Comprendre les expériences des jeunes avec le système de justice pénale en tant qu’accusés et délinquants

Tableau de bord sur l’état du système de justice pénale

Comprendre les expériences des jeunes avec le système de justice pénale en tant qu’accusés et délinquants

Les sections qui suivent donnent un aperçu des expériences des jeunes avec le système de justice pénale en tant qu’accusés et délinquants. Même si la présente page porte sur certaines des expériences que les jeunes peuvent avoir avec le système de justice pénale, il convient de noter que le rôle que jouent les inégalités structurelles et la discrimination systémique plus générales dans l’évolution de leurs expériences et de leur traitement. Pour des renseignements supplémentaires, cliquez sur jeunes autochtones et jeunes noirs. Pour obtenir des ressources supplémentaires sur les jeunes et le système canadien de justice pénale pour les jeunes, cliquez sur bibliographie.

  • Facteurs de risque et de protection associés au comportement criminel des jeunes

    Le comportement des jeunes, qu’il soit criminel ou non, est le résultat d’interactions complexes entre une vaste gamme de facteurs. La recherche a permis de déterminer plusieurs facteurs de risque et de protection associés aux infractions criminelles chez les jeunes. Les facteurs de risques constituent des influences qui peuvent accroître la probabilité des résultats négatifs, comme les infractions criminelles. Parmi les facteurs de risques pour les jeunes, mentionnons les incapacités cognitives ou intellectuelles, le faible revenu familial, l’instabilité de l’environnement familial, l’inégalité sociale et structurelle, l’influence négative des pairs et les expériences et résultats scolaires négatifsNote de bas de page37. En revanche, les facteurs de protection sont des influences qui peuvent réduire la probabilité de résultats négatifs et atténuer l’incidence négative des facteurs de risque. Chez les jeunes, ces facteurs peuvent comprendre des relations interpersonnelles stables, des possibilités d’emploi et une estime de soi positiveNote de bas de page38.

    Dans la documentation, il a été déterminé que les expériences passées de victimisation et d’autres expériences négatives dans l’enfance sont des facteurs de risque qui peuvent accroître la probabilité que les jeunes se livrent à des comportements criminels et aient des démêlés avec le système de justiceNote de bas de page39. De telles expériences peuvent également accroître la probabilité que les jeunes se livrent à des comportements préjudiciables et/ou à risqueNote de bas de page40 pour gérer leur traumatisme, comme la consommation de drogues et d’alcool, ainsi que l’automutilation. Cela est particulièrement vrai pour les jeunes qui ont subi multiples types d’adversité et de traumatismeNote de bas de page41. En fait, les expériences de victimisation, les expériences négatives dans l’enfance et les préoccupations en matière de santé mentale se chevauchent chez les jeunes qui ont des démêlés avec la justiceNote de bas de page42. La recherche a indiqué qu’au moins la moitié de toutes les personnes emprisonnées au Canada ont subi une forme quelconque de violence durant l’enfanceNote de bas de page43.

    La présence de troubles neurodéveloppementauxNote de bas de page44 constitue un autre facteur de risque reconnu associé aux infractions criminelles. Voici, entre autres, des exemples de troubles neurodéveloppementaux : une déficience intellectuelle; le trouble déficitaire de l’attention et/ou hyperactivité; le trouble du spectre autistique; l’ensemble de troubles causés par l’alcoolisation fœtale; et le trouble du développement du langage. Les jeunes atteints de troubles neurodéveloppementaux ont tendance de subir d’autres déficiences cognitives et comportementales connexes, comme les troubles d’apprentissage, ainsi qu’une capacité décisionnelle réduite, un centre d’attention réduite, un contrôle des impulsions réduit et une mémoire réduiteNote de bas de page45. Les jeunes ayant obtenu un diagnostic d’un ou de plusieurs de ces troubles sont considérablement plus susceptibles d’avoir des démêlés avec le système de justice par rapport aux jeunes qui n’ont pas de troubles neurodéveloppementauxNote de bas de page46. Comme le laisse entendre la recherche, les jeunes qui éprouvent des difficultés relativement à des troubles neurodéveloppementaux non-traités et aux déficiences cognitives et comportementales connexes, sont plus susceptibles de mal se comporter, attirant ainsi l’attention de la policeNote de bas de page47.

  • Criminalité chez les jeunes et interactions avec la police

    Les taux de criminalité chez les jeunes au Canada sont à la baisseNote de bas de page48 depuis plus de deux décennies. La plupart des infractions criminelles commises par des jeunes sont considérées comme mineures, comme les infractions contre les biens et les infractions contre l’administration de la justiceNote de bas de page49.

