condamnations antérieures pour violence de la personne prévenue et des préoccupations liées à la sécurité des collectivités
Le projet de loi exigerait explicitement des tribunaux qu’ils tiennent compte de facteurs supplémentaires dans leur évaluation du risque que pose une personne prévenue avant de rendre une décision quant à la mise en liberté sous caution.
Le Code criminel exige actuellement des tribunaux qu’ils tiennent compte de tout facteur pertinent avant de rendre une ordonnance de mise en liberté sous caution, notamment le casier judiciaire de la personne prévenue et la question de savoir si l’infraction dont elle est accusée implique ou non des actes de violence envers un partenaire intime (paragraphe 515(3)).
Cette disposition du Code criminel serait modifiée de façon à exiger des tribunaux qu’ils tiennent compte de la question de savoir si la personne prévenue a déjà été déclarée coupable d’une infraction avec violence. Le paragraphe 515(13) du Code criminel serait également modifié afin d’exiger que le tribunal verse au dossier de l’instance une déclaration précisant qu’il a tenu compte de la sécurité de la collectivité à l’égard de l’infraction dont la personne prévenue est accusée avant de rendre une ordonnance de mise en liberté sous caution, ce qui aurait pour effet d’accroître la responsabilisation envers le public. Cette mesure répondrait aux besoins uniques des collectivités nordiques et éloignées qui se sont dites préoccupées par la possibilité que des personnes prévenues soient remises en liberté au sein de collectivités qui ne sont pas assez grandes pour que ces personnes puissent être maintenues à distance de leurs victimes alléguées.
Obligation d’amorcer un examen parlementaire du projet de loi C-48 cinq ans après son adoption afin d’évaluer l’efficacité des mesures
Le projet de loi comprendrait une disposition exigeant que le Parlement amorce un examen du projet de loi C-48 cinq ans après qu’il ait reçu la sanction royale afin d’évaluer l’efficacité des mesures législatives.
Préambule énonçant les principes fondamentaux qui sous-tendent le système de mise en liberté sous caution
Le projet de loi comprend un préambule dans lequel sont énoncés certains des principes fondamentaux qui sous-tendent le droit relatif à la mise en liberté sous caution au Canada. Ce préambule réaffirme, entre autres choses, la responsabilité conjointe des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux à l’égard du système de justice pénale et le fait qu’il est justifié de refuser d’accorder une mise en liberté sous caution lorsque le maintien sous garde est nécessaire pour assurer la protection du public, préserver la confiance du public envers l’administration de la justice ou assurer la présence de la personne prévenue au tribunal.
Un préambule fournit de l’information sur l’objectif général et la raison d’être d’une loi et peut éclairer les tribunaux dans leur interprétation des dispositions de la loi.
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