    Selon la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA), les jeunes peuvent être détournés des processus judiciaires traditionnels, avant ou après la mise en accusation, à l’aide de mesures extrajudiciaires comme des avertissements, des renvois à des programmes ou à des services de counseling, la prestation de services de bénévoles, la réalisation d’une restitution et la rédaction de lettres d’excuses. Les mesures extrajudiciaires ont pour objet de réduire le nombre de jeunes traités dans le cadre des procédures judiciaires traditionnelles et de limiter ainsi, dans la mesure du possible, l’exposition des jeunes au système de justice pénale pour les jeunes. Selon la recherche, les jeunes à faible risque n’ayant aucune expérience judiciaire qui sont détournés des tribunaux ont des taux de récidive plus faibles par rapport aux jeunes qui sont envoyés devant les tribunauxNote de bas de page50.

    Les décisions de la police et de la Couronne en matière de déjudiciarisation sont fondées sur des facteurs juridiques (par exemple, le casier judiciaire, les démêlés antérieurs avec la police) et des facteurs extrajudiciaires (par exemple, les préoccupations en matière de santé mentale, l’attitude perçue de l’adolescent, les antécédents de consommation de substances)Note de bas de page51. Les décisions de déjudiciariser les jeunes sont également influencées par les inégalités structurelles et la discrimination systémique. En fait, des études sur la déjudiciarisation des jeunes ont soulevé des préoccupations au sujet des résultats différents fondés sur l’origine ethnoculturelle de l’adolescent accusé. Par exemple, une étude menée en Ontario a révélé que la décision des policiers en matière de déjudiciarisation était influencée par la race perçue de l’accusé; plus particulièrement, les jeunes noirs étaient moins susceptibles d’être déjudiciarisés que les jeunes blancs et les jeunes d’autres origines ethnoculturellesNote de bas de page52. Cliquez sur les jeunes autochtones et des jeunes noirs pour en savoir plus sur leur expériences.

    La recherche a depuis longtemps démontré que les jeunes sont particulièrement vulnérables lors de leurs interactions avec la police et d’autres autorités en matière de justice pénale, car ils ne comprennent souvent pas pleinement leurs droits légaux, même lorsqu’ils indiquent qu’ils les comprennentNote de bas de page53. De plus, les jeunes ont tendance à se conformer plus aux policiers et à éprouver une plus grande suggestibilité pendant les interrogatoires policiers. Cela fait en sorte que les jeunes sont plus susceptibles que les adultes d’avouer aux policiers et d’avouer de faux aveux, même après avoir été informé de leurs droits légauxNote de bas de page54. Les universitaires ont proposé que l’une des raisons de cela est que les jeunes sont plus susceptibles de renoncer à leurs droits et de subir en fin de compte un interrogatoire policier sans être représentés par un avocatNote de bas de page55. Par conséquent, des mesures de protection et des procédures supplémentaires sont nécessaires lors des interactions avec les jeunes pour leur permettre de bien comprendre leurs droitsNote de bas de page56. Cela souligne davantage l’importances des mesures de protection spéciales et des droits à l’application régulière de la loi décrits dans la LSJPA. Pour en savoir plus sur ces protections spéciales, cliquez sur Droits légaux et mesures de protection spéciales pour les jeunes.

  • La « porte tournante » de la justice pour les jeunes

    La Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA) reflète le principe fondamental du droit criminel selon lequel une personne accusée d’avoir commis un crime est présumée innocente tant sa culpabilité n’a pas été prouvée. En vertu de la LSJPA, un adolescent accusé peut être mis en liberté dans la collectivité – appelé « sous caution » – ou détenu sous garde en attendant son procès ou la détermination de la peine – également appelé détention avant le procès. Le plus souvent, un adolescent accusé est libéré sous caution et est soumis à une liste de conditions qu’il doit respecter et qui est fixée par le juge. Si l’adolescent ne respecte pas ses conditions de libération sous caution, il peut être tenu de comparaître de nouveau devant le tribunal pour répondre à de nouveaux chefs d’accusation, souvent des infractions contre l’administration de la justiceNote de bas de page57. En fait, l’une des raisons les plus courantes de la détention avant le procès est une infraction relative à l’administration de la justice. Même si certaines conditions de libération sous caution visent à réduire la probabilité de commettre une infraction (par exemple, des restrictions concernant les associations avec des personnes particulières, des ordres de s’abstenir de consommer d’alcool ou de drogues, des exigences en matière de traitement), des préoccupations ont été soulevées selon lesquelles les conditions de libération sous caution pour les jeunes ne sont pas toujours liées aux comportements délinquants de la personne et que les jeunes sont plus susceptibles ne pas respecter les conditionsNote de bas de page58, entraînant d’autres accusations criminellesNote de bas de page59.

    Des études ont démontré que l’imposition de conditions de libération sous caution peut créer une situation de « porte tournante », où les premières accusations criminelles sont suivies d’accusations pour des infractions contre l’administration de la justice (par exemple, violation des conditions de libération, l’omission de comparaître devant le tribunal) avant qu’un adolescent ne soit reconnu coupable ou non coupable de la première accusation criminelle. Cela peut prolonger les démêlés avec le système de justice pénaleNote de bas de page60. Il est ressorti de la recherche qu’une fois qu’un adolescent a été reconnu coupable d’avoir violé une ordonnance du tribunal, ce dernier est moins susceptible de le libérerNote de bas de page61. Cela représente un défi important pour le système de justice pénale pour les jeunesNote de bas de page62, car ces derniers doivent comparaître continuellement devant le tribunal pour avoir violé les conditions en raison de comportements qui ne sont pas typiquement de nature criminelle, comme se présenter à l’école ou respecter un couvre-feuNote de bas de page63. Ces taux élevés de mise en accusation et de détention pour des infractions relatives à l’administration de la justice ont contribué à la surreprésentation des jeunes autochtones, racialisés et vulnérables dans le système de justice pénaleNote de bas de page64.

    En réponse à ces préoccupations, l’ancien projet de loi C-75, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et d’autres lois et apportant des modifications corrélatives à certaines lois a modifié la LSJPA en vue d’inclure des dispositions qui favorisent davantage le recours aux sanctions et aux mesures extrajudiciaires (c’est-à-dire, les mesures de déjudiciarisation) en ce qui a trait aux infractions contre l’administration de la justice. Les modifications, qui sont entrées en vigueur le 18 décembre 2019, visent à:

    • encourager davantage le recours à des solutions de rechange aux accusations pour les infractions commises contre l’administration de la justice, comme les mesures extrajudiciaires et les comparutions pour manquementFootnote65;
    • veiller à ce que les conditions imposées à l’adolescent à l’étape de la mise en liberté sous caution ou de la détermination de la peine ne soient que celles qui sont nécessaires pour traiter le comportement délinquant et requises aux fins du système de justice pénale;
    • limiter le recours aux peines de détention sous garde pour les infractions commises contre l’administration de la justice.

  • Le recours à la détention sous garde pour les jeunes

    La détention sous garde peut être utilisée pour les adolescents qui ont été accusés d’une infraction pénale et placés en détention – également appelé détention avant le procès– ou qui ont été reconnus coupables d’une infraction criminelle et condamné à la détention sous garde. Il y a deux types de détention sous gardes utilisées dans les services correctionnels pour les jeunes:

    • détention sous garde en milieu ouvertNote de bas de page66: les jeunes doivent vivre dans un établissement correctionnel pendant une certaine période et sont autorisés à quitter temporairement l’établissement pour diverses raisons, comme les programmes de réadaptation, la fréquentation d’une école dans la collectivité, un emploi à temps partiel et le bénévolat.
    • détention sous garde en milieu fermé : les jeunes doivent vivre dans un établissement correctionnel plus restrictif, où l’accès aux programmes de réadaptation et d’éducation sont offerts au sein de l’établissement. Après leur libération, qui est généralement après les deux tiers de leur peine, ils sont placés sous surveillance et soutien dans la collectivité.

    La plus grande partie des jeunes en détention sous garde en milieu fermé ont été placés en détention avant le procèsFootnote67. Des études ont permis de conclure que les adolescents placés en détention avant le procès signalent avoir diverses émotions négatives, dont le stress, la frustration, la méfiance et l’incertitudeNote de bas de page68. Les professionnels de la justice pénale et le personnel correctionnel ont également signalé les effets néfastes de la détention avant le procèsNote de bas de page69, surtout pour les jeunes visés par les services de protection de l’enfance, car la participation des services à l’enfance et l’aide sont suspendus pendant la détention de l’adolescentNote de bas de page70. Des études ont également permis de conclure que la détention avant le procès ne contribue pas à promouvoir la réadaptation ni à réduire le risque de récidive à l’avenirNote de bas de page71.

    Reconnaissant les effets néfastes que la détention sous garde peut avoir sur un adolescent, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA) vise à limiter le recours à la détention sous garde. Depuis l’adoption de la loi, le nombre de jeunes condamné à la détention sous garde a considérablement diminué; par exemple, le nombre de condamnations à la détention sous garde des jeunes a chuté de 63 % au cours des sept premières années suivant la mise en œuvre de la LSPJANote de bas de page72. Cette baisse s’explique en partie par le fait que la Loi exige que le tribunal examine d’abord si une peine ne comportant pas de placement sous garde serait suffisante pour tenir l’adolescent responsableNote de bas de page73.

    Par exemple, en vertu de la LSJPA, si un adolescent est reconnu coupable d’une infraction non violente, il peut être condamné à une peine de placement sous garde différé et à une ordonnance de surveillance plutôt qu’à une peine de détention sous garde en milieu ouvert ou en milieu fermé. Cela permet aux jeunes de purger leur peine dans la collectivité, tout en étant soumis à des conditions particulières (par exemple, un couvre-feu, l’assignation à résidence). Il s’agit d’un « placement sous garde différé » parce que si l’adolescent viole une des conditions de l’ordonnance de surveillance, il peut être ordonné de purger le reste de sa peine en détention sous garde.

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